Les compagnons de la branche rouge
Maga, avait utilisé la balle de
fronde qu’il avait façonnée avec la cervelle de Mesgegra ,
Conall Cernach entra dans une grande colère qui le résolut à venger le roi et à
tuer Cêt, contre lequel il nourrissait un grand ressentiment depuis que
celui-ci l’avait, à peine né, piétiné. Et il se lança aux trousses du fils de
Maga pour le défier en combat singulier.
Il venait de neiger. Ainsi fut-il facile à Conall de suivre
les traces du char et des chevaux de Cêt. Il parvint ainsi à Brefné, en
Connaught, où Cêt se reposait dans une maison abandonnée, tandis que son cocher
s’affairait à cuire la nourriture. Tant et si bien que ni l’un ni l’autre ne s’aperçurent
de la présence de leur poursuivant.
« Certes, dit Conall, je sais que Cêt se trouve là, entièrement
à ma merci. Mais je ne puis le tuer durant son sommeil. Or, si je le réveille, je
connais sa fourberie, il est capable de me réserver quelque mauvais coup. Et, vu
sa sauvagerie, il n’est pas homme à épargner aucun de ses adversaires… – Malheur !
s’écria le cocher. Honte sur toi, Conall Cernach ! Serais-tu devenu plus
lâche qu’un lièvre ? Les paroles que tu viens de prononcer sont mauvaises.
Tu te trouves devant le fléau qui ravage toute la province d’Ulster, et tu
hésites à le combattre ? Serait-il donc honteux d’engager le combat contre
lui ? – Mon garçon, répondit Conall, le moment ne me paraît pas favorable
pour l’attaquer, voilà tout. Mais, pour lui signifier que j’étais prêt à l’affronter,
je laisserai des traces si claires qu’il ne pourra méconnaître ma présence ici. »
Là-dessus, Conall arracha une touffe de la crinière de
chacun des chevaux de Cêt et, prélevant une motte de terre, la plaça à l’avant
du char. Puis, il s’en retourna vers l’est, en direction de l’Ulster.
Quand le cocher de Cêt sortit de la maison, il remarqua
sur-le-champ qu’il manquait une touffe de crin à chacun des chevaux et que l’on
avait déposé une motte de terre à l’avant du char. Aussi retourna-t-il bien
vite auprès de Cêt et le réveilla-t-il.
« Malheur ! s’écria-t-il. Conall Cernach est venu,
et il a laissé ces marques pour nous prouver sa présence en ces lieux. – Le
grand malheur que c’est là, mon garçon ! répliqua Cêt. Il aurait pu tuer
les chevaux, il les a épargnés, et c’est bien. S’il a fait cela, c’est
peut-être qu’il recherche mon amitié. – Honte sur toi ! repartit le cocher.
As-tu donc oublié que Conall Cernach a tué presque autant d’hommes de Connaught
que toi-même d’hommes de son peuple ? Maudit seras-tu si tu n’engages le
combat contre lui afin de le tuer, car la honte en retombera sur toi jusqu’à la
fin des temps ! – Tu as raison, dit Cêt. Je serais déshonoré si je ne le
provoquais avant que la journée ne soit terminée. »
Ils attelèrent les chevaux, s’élancèrent sur les traces de
Conall Cernach et le rejoignirent à un endroit qu’on appelle maintenant le Gué
de Cêt.
« À nous deux, Conall ! s’écria Cêt. – Qu’y a-t-il
donc, ô Cêt, fils de Maga ? répliqua Conall. – Tu ne pourras échapper à
ton sort, homme maudit. Honte sur toi si tu refuses de me combattre ! – Puisque
tu le veux, qu’il en soit ainsi ! »
Ils s’affrontèrent tous deux sur le gué, se frappant l’un l’autre
avec tant de rage que leurs cris, leurs souffles, le hennissement des chevaux
et les injures de leurs cochers qui les excitaient au combat s’entendaient par
tout le pays. Enfin, le soir venu, tous deux s’effondrèrent. Cêt était mort, et
Conall gisait évanoui, tant ses innombrables blessures l’avaient vidé de son
sang.
Quand il eut repris conscience, il tenta bien de se soulever,
mais en vain, car il était à bout de forces.
« Mon garçon, dit-il à son cocher, porte-moi jusqu’au
char. »
Le cocher le prit par les épaules, mais il ne parvint pas
même à le traîner sur le sol jusqu’au char.
« Écoute, mon garçon, reprit Conall. Laisse-moi ici, prends
les chevaux et va rejoindre les Ulates. Tu leur raconteras ce qui s’est passé
et tu leur demanderas de venir avant que surviennent les gens de Connaught. »
Le cocher bondit sur le char, dit au revoir à Conall et
partit en hâte vers l’est alerter la troupe des Ulates. Mais, peu après, survint
Belchu, de Brefné, un homme de Connaught, qui, en voyant les deux hommes
étendus au sol, demeura
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