Les chasseurs de mammouths
sédimentaires. Mais, lorsqu’il la
retourna, il eut la surprise de découvrir une opalescence luisante, sur la face
où la pierre s’était brisée. Des lueurs d’un rouge ardent émanaient de ce
caillou d’un blanc laiteux, des reflets chatoyants de bleus et de verts
dansaient et étincelaient au soleil à chaque mouvement de sa main.
— Ayla, regarde, dit-il en montrant à la jeune femme le
fragment d’opale. A voir la pierre de l’autre côté, jamais on ne soupçonnerait
tant de beauté. Mais vois, là où elle s’est brisée. Les couleurs semblent venir
de son cœur même et elles sont si vives. On la croirait vivante.
— Peut-être l’est-elle, ou peut-être est-ce un peu de l’esprit
de ton frère, répondit-elle.
16
Un remous d’air froid s’enroula autour de la tente basse. Un
bras nu fut vivement ramené sous une fourrure. Un vent violent souleva en
sifflant le pan de cuir qui protégeait l’ouverture. Un pli soucieux creusa le
front d’un visage endormi. Une rafale s’empara du pan dans un claquement sec,
le fit battre de tous côtés dans des courants d’air mugissants qui réveillèrent
en sursaut Ayla et Jondalar. Jondalar le rattacha solidement, mais le vent
continua de forcir toute la nuit, et ses sursauts, ses gémissements, ses
palpitations, ses hurlements autour du petit abri rendirent le sommeil
difficile, capricieux.
Le lendemain matin, ils durent se battre contre les bourrasques
pour replier la tente. Ils refirent rapidement leurs paquets sans prendre la
peine d’allumer un feu. Ils se contentèrent de boire l’eau glacée d’un ruisseau
proche en mangeant des aliments séchés. Le vent s’apaisa vers le milieu de la
matinée, mais une tension dans l’atmosphère leur faisait craindre que le pire
ne fût pas encore passé.
Quand le vent reprit, aux environs de midi, Ayla remarqua que l’air
avait une odeur presque métallique. Elle renifla, tourna la tête de tous côtés,
comme pour sonder l’atmosphère, évaluer la menace.
— Le vent sent la neige, cria-t-elle pour se faire entendre
par-dessus le tintamarre. Mon nez m’avertit.
— Que dis-tu ? demanda Jondalar.
Mais le vent emporta sa voix, et Ayla se fia au mouvement de ses
lèvres pour comprendre ce qu’il disait.
Elle s’arrêta pour lui permettre de la rejoindre.
— Je sens arriver la neige. Nous ferions bien de trouver un
abri avant qu’elle ne soit là, dit-elle.
Ses yeux inquiets fouillaient la vaste étendue plate.
— Mais où en découvrir un par ici ?
Jondalar n’était pas moins anxieux. Il se rappela le petit cours
d’eau presque entièrement gelé au bord duquel ils avaient campé la nuit
précédente. Ils ne l’avaient pas traversé. Il devait donc encore se trouver sur
leur gauche, même s’il décrivait de nombreux méandres. Il essaya de se repérer
à travers les nuages de poussière, mais rien n’était clair. Au hasard, il prit
à gauche.
— Essayons de retrouver ce petit cours d’eau, dit-il. Il
pourrait y avoir des arbres ou des berges hautes pour nous protéger.
Ayla hocha la tête et suivit. Whinney ne souleva aucune
objection, elle non plus.
La qualité subtile de l’air, que la jeune femme avait remarquée
et traduite comme une odeur de neige, ne l’avait pas trompée. Bientôt, une
poudre blanche se mit à tourbillonner follement, donnant au vent une forme plus
définie. Elle ne tarda pas à céder la place à des flocons plus gros qui
brouillaient davantage encore la vision.
Jondalar crut voir se dresser devant eux des formes vagues et s’arrêta
pour tenter de les préciser, mais Whinney poursuivit son chemin, et ils la
prirent pour guide. Des arbres courbés et un écran de broussailles marquaient
le bord d’un cours d’eau. L’homme et la femme auraient pu se tapir sous leur
protection, mais la jument continuait à suivre le courant. Ils parvinrent à un
coude où l’eau avait creusé profondément la berge étroitement tassée. Là, à l’abri
de la falaise basse qui les protégeait de la pleine force du vent, Whinney
poussa son poulain en avant et se plaça devant lui pour l’abriter.
Vivement, Ayla et Jondalar déchargèrent les chevaux, dressèrent
leur tente aux pieds même de la jument et s’y glissèrent pour attendre la fin
de la tempête.
Même en cet endroit protégé, le vent menaçait leur abri
précaire. L’ouragan rugissait de toutes les directions à la fois et semblait
bien décidé à se frayer un passage à
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