Les conquérants de l'île verte
deuxième à Brennos et Cichorios, le troisième à
Bolgios. Ce dernier partit sur-le-champ guerroyer contre les Macédoniens.
Les Gaulois avaient un équipement qui étonnait les peuples
chez lesquels ils passaient. Ils usaient en effet, pour armes défensives, de
boucliers aussi hauts qu’eux et que chacun d’eux ornait à sa guise. Comme ces
boucliers servaient non seulement de protection mais d’ornement, certains y
avaient fait graver des figures de bronze en ronde-bosse, travaillées avec
beaucoup de raffinement. Leurs casques de bronze étaient munis d’éléments
saillants qui donnaient à leurs porteurs un aspect fantastique. À quelques-uns
de ces casques étaient fixées des cornes, à d’autres, des effigies en relief
d’oiseaux ou d’animaux de toutes sortes. Enfin, ces guerriers soufflaient dans
des trompes barbares dont la facture particulière rendait un son rauque qui
augmentait le tumulte à l’heure des combats.
Le nom, l’aspect et la réputation de ces peuples étaient si
redoutés qu’on vit jusqu’à des rois qu’ils n’attaquaient pas venir les trouver
pour leur acheter la paix à prix d’or. Seul, Ptolémée, roi de Macédoine, apprit
sans effroi leur arrivée. Agité par les furies vengeresses de ses crimes et de
ses parricides, il osa marcher contre eux avec une poignée de guerriers en
désordre, comme s’il était aussi facile de combattre que d’assassiner. Les
Gaulois, dont le chef était Bolgios, envoyèrent des messagers auprès de
Ptolémée pour connaître ses dispositions et savoir s’il désirait acheter la
paix. Mais Ptolémée se glorifia devant les siens d’avoir contraint les Gaulois
à demander la paix. Et il poussa l’outrecuidance jusqu’à déclarer, en présence
des émissaires, qu’il ne pouvait être question de paix si les Gaulois ne
livraient leurs armes et leurs chefs en otages, car il ne se fierait à eux
qu’une fois désarmés.
Lorsque, de retour dans leur camp, les messagers eurent
rapporté tout cela, les Gaulois se mirent à rire et s’écrièrent avec mépris que
le roi de Macédoine verrait bientôt si c’était par crainte ou par pitié qu’ils
lui avaient offert la paix. Et leur détermination à combattre n’en fut que plus
grande. Quelques jours plus tard, les deux armées s’affrontèrent, et les
Macédoniens furent taillés en pièces. Ptolémée, couvert de blessures, fut fait
prisonnier, puis sa tête mise au bout d’une lance et promenée sur le champ de
bataille afin de convaincre les Macédoniens que tout était perdu.
Une fois revenu de la poursuite des fuyards, Bolgios rassembla
les captifs et, parmi eux, choisit les plus forts et les plus valides afin de
les immoler et, par là, de remercier les dieux de la victoire. Peu de
Macédoniens purent s’échapper. La plupart furent tués ou capturés. Quand la
nouvelle de ce désastre parvint en Macédoine, les habitants se massèrent dans
les villes et en fermèrent les portes. La consternation était générale, mais
l’un de leurs principaux chefs, qui avait nom Sosthénès, décida de réagir et de
s’opposer aux envahisseurs. Il rassembla une bonne partie de la jeunesse et,
dans l’enthousiasme et la fureur, parvint à arrêter l’avance des Gaulois qui,
trop occupés à célébrer leur succès dans l’ivresse, avaient perdu leur esprit
offensif.
Entre-temps, l’autre chef des Gaulois, qu’on appelait Brennos,
s’était dirigé vers la Grèce, qu’il entendait bien occuper. Quand il apprit que
les troupes commandées par Bolgios avaient vaincu les Macédoniens mais cessé
d’avancer, il fut indigné qu’elles eussent lâchement abandonné un butin immense
grossi de tous les trésors de l’Orient. Il rassembla alors quinze mille
cavaliers et cent cinquante mille fantassins et, au terme d’une course éperdue,
fondit sur la Macédoine. Tandis qu’il en ravageait les campagnes, Sosthénès
vint l’attaquer avec ses troupes. Mais celles-ci n’étaient pas nombreuses, et
la réputation de férocité des Gaulois terrorisait la plupart des jeunes gens
qui les composaient. Aussi furent-elles facilement dispersées aux quatre coins
du pays par leur adversaire, aussi résolu que confiant dans son destin. Les
Macédoniens s’enfermèrent alors une nouvelle fois à l’intérieur des murailles
de leurs villes, et Brennos put dès lors dévaster à loisir l’ensemble des
contrées avoisinantes.
Cependant, le butin accumulé semblait suffisant aux Gaulois,
et
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