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Les chemins de la bête

Les chemins de la bête

Titel: Les chemins de la bête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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prendrait à son tour prétexte de
l’absence d’un souverain pontife pour ne rien faire.
    Clément attendait immobile, attendait il ne savait quoi de
cet homme. Un miracle, peut-être. Il suggéra :
    — Monsieur Charles de Valois, frère du roi, n’a-t-il
pas reçu le comté d’Alençon en apanage l’année dernière ?
    — Si fait.
    — La maison d’Inquisition à laquelle appartient ce
Nicolas Florin est celle d’Alençon, insista l’enfant.
    — Si une intervention de la maison royale pouvait nous
servir, mon choix se porterait sur Philippe, pas sur notre bon Charles, dont la
finesse politique n’est pas la qualité majeure. Mon garçon... Tout comte
d’Alençon qu’il est, Charles ne peut rien. L’Inquisition ne prend ordre de
personne, si ce n’est du pape lui-même.
    — Or nous n’avons pas de pape, répéta Clément.
    Sa voix se cassa. Il serra les lèvres, taisant la suite,
pourtant Artus dut lire dans son esprit puisqu’il rugit :
    — Et non, ôte-toi cela de la tête ! Elle n’est pas
perdue ! Je ne suis pas au bout de ma réflexion. Laisse-moi. J’ai besoin
de paix et ton silence est si bruyant qu’il m’empêche de penser.
    Clément l’abandonna sans bruit.
    Réfléchir.
    Le constat qu’il venait de faire tout en parlant au jeune
garçon qui le dévisageait le stupéfiait par sa sincérité, sa brutalité. Il
était capable de tout pour la sauver. S’y ajoutaient la lucidité, voire le
cynisme, qu’il avait développés vis-à-vis de l’appareil religieux dans sa
presque totalité. La foi était bien vite remisée lorsque pointaient l’argent et
le pouvoir. Artus le savait : nombre d’inquisiteurs s’achetaient, et
celui-là ne faisait pas exception à la règle puisque Eudes avait de toute
évidence rétribué ses services. Il suffisait alors de proposer davantage.
    Il partait demain pour Alençon.

 
     
Maison de l’Inquisition, Alençon, Perche, août 1304
    La parfaite beauté du jeune homme étonna Artus. Le portrait
qu’Agnès en avait brossé à Clément n’était pas excessif. L’onctuosité de
l’inquisiteur était si prévisible qu’elle aurait pu faire sourire le comte en
d’autres circonstances.
    — Quel honneur que cette visite, monsieur le comte,
pour l’humble moine que je suis.
    — Un humble moine ? Vous vous jugez trop
sévèrement, monsieur.
    Nicolas Florin tiqua à ce titre qui le mettait sur un plan
civil et le dépossédait de son aura religieuse, d’autant que la formule de
politesse, telle qu’elle était tournée, avait évité au comte de lui renvoyer
l’honneur. Il ne douta pas que ce choix avait été volontaire.
    Artus avait réfléchi tout le voyage à la façon d’aborder
l’inquisiteur. Fallait-il progresser à pas comptés, ou foncer droit au cœur du
sujet ? Parce que l’inquiétude le rongeait et parce qu’il ne voulait
surtout pas donner à penser à l’autre qu’il tergiversait, il avait opté pour la
seconde stratégie.
    — Vous êtes allé, il y a peu, signifier à une dame de
mes amies son temps de grâce, n’est-il pas ?
    — Madame de Souarcy ?
    Artus acquiesça d’un mouvement de tête. Il perçut le
flottement de l’inquisiteur. Nicolas maudissait cet abruti de Larnay qui lui
avait affirmé que le comte d’Authon n’interviendrait pas en faveur de la femme.
Le souvenir de la silhouette revêtue de bure sombre, de ses mots, de ses
promesses, s’imposa dans son esprit, et il s’apaisa aussitôt. Que pouvait un
comte, même ami du roi, contre tant de puissance ? Il répondit d’une voix
douce :
    — J’ignorais que madame de Souarcy fut de vos amies,
monsieur.
    Artus songea que si Agnès  – par l’intermédiaire de
Clément  – ne l’avait pas dessillé au sujet de Nicolas Florin, il aurait
probablement juré de l’innocence de celui-ci. Après tout, si le mal n’était pas
follement séduisant, il n’aurait pas tant d’adeptes.
    — Elle l’est. (Artus parut hésiter, puis reprit :)
Je ne doute pas, monsieur, que vous soyez homme de foi...
    Un battement de paupières lui répondit.
    — ... et de finesse. Les raisons de l’ire de monsieur
de Larnay contre sa demi-sœur ne sont pas de celles auquel un homme de piété et
d’honneur souhaiterait s’associer. Elles sont d’ordre personnel et... comment
dire, fort blâmables.
    — Que me dites-vous là ? s’offusqua Florin, qui se
distrayait de ses duperies.
    — Il vous aura tu cet aspect, et les véritables

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