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Les Conjurés De Pierre

Les Conjurés De Pierre

Titel: Les Conjurés De Pierre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philipp Vandenberg
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Dieu, qu’irais-je faire dans cette ville qui n’abrite que des marauds et des coupe-jarrets !
    — Te serait-il arrivé de malheureuses aventures ?
    — Vous pouvez le dire, messire, la ville d’Ulm fait payer un octroi établi en fonction de la valeur de la marchandise transportée. Une voiture transportant des matériaux de construction paie deux fois moins qu’une transportant de la vaisselle d’argent. Or ces voitures déforment beaucoup plus les chaussées que mon attelage léger avec sa vaisselle qui ne pèse rien. De fieffés voleurs ! Mais vous savez, plus on a d’argent plus on en veut.
    Il chargea les gros bagages et les balluchons et expliqua l’itinéraire qu’il comptait prendre.
    — Nous allons traverser le fleuve à deux lieux d’ici, puis nous prendrons la direction de l’ouest à travers la forêt du Danube et nous laisserons Ulm au sud. La saison est propice pour franchir les montagnes. Nous avons eu les premières gelées cette nuit, les chemins sont plus stables et plus carrossables. Allons-y !
    Ulrich aida Afra à se hisser sur la charrette où ils s’installèrent sur un banc confortable, derrière le charretier et son valet. Alpert fit cingler son fouet au-dessus des chevaux et les puissantes bêtes de trait à l’abondante crinière brune, s’ébranlèrent.
    Jamais Afra n’avait voyagé aussi rapidement et surtout aussi confortablement. Dans la forêt bordant les rives du Danube, les arbres défilaient à toute vitesse, presque couchés à l’horizontale comme des herbes que le vent balaie. Plus tard, quand ils eurent laissé Ulm derrière eux dans les environs de Blaustein, le chemin longea la Blau. À mesure qu’ils progressaient vers l’ouest, la rivière décrivait tant de courbes sinueuses qu’ils en perdaient tous sens de l’orientation. Le charretier et son valet s’avérèrent d’agréables compagnons de voyage, ayant toujours une anecdote cocasse à raconter au détour d’un chemin ou d’un lieu.
    Un brouillard humide enveloppait maintenant le paysage. Les jours courts en cette saison n’avaient pas le temps de réchauffer l’atmosphère.
    Afra frissonnait sous la couverture qu’Ulrich avait jetée sur ses épaules.
    — Voulez-vous faire halte ou continuer ? La nuit tombe vite en ce moment, demanda le charretier.
    — Oui, et de plus nous sommes morts de faim ! Nous n’avons quasiment rien mangé de la journée, répondit Ulrich.
    Alors le charretier prit son fouet à l’envers et pointa le manche vers les hauteurs en face d’eux :
    — Vous voyez les chênes là-haut sur la colline ? À cet endroit, il y a une bifurcation. Si on prend à droite, on se dirige vers Wiesensteig et à gauche, vers Heroldsbronn qui n’est situé qu’à deux lieux. Nous y trouverons une auberge qui n’attend que nous et une écurie pour les chevaux, cela devrait vous plaire.
    Durant le trajet Afra et Ulrich avaient peu bavardé ensemble. Non qu’il y eût une tension quelconque entre eux, ils étaient simplement exténués. S’ajoutait à leur fatigue le bruit de la voiture sur les chemins cahotants. Ils somnolaient comme s’ils avaient bu du jus de pavot. Ils réfléchissaient chacun de leur côté. Afra était perturbée par tous ces événements récents. La nuit précédente, elle avait cru à plusieurs reprises frôler la mort ; vingt-quatre heures plus tard, elle partait avec Ulrich pour une vie nouvelle. Qu’allait-il se passer à Strasbourg ?
    Ulrich était préoccupé lui aussi par les péripéties de ces derniers jours. La mort subite de Griseldis l’avait plus affecté qu’il ne le pensait. Et le brusque revirement de l’opinion à son sujet l’avait cruellement meurtri. Il était loin d’imaginer qu’une ville comme Ulm, qui lui devait tant, le jette au cachot.
    Il était, dans son for intérieur, partagé entre la colère et la tristesse. Au fur et à mesure qu’il s’éloignait d’Ulm, sa colère ne faisait que croître. Il projetait d’élever à Strasbourg la tour la plus haute de la chrétienté – au grand dam des bourgeois d’Ulm.
    — Heroldsbronn !
    Le charretier fit claquer son fouet à plusieurs reprises pour encourager ses chevaux à faire un dernier effort.
    La bourgade était adossée frileusement à une colline couronnée de pics rocheux formant comme une crête rosée. Dépourvues de fortifications, les maisons se serraient les unes contre les autres, sans ouverture sur l’extérieur, constituant une sorte de

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