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Les chevaliers du royaume

Les chevaliers du royaume

Titel: Les chevaliers du royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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de noir : l’envoyé du pape, Wash el-Rafid, un ismaïlien soi-disant converti au christianisme. En fait, Rawdân était l’un des rares à voir clair dans son jeu : ce chien galeux ne faisait que se fier aux recommandations de la taqiyya  ; principe de la dissimulation qui autorisait dans certaines conditions (notamment de faiblesse ou d’infériorité) les Mahométans à abandonner pour un temps les devoirs de leur culte et à simuler une foi qui n’était pas la leur, afin d’abuser leurs ennemis. Parfois ce temps pouvait durer toute une vie ; les légendes chiites étaient pleines de ces héros qui se sacrifiaient en endossant les us et coutumes de leurs pires adversaires pour mieux les frapper le moment venu, une fois leur méfiance endormie.
    — C’est un beau cadeau que t’a fait notre maître (la paix soit sur lui), dit Wash el-Rafid en référence aux éléphants de Sinan entravés dehors.
    — Sur lui soit la paix, répondit Rawdân ibn Sultân. Je n’en ai jamais reçu d’aussi beau.
    — Tu n’en as jamais fait non plus…, ironisa le Batini.
    Rawdân le regarda avec défiance, se demandant ce que cachait cette phrase – cette injure, en vérité. Après tout, ces éléphants, il les avait mérités : ses hommes et lui avaient couru de gros risques pour capturer Cassiopée.
    — Qu’attendez-vous de moi ? demanda Rawdân, méfiant.
    — Sinan a décidé de t’offrir un nouveau présent en t’autorisant à le remercier.
    — C’est trop de grâce, siffla Rawdân ibn Sultân, de plus en plus sur ses gardes. Tu diras à ton maître qu’il m’accable de sa bonté. Je ne sais si j’en suis digne.
    — Tu l’es, l’assura el-Rafid. Tu vas d’ailleurs pouvoir le lui prouver. Si tu sais te montrer à la hauteur de ses bienfaits, dix autres éléphants, chargés d’or et de pierres précieuses, te seront envoyés. Sinon, ils le seront à tes ennemis, aux Zakrad ou aux Muhalliq…
    — Et pourquoi le seraient-ils ?
    — Pour te motiver, répondit el-Rafid en commençant à peler une orange avec son couteau.
    Rawdân pesta intérieurement. Sinan ne lui faisait pas confiance ! Il agissait avec lui comme avec les autres : il cherchait à le contraindre tel un vil mercenaire (ce qu’il était, au fond) ; le menaçant de le faire exterminer par ses ennemis s’il ne lui obéissait pas. Alors qu’une simple demande de la part de Sinan eût été pour Rawdân une telle marque d’honneur qu’il eût volontiers donné sa vie pour lui. Ou en tout cas, la vie des siens.
    — Tu sais que je ferais l’impossible pour Sinan, susurra Rawdân sur un ton mielleux. Dis-moi ce qui ferait plaisir à mon maître, que j’aie l’indicible honneur de le satisfaire.
    — Cassiopée s’est enfuie. Sinan (la paix soit sur lui) aimerait que tu la récupères. Cette fois, tu n’auras pas le droit d’y toucher et tu devras me la remettre aussi vite que possible, intacte. Sinon, je te noierai personnellement dans les excréments de tes éléphants. Enfin, nous avons eu l’infortune d’apprendre que nous avons été dupés par ces mécréants de Taqi ad-Din et de Saladin (que leurs cadavres alimentent les feux de l’enfer). La croix dont nous nous sommes emparés n’était pas la vraie. Pour cela, ils paieront. Je veux que tu les massacres ! Je veux que tes éléphants aplatissent leurs corps, qu’ils les réduisent à l’état de draps où je me glisserai le soir pour dormir.
    Il jeta ses pelures dans une coupelle dorée, et mordit son orange à belles dents.
    Rawdân trouvait le projet audacieux ; il fut séduit.
    Finalement, bien que rebuté par les méthodes quelque peu expéditives de Sinan, il accepta de bon cœur. Il se disait qu’il y aurait là matière à se divertir et à s’enrichir. Le maître apprendrait à l’estimer, ou alors… il apprendrait lui aussi, à ses dépens, ce que signifiait la colère d’un Maraykhât.
    Quand Wash el-Rafid lui dit où il devait se rendre, Rawdân éclata de rire et fonça hors de sa tente pour donner l’ordre à ses troupes de se mettre en route : il n’y avait pas un instant à perdre ! Ils attaquaient l’oasis des Amazones ! Oh, comme il allait leur faire payer, à ces chiennes, les hommes qu’elles lui avaient pris avant de les relâcher, châtrés, dans le désert, où les siens les retrouvaient. Parfois. À moitié déshydratés et complètement fous.
    *
    Deux jours plus tard, les Maraykhât attaquèrent l’oasis.
    Les

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