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Les chevaliers du royaume

Les chevaliers du royaume

Titel: Les chevaliers du royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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que vous voudrez manger, l’on vous commandera d’aller où l’on voudra et vous ne saurez jamais où. »
    « Quelle ironie ! » songeait-il, un fin sourire aux lèvres. Et dire qu’autrefois il était le plus indiscipliné des cinq enfants de son père. Incapable de suivre la moindre leçon sans bayer aux corneilles, se moquant des précepteurs et filant courir la ribaude à la première occasion !
    Mais il avait jugé le Temple, où son frère Arnaud venait d’être reçu, digne de sa personne. Doté d’une discipline assez exigeante pour « mériter » de faire de lui un homme. Il avait voulu le plus difficile, il l’avait. Il forcerait son corps, il contraindrait sa tête, il obligerait son cœur, il éduquerait son âme à se soumettre et à servir Dieu. Il répéterait à longueur de journée avec ses frères templiers : Non nobis Domine, non nobis sed nomini Tuo da gloriam ! – « Non pour nous, Seigneur, non pour nous, mais pour Ton nom, donne la gloire ! »
    S’il était, lui, le plus jeune des cinq fils du comte Étienne de Roquefeuille, capable de se plier à une règle voulue par Dieu et appliquée par les hommes, alors tous le pouvaient. D’abord sa famille, ensuite ses proches. Puis les Mahométans et les Juifs, qu’il convertirait de force ou détruirait sans pitié, et enfin tous les autres chrétiens, melkites, jacobites, coptes, nestoriens, maronites… qui vivaient loin de la loi de Rome.
    Redouter Dieu ne suffisait pas. Il fallait craindre Rome, la supérieure, la grande. La terrible Rome.
    Elle seule était capable d’imposer au monde d’être sauvé par Dieu, le Christ et le Saint-Esprit. Elle seule avait suffisamment de force pour manier ces deux puissants glaives : le Temple et l’Hôpital. Simon ne comprenait pas pourquoi Rome avait décidé de n’en garder qu’un, mais il s’était juré : « Je serai de celui-ci. Je le serai pour Dieu, je le serai pour mon père. »
    Et, tandis qu’il montait la garde en haut du donjon de La Fève, il se gonflait d’orgueil et ressentait un plaisir inouï en repensant à son parcours et à la discipline de fer qu’il s’était imposée. Peu d’hommes avaient fait ce qu’il avait fait ! Il était entré dans l’ordre du Temple avec la ferme intention de devenir le plus humble et le meilleur des Templiers. Rien de ce à quoi on le soumettait n’était assez dur pour lui. Une chose pourtant lui était insupportable : attendre ! D’abord un an dans le diocèse de Troyes, à la commanderie de Bonlieu, puis deux années supplémentaires dans celle de Coulommiers-en-Brie, quand il fut fait chevalier.
    Sa chance était venue avec le désastre de Hattin. La Terre de promission manquait de chevaliers au bras fougueux, impatients d’en découdre avec les Sarrasins. Oh, comme son cœur avait bondi quand il avait appris qu’on l’envoyait enfin « là-bas » ! Dans cette terre dont il n’osait plus prononcer le nom par crainte de ne pas être digne de la fouler. « Ô Dieu en moi ! Je dois être fort. Gloria, laus et honor Deo in excelsis !  » disait-il en tremblant tant l’excitation le tenait, tant sa joie était grande d’aller enfin combattre en Terre absolue.
    Certainement, l’heure du martyre n’était pas loin. Son écuyer et lui devaient s’y préparer.
    Une huissière du Temple avait quitté Marseille en les emmenant dans son gros ventre vert et les avait débarqués en compagnie d’autres frères, chevaliers, sergents et écuyers, à Tripoli. Simon s’y distingua dès le premier jour en s’écriant, sitôt à terre : « Nous sommes là pour te servir, ô Seigneur ! » De la commanderie de la ville, où il ne resta pas longtemps parce que ses remarques incantatoires en irritaient plus d’un, on l’envoya à la puissante forteresse de Tortose, puis, de là, à Chastel Blanc. Il y passait ses journées, seul au sommet de la plus haute des tours, à guetter les messages envoyés – à l’aide d’un jeu complexe de miroirs – par les Hospitaliers du krak des Chevaliers, distant de seulement sept lieues.
    « Qu’attendons-nous pour attaquer ? » se lamentait-il à longueur de journée. On parlait de violents combats à Acre, où depuis la fin du mois d’août les chrétiens tentaient de reprendre aux infidèles la ville perdue au début de juillet. Simon ne comprenait pas pourquoi on en faisait une telle affaire. Il ne comprenait pas non plus pourquoi l’on essayait de reprendre Acre

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