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Les Conjurés De Pierre

Les Conjurés De Pierre

Titel: Les Conjurés De Pierre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philipp Vandenberg
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rage, prenant des allures de descente aux enfers. Les détonations faisaient trembler l’air saturé par les odeurs de poudre et de fer rougi. Les tireurs au mousquet et les arquebusiers poussaient des cris à chacun de leurs tirs. Eussent-ils été touchés eux-mêmes par un projectile qu’ils n’en eurent pas moins hurlé sauvagement. Terrorisée, Afra se bouchait les oreilles avec les doigts.
    Tout à coup, les tirs s’interrompirent et la vigie annonça :
    — Changement de bord du navire ennemi !
    — Canon trois et quatre, feu ! hurla le capitaine.
    Les canonniers allumèrent les mèches.
    Les pirates avaient attendu d’être suffisamment près pour être sûr d’avoir le galion à portée de tir. Ils attaquaient. Les flèches se mirent à pleuvoir comme une nuée de sauterelles sur les canonniers. Un premier artilleur tomba en poussant un cri. À l’instant même, le troisième et le quatrième canon faisaient feu. À travers la fumée opaque, on entendit un craquement sinistre suivi de nombreux appels à l’aide des blessés.
    — Touché ! cria la vigie du haut du mât.
    Les flèches des pirates continuaient de s’abattre sur l’ Ambrosia .
    Lorsque la fumée se fut dissipée, les canonniers purent constater de visu leur succès. Le mât du navire pirate s’était abattu, brisé en deux par un tir.
    On eût dit le tronc d’un arbre amputé par une violente bourrasque. Quelques corps flottaient dans d’étranges positions à la surface des eaux jonchées de planches et de poutres. Mais les pirates ne s’avouèrent pas vaincus pour autant.
    Cachés derrière les flancs du navire, les rameurs ramaient comme des forcenés. Le navire pirate s’approchait toujours plus menaçant. Sa stratégie paraissait évidente. Les pirates préparaient l’abordage de l’ Ambrosia convaincus qu’ils étaient de l’emporter dans un combat au corps à corps. Or c’était précisément ce qu’il fallait éviter.
    Tandis que le capitaine encourageait les arquebusiers à recharger leurs armes et que les tireurs pointaient leurs grands mousquets au tir précis sur l’ennemi, les premières flèches incendiaires des pirates atteignaient le pont. Leurs redoutables pointes garnies de tissu trempé dans de la poix enflammée se fichaient déjà dans les flancs et dans les constructions supérieures du galion. Parallèlement, sur l’ Ambrosia , des tireurs d’élite bien dissimulés pointaient leurs armes avec précision sur l’ennemi.
    Afra, assise sur ses jambes repliées, le menton calé sur ses genoux, n’avait pas bougé de place ; elle observait fascinée, sans s’affoler, le combat.
    Comment aurait-elle pu avoir peur après avoir survécu à la peste ? Une petite voix dans son for intérieur lui disait qu’elle sortirait une fois de plus indemne de cette nouvelle épreuve.
    Les arquebusiers ne cessaient de tirer. Aveuglée par la fumée et abasourdie par les détonations, Afra n’avait pas vu la flèche enflammée qui venait de pénétrer par une fenêtre dans le gaillard d’arrière. Le feu avait pris dans une cabine. Une fumée noire s’échappait d’un hublot. Elle vit bientôt la porte s’ouvrir et le plénipotentiaire en sortir. Paolo Carriera, hébété, se cramponna à la porte avant de s’effondrer, inconscient, sur le sol. En tombant, il avait refermé la porte.
    Où était Lucrezia ?
    L’épouse du plénipotentiaire devait être restée dans la cabine. Afra le savait. Elle devait aller la sauver. Mais à ce moment-là, il aurait été très risqué de traverser le pont, elle aurait offert aux pirates une cible facile. Donna Lucrezia ne lui avait certes pas témoigné beaucoup de sympathie, mais était-ce une raison suffisante pour abandonner quelqu’un à une mort certaine ?
    Afra tergiversait ; son cœur battait à tout rompre. Le démon et l’ange s’affrontaient. Tandis que le mal semblait vouloir terrasser le bien, le plénipotentiaire recouvrait ses esprits pour un bref instant.
    Elle le vit se traîner par terre à quatre pattes pour se mettre à l’abri des flèches meurtrières. Aurait-il complètement oublié Lucrezia dans la cabine ?
    La fumée sortant par la fenêtre s’épaississait. Soudain, la porte s’ouvrit et donna Lucrezia surgit dans l’embrasure. Bien qu’elle portât elle aussi des vêtements d’homme et un bonnet, Afra la reconnut aussitôt. Elle toussait, à moitié asphyxiée, la bouche ouverte comme un poisson rejeté sur la grève. Usant de

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