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Les compagnons de la branche rouge

Les compagnons de la branche rouge

Titel: Les compagnons de la branche rouge Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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inviter ! »
grommela Conor.
    Et il envoya Broth, l’un de ses guerriers, en éclaireur dans
la maison. Broth s’avançait au milieu de la salle quand un druide qui se
trouvait là poussa un cri de lamentation en l’apercevant. Puis il chanta un
chant que tous entendirent :
     
    À qui la coupe d’hydromel ?
    Bientôt, elle sera dans la main d’un étranger…
    Des troupes seront provoquées,
    des héros périront,
    des maisons seront détruites,
    des batailles feront rage,
    des prouesses seront accomplies,
    cela sera comme j’ai dit…
     
    Or, comme, au même moment, Gerg tenait à la main une coupe d’hydromel,
Broth brandit son épée et, sans que quiconque pût s’interposer, la lui passa au
travers du corps. Gerg s’effondra en lâchant la coupe que Broth ramassa
aussitôt, avant de l’élever au-dessus de sa tête.
    « Broth a la coupe ! s’écria Conor. Jeunes gens, secouez
votre torpeur et entrez dans la maison. »
    Alors, trente d’entre eux se ruèrent dans la salle et s’y
battirent si furieusement qu’en un rien de temps ils eurent tranché les têtes
de Mani Morgor, fils d’Ailill, et de cent guerriers qui banquetaient là. Puis
leurs compagnons entrèrent à leur tour et, après avoir chassé les gens de Gerg
et ceux de Connaught, ils s’assirent et festoyèrent durant trois jours et trois
nuits.
    Cependant, une femme avait pu s’échapper de la forteresse et
elle se rendit en toute hâte à Cruachan, où elle se présenta devant Ailill et
Maeve.
    « Ton fils a été tué à Glen Geirg, dit-elle à Maeve. – Qui
l’a tué ? demanda celle-ci. – Couhoulinn. Il est venu avec Conor et les
Ulates, et ils ont pris la forteresse. »
    Maeve saisit aussitôt ses armes et rassembla six cents de
ses plus jeunes guerriers, non sans leur adjoindre Fergus, fils de Roeg, et les
exilés d’Ulster. Et, tous ensemble, ils s’élancèrent vers Glen Geirg et, parvenus
là, attaquèrent les Ulates avec tant de rage et de frénésie que Maeve en tua
seize de sa propre main. Cependant, si cent hommes d’Ulster succombèrent ce
jour-là, le Connaught pleura quatre cents des siens, et Maeve dut enfin s’enfuir
avec Fergus et les exilés d’Ulster, laissant la forteresse aux mains de Conor
et de ses gens [144] .
    Alors, le roi, hanté par le songe au cours duquel la femme
aux cheveux blonds lui avait révélé l’existence du chaudron inépuisable, obligea
Buan, veuve de Gerg, à lui dire où se dressait la forteresse dans laquelle Ferb
le gardait. Et, une fois qu’elle lui eut indiqué le chemin, il prit la route
avec ses Ulates.
    Ils arrivèrent bientôt sur le rivage et virent, à peu de
distance, une île rocheuse que surmontait une forteresse à l’aspect des plus
redoutables : quatre murailles la ceignaient, dans lesquelles ne se
discernait nulle porte. Et, de plus, il était très difficile d’y aborder, tant
étaient violents, dans le détroit, les courants de la mer.
    « Qu’on construise des barques, ordonna Conor. Il nous
faut coûte que coûte atteindre cette île et nous emparer de la fille et du
chaudron. »
    Ils se mirent aussitôt à l’ouvrage et bientôt eurent assez
de bateaux pour transporter une cinquantaine d’hommes que Couhoulinn se chargea
de conduire, après avoir choisi ceux qui lui paraissaient les plus robustes. Or,
parmi ceux qui embarquèrent, se trouvait un homme revêtu d’un grand manteau
gris dont nul ne savait le nom et qu’on appelait en conséquence l’Homme au
grand Manteau gris. C’était en effet à leur insu que Cûroi mac Daeré, roi du
sud Munster, s’était glissé dans leurs rangs [145] , avec le secret espoir
d’être le bénéficiaire de l’expédition. Venu à Glen Geirg en compagnie de Maeve,
il l’avait laissée s’enfuir seule et s’était dissimulé dans un coin de la
forteresse pour attendre une occasion favorable.
    Or, après avoir réussi à atteindre le rivage opposé, les
Ulates s’aperçurent qu’une palissade en fer surmontait la première muraille, et
que des têtes humaines s’y trouvaient fichées. Faisant alors le tour de l’île, ils
découvrirent une porte entièrement bardée de fer. Mais Couhoulinn y donna un si
violent coup de pied qu’il la disloqua, permettant à ses hommes d’entrer et de
découvrir la deuxième enceinte : celle-ci était protégée par une fosse
très profonde où grouillaient de hideux serpents [146] .
    « Que faire, ô Couhoulinn ? » demandèrent les
Ulates.
    Sans se

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