Les compagnons de la branche rouge
avait choisi
parce que la Pierre de Fâl avait crié lorsqu’il s’en était approché [37] .
Et il était parti à travers l’Irlande pour accomplir sa tournée royale auprès
des rois de provinces et des chefs de tribus. Mais, profitant de son absence, un
grand guerrier du nom d’Éochaid Feidlech [38] assembla une grande
armée et marcha sur Tara. La Pierre de Fâl cria sous lui, il fut reconnu comme
roi suprême par toutes les troupes qui l’escortaient, et tous ceux qui
refusaient de lui rendre hommage et de lui payer le tribut qu’ils devaient
étaient mis à mort. De telle sorte qu’il se commit beaucoup de carnages et
retentit beaucoup de tumultes dans toute l’île.
Fachtna Fathach se trouvait en visite à Émain Macha quand on
apprit la nouvelle de la prise de Tara par Éochaid Feidlech. Sur les Ulates
régnait alors Fergus, fils de Roeg [39] encore qu’il ne fût roi que d’une partie de l’Ulster, l’autre relevant de
Conall Cernach [40] et de plusieurs autres. Mais, comme il était le plus puissant d’entre eux, la
primauté sur les Ulates lui était échue.
Or donc, des messagers venus à Émain Macha racontèrent à
Fachtna Fathach de quelle manière Éochaid Feidlech avait pris le pouvoir et
fait tuer les rois qui refusaient de le reconnaître pour suzerain. Ils
ajoutèrent que l’usurpateur avait entrepris sa tournée royale à travers l’Irlande,
et qu’il se trouvait actuellement dans la province de Connaught. Aussitôt, Fachtna
Fathach demanda aux Ulates de tenir une assemblée. Et quand ils furent réunis à
Émain Macha, il prit la parole en ces termes :
« Les hommes de toutes les provinces d’Irlande ont fait
de moi leur roi suprême à Tara, et j’ai toujours agi, comme je le devais, pour
le bien de tous. Or, voici que, non content de se dresser contre moi et de se
prétendre maître de Tara, un individu a fait périr bon nombre de rois et de
nobles qui récusaient sa violence. Allez-vous, ô Ulates, supporter plus
longtemps qu’un meurtrier règne sur toute l’Irlande, au mépris de toute justice ?
– Certes, non, répondirent les Ulates. Tu es des nôtres, Fachtna Fathach, et
nous t’avons tous choisi pour notre roi suprême. Il ne serait pas convenable
que nous laissions impuni le crime que vient de commettre Éochaid Feidlech. Nous
sommes les plus valeureux de tous les Gaëls, les plus dignes descendants des
fils de Milé. Nous ne faillirons pas à notre devoir et au respect que nous
devons à nos ancêtres. Nous irons attaquer Éochaid Feidlech afin de venger l’affront
qu’il a osé nous infliger. Puisque Éochaid se trouve dans la province de
Connaught, allons-y nous-mêmes et combattons-le, ainsi que ses complices. »
Sur ce, le roi suprême d’Irlande et les Ulates levèrent une
immense armée qui comportait sept bataillons d’égale force de vrais Ulates, trois
bataillons d’étrangers et mille gardes au service de Fachtna Fathach. Et, une
fois tous rassemblés, ils quittèrent la forteresse d’Émain Macha et, se
dirigeant vers l’ouest, établirent leur camp sur les limites de la province de
Connaught. Puis ils tinrent conseil entre eux pour déterminer la meilleure
façon d’attaquer l’ennemi.
« Je vois un nuage au-dessus de vous, dit alors le
druide Cavad, et ce nuage forme un voile qui vous enveloppe, tel un brouillard
où vous risquez de vous égarer. Je ne saurais dès lors vous conseiller qu’une
chose, c’est d’envoyer des messagers auprès d’Éochaid afin de lui proposer le partage
de l’Irlande. Qu’il garde le Connaught pour lui mais te laisse à toi, Fachtna
Fathach, la royauté suprême. – Cavad a prononcé de sages paroles, dirent les
Ulates. – Je ne suis pas de cet avis ! s’écria Fachtna Fathach. Par le
dieu que jure ma tribu, je jure que je ne donnerai jamais ce que mes ancêtres n’ont
jamais accepté de livrer ! Je refuse tout partage de l’Irlande avec d’autres
que de notre sang. Sans quoi je commettrais une grande injustice qui
entraînerait le déshonneur de tous. – Ce serait en effet grand dommage, ô roi
suprême, admirent les Ulates. Et quand bien même les hommes du monde entier se
précipiteraient contre toi, il nous incomberait de te protéger. Aussi ne
manquerons-nous pas de t’assister dans ta lutte contre l’usurpateur. Car cet
homme a tué bon nombre de rois et de chefs qui étaient de notre sang, et nous
ne pouvons mieux agir que de les venger. »
Là-dessus, ils se levèrent et
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