Les chasseurs de mammouths
ne
crois pas pouvoir en dessiner une.
— Bon, ne t’inquiète pas, dit Talut. Nous n’avons pas
besoin de carte si tu peux nous montrer le chemin. Peut-être, après notre
retour de la Réunion d’Été, tenterons-nous de faire un tour là-bas.
Il pointa vers les fleurs son menton barbu de roux.
— Que nous as-tu rapporté, cette fois, Ayla ?
— C’est ce que je vous demande de me dire. Je connais ces
fleurs mais j’ignore comment vous les appelez.
— Cette rouge-là est un géranium, déclara Talut. Et cette
autre est un pavot.
— Encore des fleurs ? fit Deegie, qui arrivait.
— Oui. Talut m’a dit les noms de ces deux-là.
— Voyons un peu. Ça, c’est de la bruyère, et ça, des
œillets sauvages. Deegie s’assit près d’Ayla.
— Nous sommes presque arrivés. Demain dans la journée, a
dit Talut. Je meurs d’impatience. Demain, je vais revoir Branag. Après ça, il
ne s’écoulera pas beaucoup de temps jusqu’à notre Union. Je ne sais même pas si
je vais pouvoir dormir cette nuit.
Ayla sourit à son amie. Il était difficile de ne pas partager un
tel enthousiasme, mais, en même temps, la jeune femme était amenée à se
rappeler qu’elle aussi serait bientôt unie. En entendant Jondalar parler de la
vallée et du moyen d’y retourner, elle avait senti renaître le douloureux désir
qu’elle avait de lui. Elle l’avait observé à la dérobée et elle avait la très
nette impression qu’il en avait fait autant de son côté. Sans cesse, leurs
regards se croisaient fugitivement, avant de se détourner.
— Oh, Ayla, il y a tant de gens que je veux te faire
connaître et je suis si heureuse que nous devions être unies lors de la même
cérémonie. C’est une chose que nous aurons toujours en commun.
Jondalar se leva.
— Il faut que j’aille... euh... dérouler mes fourrures de
couchage, marmonna-t-il, avant de s’éloigner précipitamment.
Deegie vit Ayla le suivre du regard et fut presque certaine de
voir des larmes retenues. Elle secoua la tête. Ayla n’avait vraiment rien d’une
femme qui allait s’unir à l’homme qu’elle aimait et fonder avec lui un nouveau
foyer. Elle ne montrait aucune joie, pas le moindre enthousiasme. Quelque chose
lui manquait. Quelque chose qui s’appelait Jondalar.
31
Au matin, le Camp du Lion reprit sa route vers l’amont, sur le
plateau, apercevant de temps à autre sur la gauche le flot tumultueux de la
rivière troublée par les eaux de fonte des glaciers et charriant des nuages de
vase. Parvenus à une fourche, là où deux grands cours d’eau se rejoignaient,
ils suivirent le bras de gauche. Après avoir passé à gué deux affluents,
presque tout leur chargement entassé dans un bateau emporté à cet effet, ils
descendirent vers les plaines inondables et continuèrent à travers les bois et
les prairies de la vallée.
Sans cesse, Talut examinait les creux et les ravins qui s’ouvraient
dans la rive haute, de l’autre côté de la rivière. Il confrontait le véritable
paysage aux symboles tracés sur l’ivoire, dont la signification demeurait
encore assez brumeuse pour Ayla. Un peu plus loin, près d’un coude prononcé, se
dressait le point le plus haut de la rive opposée : il s’élevait à quelque
quatre-vingts mètres au-dessus de la rivière. Du côté des voyageurs, une large
étendue d’herbe semée de bosquets se poursuivait sur plusieurs lieues. Ayla
remarqua un cairn fait d’ossements, surmonté d’un crâne de loup. Des rochers
étaient disposés à travers la rivière selon un aménagement bien précis, dans la
direction que suivait Talut.
La rivière, à cet endroit, était large, sans grande profondeur
et guéable de toute manière, mais quelqu’un avait rendu la traversée plus
facile encore. On avait empilé de place en place des rochers, des graviers,
quelques os, on avait aplati le sommet de ces monticules pour permettre de
passer à sec.
Jondalar s’arrêta pour regarder de plus près ce dispositif.
— Quelle idée ingénieuse ! remarqua-t-il. On peut
traverser la rivière sans même se mouiller les pieds !
— Les meilleurs endroits où construire des huttes se
trouvent de l’autre côté : ces trous profonds protègent bien du vent. Mais
les meilleurs terrains de chasse sont de ce côté-ci, expliqua Barzec. Ce
passage est emporté par les inondations, mais le Camp du Loup en reconstruit un
nouveau chaque année. Ils se sont donnés du mal encore, cette année, on
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