Les compagnons de la branche rouge
la femme qui est chef de famille et qui prend les décisions
nécessaires. Or, dans la société irlandaise marquée par les tendances
patriarcales indo-européennes, il est insupportable pour des guerriers d’être
considérés comme « bien de femme ». Ce point de droit coutumier, d’où
résulte une querelle d’autorité entre le roi Ailill et la reine Maeve, est à
l’origine de la grande épopée dite « Razzia des bœufs de Cualngé ».
[46] En fait, étant donné que la fonction primordiale du roi de type celtique est
d’être distributeur, c’est-à-dire répartiteur des richesses de la tribu, il
faut constater que, par suite de la ruse de Ness, distribuant largement le
patrimoine royal au nom de son fils Conor, le malheureux Fergus n’a plus rien à
donner. Il se retrouve incapable d’assurer la prospérité de son peuple dès lors
qu’il a perdu le pouvoir du don , infirmité aussi
rédhibitoire pour un roi qu’une impossibilité physique. Il est donc obligé de
céder la place à quelqu’un en mesure de donner , en
l’occurrence Conor, dût l’exercice de cette fonction ressortir à l’usurpation
par la ruse. Fergus se trouve ici dans la même posture que les derniers
Mérovingiens, taxés stupidement par les manuels scolaires de « fainéantise »:
de fait, n’ayant plus rien à distribuer, ils furent supplantés par ceux qui
pouvaient le faire, à savoir les maires du palais carolingiens. L’histoire est
singulièrement conforme non seulement au mythe mais à l’idéologie primitive qui
veut que le roi soit au service de ses sujets, non l’inverse, comme cela s’est
produit au XVII e siècle en France avec la
monarchie de droit divin codifiée par l’évêque Bossuet à propos de
Louis XIV, aberration qui a conduit à la Révolution.
[47] D’après la Compert Conchobuir , version du Livre de Leinster .
[48] Tertre d ’Angus, « jeune fils » de Dagda. C’est le cairn de
Brug-na-Boyne, autrement dit Newgrange.
[49] Cette colline servait de lieu de rencontre aux trois rois Mac Cuill, Mac Cecht
et Mac Greine, des tribus de la déesse Dana, qui se partageaient le pouvoir sur
l’Irlande avant l’arrivée des Gaëls. Voir la première époque, Les
Conquérants de l’Île Verte .
[50] Dundalk, dans le comté de Louth, près de l’actuelle frontière de l’Ulster.
[51] Colline sacrée qui se trouve dans l’actuel comté de Westmeath.
[52] Il s’agit du tertre mégalithique de Knowth qui, non loin de Newgrange, domine
la Boyne.
[53] La Blackwater, qui passe non loin d’Émain Macha (et d’Armagh) et se jette dans
le Lough Neagh.
[54] D’après le Cogadh Ferghusa agus Chonchubair , récit
contenu dans le mss. 23 K 37 de la Royal Academy de Dublin,
publié avec trad, française par Margaret Dobbs, Revue celtique ,
XXXI.
[55] Il s’agit là de ce qu’on appelle « droit de cuissage » sans en
comprendre la signification réelle : dans les sociétés anciennes, le fait
de répandre le sang virginal est un acte magique susceptible de conséquences
néfastes pour celui qui accomplit la défloraison ; aussi est-ce le roi (ou
le druide, ou le prêtre) qui, la plupart du temps de manière symbolique, assume
la charge magique négative dont sa puissance et sa fonction lui permettent
d’éliminer les miasmes désastreux. De plus, tout enfant des Ulates peut ainsi
se prétendre fils ou fille de roi, d’un point de vue symbolique, bien entendu,
quand n’intervient pas de fécondation réelle.
[56] En principe, le roi de type celtique ne combat pas en personne, mais sa
présence est indispensable sur le champ de bataille pour remporter la victoire.
Conor est l’exemple même du roi pacifique, équilibrateur de son peuple et
distributeur intègre des richesses communes. En ce sens, il est l’antithèse de
Fergus, roi violent qu’anime la fureur guerrière. Voilà pourquoi les Ulates le
préfèrent à ce dernier, qu’ils sont du reste fort aises de récupérer dans leurs
rangs.
[57] La plus importante du calendrier celtique. Elle a lieu vers le 1 er novembre,
date symbolique de la « fin de l’été » (c’est le sens de Samain ) et du début des « mois noirs »,
c’est-à-dire de l’hiver.
[58] D’après la Comperi Conchobuir , version du Livre de Leinster .
[59] L’hospitalier exerçait la fonction officielle de recevoir, de nourrir et
d’abreuver les hôtes du roi dans sa propre demeure.
[60] Cette remarque, qui ne se trouve que dans la
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