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Les chevaliers de la table ronde

Les chevaliers de la table ronde

Titel: Les chevaliers de la table ronde Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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jeune
présomptueux ? lui demanda-t-il. – Présomptueux toi-même ! répliqua
Kilourh. Qui es-tu donc pour me parler sur ce ton ? – Je suis le portier d’Arthur,
et l’on me nomme Glewlwyt à la Forte Étreinte. Sache bien que nul ne peut
entrer dans ce logis sans ma permission. – Alors, dit le jeune homme, je te
demande cette permission. » Le portier se mit à rire et dit : « Cette
permission, je ne l’accorde qu’à ceux qui sont dignes d’entrer. Le roi Arthur
tient conseil et n’a besoin de personne. Sache, jeune présomptueux, que l’on ne
laisse entrer ici que les fils de roi d’un royaume reconnu ou l’artiste qui
apporte son art. Cela dit, tu seras le bienvenu dans la forteresse du roi
Arthur. On donnera à manger à tes chiens et à ton cheval. À toi, on offrira des
tranches de viandes cuites et poivrées, du vin en grande quantité afin de
satisfaire ta soif, et une musique agréable pour charmer tes oreilles pendant
ton séjour. On t’apportera la nourriture de trente hommes au logis des hôtes, là
où se restaurent les gens des pays lointains et ceux qui n’auront pas réussi à
se faire admettre parmi les familiers d’Arthur. Mais tu ne seras pas plus mal
là qu’avec Arthur lui-même, je te le garantis. On t’offrira une femme pour
coucher avec toi. Et demain, dans la matinée, lorsque la porte s’ouvrira devant
la compagnie qui est venue ici aujourd’hui, c’est devant toi le premier qu’elle
s’ouvrira, afin de t’honorer, et tu pourras choisir la place que tu voudras à
la cour d’Arthur, du haut en bas comme il te plaira [95] .
    — Je n’en ferai rien ! répliqua le jeune homme. Si
tu ouvres la porte, ce sera bien. Mais si tu ne l’ouvres pas, je ferai honte à
ton maître, je jetterai le discrédit sur toi et je pousserai trois cris tels qu’il
n’y en aura jamais eu de plus mortels de Tintagel au Château des Pucelles [96] .
Tout ce qu’il y a de femmes enceintes dans cette île avortera. Quant aux autres,
elles seront accablées d’un tel malaise que leur sein se retournera et qu’elles
ne concevront jamais plus [97]  ! » Glewlwyt à
la Forte Étreinte lui répondit : « Tu auras beau crier contre les
coutumes de la cour d’Arthur, on ne te laissera pas entrer avant que je ne sois
d’abord allé en parler avec Arthur lui-même ! »
    Glewlwyt se rendit dans la salle où se trouvait Arthur.
« Qu’y a-t-il de nouveau à la porte ? » lui demanda Arthur. Le
portier répondit : « J’ai passé les deux tiers de ma vie avec les
rois de ce pays. J’ai connu ton père Uther Pendragon, que j’ai servi fidèlement,
et je te sers aussi fidèlement ! J’ai été le témoin privilégié de tous les
événements qui se sont produits dans ce royaume ! J’ai participé aux plus
grandes assemblées de nobles et de guerriers qui se soient tenues dans cette
île ! Je t’ai accompagné dans toutes tes expéditions ! J’ai rencontré
des barons, des princes et des rois ! Mais, je t’assure, roi Arthur, je n’ai
jamais vu personne d’aussi noble et d’aussi hardi que celui qui est à la porte
en ce moment !
    — Eh bien ! répondit Arthur, si tu es venu au pas,
retourne en courant ! Que tous ceux qui voient la lumière, que tous ceux
qui ouvrent les yeux et les ferment, que tous ceux qui sont ici soient ses
serviteurs ! Que les uns lui servent le vin dans des cornes montées en or,
que les autres lui présentent des tranches de viandes cuites et poivrées, en
attendant qu’une nourriture digne de lui soit prête ! C’est pitié de
laisser dehors, sous le vent et la pluie, un homme comme celui dont tu parles. »
    Ainsi parla le roi Arthur. Glewlwyt se hâta de revenir à l’entrée
de la maison et ouvrit la porte au jeune homme. Quoiqu’il fût d’usage qu’on
descendît de cheval à l’entrée, sur le montoir de pierre, Kilourh ne mit pas
pied à terre : il fit avancer son cheval à l’intérieur de la forteresse
jusqu’à l’endroit où se tenait Arthur [98] . « Salut ! s’écria-t-il,
salut, chef suprême de cette île ! Salut aussi bien en haut qu’en bas de
cette maison, à tes nobles, à ta suite, à tes capitaines ! Que chacun
reçoive ce salut aussi complet que je l’ai adressé à toi-même ! Puissent
ta prospérité, ta gloire et ton honneur être au comble pour toute cette île de
Bretagne !
    — Salut à toi également ! répondit Arthur. Assieds-toi
entre deux de mes compagnons. On t’offrira les

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