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Les autels de la peur

Les autels de la peur

Titel: Les autels de la peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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qui sentait la trahison royaliste, car cet inutile incendie n’allait pas recommander aux Belges la France nouvelle. Et tandis que le général mercenaire reculait ainsi, faute de troupes, déclarait-on, la grande masse des volontaires restait inemployée. Bernard était toujours à Soissons, avec bien d’autres bataillons inactifs. Il occupait ses loisirs à correspondre quasi quotidiennement avec Lise. Cependant, cinquante mille Prussiens, au bas mot, rejoignaient sans difficulté à Coblentz l’armée des émigrés.
    Le plus alarmant, en la circonstance, c’était l’impuissance des pouvoirs. L’exécutif, bien entendu, se gardait d’agir contre les sauveteurs de la royauté, qui s’avançaient vers la frontière. Mais l’Assemblée, paralysée par les Feuillants, ne faisait rien, elle non plus. Claude regrettait sans cesse davantage de n’être à présent qu’un fonctionnaire, de n’avoir plus aucune possibilité d’action, car les discours, au club, ne produisaient nul résultat efficace. Il ne servait à rien de dénoncer les généraux, d’accuser l’exécutif, il ne servait à rien que Brissot et Robespierre se fussent réconciliés pour demander la destitution de La Fayette, il ne servait à rien de réclamer des mesures, quand les alliés de l’ennemi détenaient les pouvoirs, occupaient le trône, les Directoires départementaux, les états-majors des gardes nationales. Pour combattre l’inertie et l’anarchie volontaires, une seule puissance restait : celle des communes, estimait Claude. Il avait fait écrire par l’évêque Gay-Vernon aux Jacobins de Limoges. Lui-même s’était adressé plus directement à Dumas, à Guillaume Dulimbert, les exhortant à réveiller en Limousin l’énergie patriotique. Il expédiait des articles au Journal du Département de la Haute-Vienne. Il fallait éperonner non seulement la municipalité de Limoges, mais toutes celles du département, au besoin par l’envoi de frères sûrs qui exciteraient les magistrats à déployer tout leur zèle. Aux Jacobins-Saint-Honoré, d’accord avec Robespierre, Danton, Brissot, il reprit en main le comité de correspondance afin d’intensifier celle-ci et de provoquer les sociétés de province à la lutte contre les autorités paralysantes.
    La Montagne avait mis le Roi en demeure de dire par quoi il comptait remplacer le camp sous Paris, puisqu’il le refusait. Il proposa par l’intermédiaire des ministres de former ce même camp sous Soissons. Avant que le comité militaire ait fourni son rapport sur ce projet, les communes, répondant à l’incitation jacobine – et girondine, car Barbaroux, Vergniaud, Isnard, avaient eux aussi écrit dans leurs départements – étaient entrées en insurrection. Celles des Bouches-du-Rhône, de l’Hérault et de la Gironde annonçaient à la Législative qu’elles tenaient pour lois ses décrets, sanctionnés ou non, qu’elles exécuteraient celui du 8 juin, et que leurs contingents de volontaires marchaient déjà sur Paris. Claude vit alors Desmoulins aussi exalté qu’il avait pu l’être le 12 juillet 89. « La deuxième Révolution est commencée ! » s’écriait-il en bégayant, le feu dans les yeux. « Le peuple de Paris a fait la première, le peuple de France tout entier va faire la seconde. »
    Cependant la partie feuillantine de l’Assemblée et les modérés poussaient des cris d’horreur devant cette atteinte à la Constitution. La Montagne elle-même hésitait à ouvrir pareille brèche dans un édifice croulant, dont elle ne voulait plus et qu’elle ne savait par quoi remplacer. Vergniaud, tout comme Robespierre, tout comme Marat, restait encore superstitieusement attaché au monarchisme. Danton devait bien garder derrière la tête un reste de ses idées orléanistes. Et Claude, tout républicain qu’il était devenu, n’osait pas plus que Legendre ou Santerre prononcer le mot, car il voyait de moins en moins à quel homme ou quels hommes confier l’exécutif d’une république. Pour respecter la Constitution, la Montagne vota le projet du Roi ; et pour ménager les départements – ils suivaient en nombre l’exemple du Midi – les modérés admirent, malgré les Feuillants, que les volontaires passeraient par Paris pour se faire inscrire à la municipalité, avant de se réunir au camp de Soissons. Claude apprit cette nouvelle, de la bouche de Gay-Vernon, avec étonnement. Quoi ! les modérés ne se rendaient-ils pas compte

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