Les cons

c'est le genre de truc qui tire en avant. Elle, elle était complètement tributaire des évènements
        J'avais pas vraiment d'angoisse pour ma propre personne. Au pire, si on retrouve jamais le chemin, il nous suffit de continuer à descendre tout droit jusqu'à tomber sur une route et là, attendre quelqu'un. Évidemment, dans ce cas, on peut dire adieu à Greg, et probablement à Anna. Je ne me sentais pas en danger autant qu'eux. J'avais décidé à l'intérieur de ma tête que les chances qu'on arrive au fond d'une vallée avec une rivière qui coule et la pente qui remonte de l'autre coté étaient très faibles (pour ma propre tranquillité plus que par logique pure). Thibaut ne devait pas être aussi serein, il m'a dit plus tard qu'à cet endroit, il commençait à avoir des crampes.
        Et puis on est retombés sur un semblant de sentier, qui s'est bientôt révèle être LE sentier. En voilà au moins deux qui crèveront pas ce soir ! Haut les cœurs À partir de là, bien gonflé d'optimisme, j'ai pris la tête quasi non-stop jusqu'au bout. Thibaut, qui avait ouvert la plupart du temps jusqu'à maintenant trainait un peu, il ménageait ses crampes. À partir de là, promenade de santé les enfants. On allait aussi vite qu'on pouvait, et on était surs qu'on allait arriver au moins. Et effectivement, en bas de la descente, le camion attendait. De la neige jusqu'aux moyeux. Dans le camion, mon téléphone, bien gorgé de batterie. Et des bouteilles d'eau... Aaah les bouteilles d'eau !
        J'ai enfin pu vérifier si le 112 est vraiment un numéro qu'on peut appeler sans entrer le code pine. Effectivement c'est le cas.
        Comme les seules expériences de standard téléphonique que j'ai sont avec mes différents opérateurs de téléphone et d'Internet (ou pire, les administrations françaises), je m'attendais à y passer une demi heure. Mais là, surprise, c'était très bien organisé. J'ai parlé à trois personnes seulement, à qui je n'ai pas eu besoin de tout réexpliquer du début La troisième était un pompier originaire des Vosges et qui connaissait le chalet et le stade de biathlon : « Les hélicoptères ne volent pas la nuit, mais on arrive dans 8 - 10 minutes avec un véhicule tout terrain ». C'est ça, mords mon cul !
        Un quart d'heure plus tard, une ambulance-fourgon arrivait. Très belle performance vu qu'il y avait de la neige sur la route jusqu'au bas-de-caisse. Derrière suivait un médecin très con qui n'avait pas pris d'insuline avec lui. Merde, quand tu fais une intervention sur un cas de diabète, il faut penser à l'insuline-glucagon plutôt qu'au stéthoscope Je suis sur qu'il l'avait emmené, le stéthoscope..
        Le con
        Dix minutes plus tard, c'est un tout terrain en pneu-neiges qui ramène dans une remorque un quad à chenilles. Bel engin. Comme un quad à roue, mais avec quatres chenilles triangulaires à la place. On met le pilote, le médecin et un pompier qui connait le chemin dessus et vogue la galère. C'est bien le mot, il a mis trois minutes à passer le premier obstacle. Moi je me demandais comment ils allaient redescendre un mec probablement inconscient ou pas loin sur un quad... Avec Thibaut, comme on était toujours mouillés et qu'il faisait froid depuis qu'on ne marchait plus, on est allés se réchauffer à l'avant de l'ambulance. Comme la CB était allumée dedans, on avait les news en direct : « Quad Cornimont en difficulté, un équipier continue à pieds ». Sans raquettes, il va s'amuser. « Quad Cornimont planté, on essaye de dégager ». Une chenillette se lance à l'assaut de la piste ouverte par le quad, elle ne le rejoindra même pas. Je commence à imaginer la suite : aucun des engins ne va réussir à monter, il faudra attendre le petit jour pour envoyer un hélico. Et il se lève à quelle heure le soleil en hiver ? Ça faisait déjà trois heures qu'on était partis...
        À ce moment là, il devait y avoir dix véhicules différents sur le parking du stade. Il y avait tellement de lumière clignotante qu'on se serait cru dans une free party Les pompiers étaient venus de la Bresse, Cornimont et Saulxure au moins. Le déploiement était impressionnant. Par contre, ils trainaient un peu niveau résultats. Mais bon, les conditions étaient quand même exceptionnelles. De la neige comme ça dans les Vosges ? Pas un Vosgien de moins de vingt ans ne s'en rappelle.
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