Les chasseurs de mammouths
suffisait de connaître ses propriétés.
— De la craie... avons-nous de la craie ? demanda
Crozie.
— Wymez en a. Il dit silex qu’il a rapporté vient de
falaise de craie. Il a encore plusieurs pierres couvertes ainsi.
— Pourquoi as-tu parlé de craie à Wymez ? Comment
savais-tu que j’accepterais de te montrer ? demanda Crozie d’un ton
soupçonneux.
— Ne savais pas. Veux faire tunique blanche depuis
longtemps. Si tu ne montres pas, j’essaie toute seule. Mais ne savais pas
fallait garder urine. N’aurais pas pensé. Suis heureuse tu vas montrer à faire
comme il faut.
— Humpff ! commenta très brièvement Crozie. Elle était
convaincue mais se refusait à l’admettre.
— N’oublie pas de me faire cette pommade blanche. Elle
ajouta :
— Fais-en aussi pour le cuir. Ce serait bon, je pense, d’en
mélanger à la craie.
Ayla écarta le rabat pour regarder à l’extérieur.
En cette fin d’après midi, le vent psalmodiait en gémissant une
triste mélopée qui s’accordait avec le morne paysage et le ciel gris, couvert.
Elle aurait souhaité pouvoir échapper au froid cruel qui
retenait tout le monde à l’intérieur, mais la saison accablante semblait ne
devoir jamais finir. Whinney s’ébroua. La jeune femme se retourna, vit Mamut
pénétrer dans le foyer des chevaux. Elle lui sourit.
Ayla, dès le début, avait éprouvé un profond respect pour le
vieux chaman, mais, depuis qu’il avait entrepris de l’initier, ce respect s’était
transformé en amour. C’était en partie parce qu’elle décelait une étrange
ressemblance entre le grand et maigre Mamut, incroyablement âgé, et le petit
magicien du Clan, borgne et boiteux, non pas en apparence mais par leur nature.
Elle avait presque l’impression d’avoir retrouvé Creb ou, au moins, sa
contrepartie. Tous deux professaient une compréhension et un respect profonds
pour le monde des esprits, même si les esprits qu’ils révéraient portaient des
noms différents. Tous deux savaient exercer de redoutables pouvoirs, en dépit
de leur faiblesse physique. Et tous deux possédaient une grande expérience des
réactions humaines. Mais ce qui, plus que tout peut-être, avait fait naître l’amour
chez la jeune femme, c’était que, comme l’avait fait Creb, Mamut l’avait
accueillie avec bonté, l’avait aidée à comprendre, avait fait d’elle une fille
de son Foyer.
— Je te cherchais, Ayla. Je pensais bien te trouver ici,
avec tes chevaux.
— Je regardais dehors. Je voudrais voir venir le printemps.
— C’est l’époque où la plupart de gens commencent à avoir
envie d’un changement, de quelque chose de nouveau à voir ou à faire. Ils s’ennuient,
ils dorment davantage. Voilà pourquoi, je pense, nous avons plus de festins et
de fêtes en cette dernière période de l’hiver. Le Concours du Rire est proche.
Presque tout le monde y prend plaisir.
— C’est quoi, le Concours du Rire ?
— Précisément ce que le nom indique. Chacun s’efforce de
faire rire les autres. Certains s’habillent d’une façon comique, portent leurs
vêtements sens devant derrière, se font des grimaces, se comportent d’une
manière ridicule, se moquent les uns des autres, se jouent des tours. Si quelqu’un
se fâche, on en rit encore davantage. Presque tout le monde attend ce concours,
mais aucune fête ne suscite autant d’impatience que le Festival de Printemps. C’est
cela, en fait, qui m’a lancé à ta recherche. Tu as encore beaucoup à apprendre,
avant ce Festival.
— Pourquoi le Festival du Printemps est-il si
particulier ? demanda Ayla.
Elle n’était pas bien sûre d’éprouver, elle, une telle
impatience.
— Pour de nombreuses raisons, je suppose. C’est à la fois
notre fête la plus solennelle et la plus joyeuse. Elle marque la fin d’une
longue saison de froid paralysant et le retour de la chaleur. On dit que, si l’on
observe une année durant le cycle des saisons, on comprend la vie. La plupart
des gens comptent trois saisons. Le printemps est la saison de la naissance.
Dans le jaillissement de ses eaux, les inondations printanières, la Grande
Terre Mère donne de nouveau la vie. L’été, la saison chaude, est le temps de la
croissance, de l’abondance. L’hiver est « la petite mort ». Au
printemps, la vie se renouvelle, renaît. Trois saisons suffisent à expliquer
presque tout, mais le Foyer du Mammouth en compte cinq. Le nombre sacré de la
Mère est le
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