Les chasseurs de mammouths
rien mais, en voyant ces plantes, j’ai pensé
que je ferais bien d’en prendre. Nous-mêmes avons bien souffert de cette
maladie. Dans combien de temps serons-nous là-bas, Talut ?
— Difficile à dire, répondit le chef. Nous voyageons plus
vite que d’ordinaire. Nous devrions atteindre le Camp sungaea dans un jour ou
deux, je pense. La carte que m’a faite Ludeg est très bonne, mais j’espère que
nous n’arriverons pas trop tard. Leur maladie est plus grave que je ne le
pensais.
— Comment le sais-tu ? questionna Ayla, les sourcils
froncés.
— J’ai trouvé des signes laissés par quelqu’un.
— Des signes ?
— Viens avec moi. Je vais te montrer.
Talut posa sa coupe et se leva. Il conduisit la jeune femme
jusqu’à un tas d’ossements, près de la rivière. On trouvait des os,
particulièrement de gros os, comme des crânes, dans toute la plaine, mais, en
approchant, Ayla vit clairement qu’il ne s’agissait pas là d’un amoncellement
qui s’était constitué naturellement. On avait empilé les ossements dans un but
précis. Un crâne de mammouth aux défenses brisées avait été placé, renversé, au
sommet du tas.
Talut le désigna d’un geste.
— C’est un signe de mauvaises nouvelles, dit-il. Très
mauvaises. Vois-tu cette mâchoire inférieure et les deux vertèbres qui s’y
appuient ? La pointe de la mâchoire désigne la direction à prendre, et le
Camp se trouve à deux jours d’ici.
— Ils doivent avoir besoin d’aide, Talut ! Est-ce dans
ce but qu’ils ont placé ici ce signe ?
Talut montra à la jeune femme un morceau d’écorce de bouleau noircie
par le feu, retenue par l’extrémité brisée de la défense gauche.
— Tu vois ça ?
— Oui. L’écorce est brûlée, comme si elle avait été dans un
incendie.
— Ça veut dire « maladie », « maladie
mortelle ». Quelqu’un est mort. Les gens ont peur de cette sorte de
maladie, et cet endroit est un lieu où l’on s’arrête souvent. Ce signe n’a pas
été placé ici pour demander de l’aide mais pour avertir les voyageurs de se
tenir à l’écart.
— Oh, Talut ! Il faut que j’y aille. Pour vous autres,
ce n’est pas nécessaire, mais moi, je dois y aller. Je peux partir tout de
suite, sur Whinney.
— Et que leur diras-tu, en arrivant là-bas ? demanda
Talut. Non, Ayla. Ils ne te permettront pas de leur venir en aide. Personne ne
te connaît. Ce ne sont même pas des Mamutoï, ce sont des Sungaea. Nous en avons
parlé. Nous savions que tu voudrais te rendre chez eux. Nous avons pris cette
route et nous t’accompagnerons. Grâce aux chevaux, je pense, nous pourrons
faire le chemin en un seul jour au lieu de deux.
Le soleil frôlait la limite de la terre quand les voyageurs
du Camp du Lion approchèrent d’un grand campement situé sur une large terrasse
naturelle, à une dizaine de mètres au-dessus d’une large et rapide rivière. Ils
s’arrêtèrent en voyant qu’on les avait remarqués : quelques personnes les
dévisagèrent avec stupeur, avant de courir vers l’une des habitations. Un homme
et une femme en émergèrent. Leurs visages étaient couverts d’une pommade à l’ocre
rouge, leurs cheveux blanchis de cendres.
Il est trop tard, se dit Talut. En compagnie de Tulie, il se
remit en marche vers le Camp sungaea, suivi de Nezzie et d’Ayla qui menait
Whinney, avec Mamut sur son dos. Visiblement, leur arrivée avait interrompu une
cérémonie importante. Ils étaient encore à quelques mètres de l’entrée du camp lorsque
l’homme au visage teint en rouge leva le bras, la main tournée vers les
arrivants. Il leur faisait manifestement signe de s’arrêter. Il s’adressa à
Talut dans un langage inconnu d’Ayla mais qui avait pourtant quelque chose de
familier. Elle avait l’impression qu’elle aurait dû le comprendre :
peut-être avait-il une ressemblance avec la langue des Mamutoï. Talut répondit
dans son propre langage. L’homme, alors, reprit la parole.
— Pourquoi le Camp du Lion des Mamutoï se présente-t-il
chez nous en un tel temps ? demanda-t-il, en mamutoï, cette fois. Il y a
dans ce Camp la maladie et une grande tristesse. N’as-tu pas vu les
signes ?
— Si, dit Talut, nous les avons vus. Nous avons parmi nous
une femme qui est fille du Foyer du Mammouth, une Femme Qui Guérit de grande
expérience. Ludeg, le courrier, qui est passé par ici il y a quelques jours
nous a parlé de vos épreuves. Nous nous apprêtions
Weitere Kostenlose Bücher