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Les Aventures de Nigel

Les Aventures de Nigel

Titel: Les Aventures de Nigel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Walter Scott
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bateliers. Je vous réponds que plus d’un bel esprit a été mortellement blessé par un jeu de mots ou un quolibet à La Sirène, et en a été renvoyé dans un état piteux à l’hôpital des beaux esprits, dans le Vintry {68} , où il végète encore avec des imbéciles et des aldermen.
    – Cela peut être, et cependant je jurerais sur mon honneur que je crus voir avec nous hier soir plus d’un homme à qui son génie et son érudition auraient dû assurer un plus haut rang dans notre compagnie, et qui, ne l’obtenant pas, aurait dû se retirer d’une société où il ne jouait qu’un rôle subalterne et indigne de lui.
    – Voilà encore votre conscience délicate ! s’écria lord Dalgarno. Au diable ces proscrits du Parnasse ! Quoi ! ce sont les restes de ce noble banquet de harengs salés et de vin du Rhin qui a coûté à Londres tant de ces principaux marchands d’esprit et de ces bardes de la basoche ! Qu’auriez-vous dit si vous aviez vu Nash ou Green, puisque vous prenez tant d’intérêt aux pauvres bacheliers que vous avez vus hier soir ? Ils ont bien bu, bien mangé ; cela doit leur suffire. Ils dormiront bien, et il est probable que leur appétit ne s’éveillera que ce soir : alors, s’ils ont de l’industrie, ils trouveront quelque protecteur ou quelque comédien qui leur paiera à souper. Du reste, que leur manque-t-il ? ils trouveront de l’eau tant que la source de la Nouvelle-Rivière {69} ne tarira point, et les pourpoints qu’on porte sur le Parnasse sont d’éternelle durée.
    – Horace et Virgile avaient des protecteurs plus utiles.
    – Sans doute, mais ces drôles ne sont ni Virgile ni Horace. D’ailleurs, nous avons de beauxesprits d’une autre sorte, que je vous ferai connaître avant peu. Notre cygne de l’Avon {70} a fait entendre ses derniers chants ; mais il nous reste le vieux Ben {71} , qui a autant de génie et de science qu’aucun des poètes qui ont jamais chaussé le cothurne et le brodequin. – Mais ce n’est pas de lui que je veux vous parler en ce moment. Je viens vous prier, par amitié, de m’accompagner jusqu’à Richmond, où deux ou trois des galans que vous avez vus hier doivent régaler un cercle de belles de musique et de syllabub {72}  ; et je vous promets que vous y verrez des yeux qui feraient oublier à un astrologue la contemplation de la voie lactée. Ma sœur conduit la couvée, et je désire vous présenter à elle. Elle a des admirateurs à la cour, et quoique ce ne soit pas à moi de faire son éloge, je puis vous dire qu’elle passe pour une des beautés de notre temps.
    Il n’était guère possible de refuser une invitation faite à un homme naguère placé si bas à ses propres yeux, au nom d’une dame de haute condition, d’une des merveilles de la cour. Lord Glenvarloch accepta, comme cela était inévitable, et passa la journée dans un cercle d’ agréables et de beautés. Il fut attelé tout le jour au char de la sœur de son ami, la belle comtesse de Blackchester, qui aspirait à la fois à tenir le premier rang dans les trois royaumes de la mode, du crédit de cour et de l’esprit. Elle était beaucoup plus âgée que son frère, et avait probablement complété ses six lustres ; mais ce qui pouvait lui manquer du côté de l’extrême jeunesse se trouvait habilement compensé par le soin tout particulier qu’elle prenait de sa toilette. Elle était la première instruite de toutes les modes étrangères, et elle avait le talent de les adapter parfaitement à son teint et à ses traits. À la cour, elle savait aussi bien qu’aucune des dames qui en formaient le cercle quel ton il convenait de prendre, moral ou politique, sérieux ou badin, suivant l’humeur particulière du monarque, et l’on présumait que son crédit personnel avait beaucoup contribué à faire obtenir à son mari une place éminente que le vieux vicomte goutteux ne pouvait avoir méritée par un mérite fort ordinaire et par une intelligence des plus communes.
    Il fut beaucoup plus aisé à cette dame qu’à son frère de réconcilier un courtisan aussi jeune que lord Glenvarloch avec les coutumes et les usages d’une sphère si nouvelle pour lui. Dans toute société civilisée, les femmes du haut rang et d’une beauté distinguée donnent le ton, et deviennent les arbitres des manières, et par là même des mœurs. Lady Blackchester avait d’ailleurs à la cour, ou sur la cour, un crédit dont la source n’était point

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