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Les croisades vues par les arabes

Les croisades vues par les arabes

Titel: Les croisades vues par les arabes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Amin Maalouf
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politique, l'inévitable lutte pour la succession s'engage, en dépit des efforts déployés par le sultan pour que ses fils, échappent à cette fatalité. De son vivant, il a déjà partagé son domaine : l’Egypte à al-Kamel, Damas et Jérusalem à al-Moazzam, la Jézira a al-Achraf et des fiefs moins importants aux plus jeunes. Mais on ne peut satisfaire toutes les ambitions : même si une relative harmonie règne effectivement entre les frères, certains conflits ne peuvent être évités. Au Caire, de nombreux émirs profitent de l'absence d’al-Kamel pour tenter d'installer l'un de ses jeunes frères sur le trône. Le coup d'Etat est sur le point de réussir lorsque le maître de l'Egypte qui en a été informé, oubliant Damiette et les Franj, lève son camp et remonte vers sa capitale pour y rétablir l'ordre et châtier les hommes du complot. Les envahisseurs occupent sans tarder les positions qu'il vient d'abandonner. Damiette est désormais encerclée. 
    Bien qu'il ait reçu l'appui de son frère al-Moazzam, accouru de Damas avec son armée, al-Kamel n'est plus en mesure de sauver la cité, encore moins de mettre fin à l'invasion. Aussi ses ouvertures de paix sont-elles particulièrement généreuses. Après avoir demandé à al-Moazzam de démanteler les fortifications de Jérusalem, il envoie un message aux Franj leur assurant qu'il serait prêt à leur livrer la Ville sainte s'ils acceptaient de quitter l'Egypte. Mais, se sentant en position de force, les Franj refusent de négocier. En octobre 1219, al-Kamel précise son offre : il livrerait, non seulement Jérusalem, mais l'ensemble de la Palestine à l'ouest du Jourdain, avec en prime la vraie croix. Cette fois, les envahisseurs prennent la peine d'étudier ses propositions. Jean de Brienne donne un avis favorable, ainsi que tous les Franj de Syrie. Mais la décision finale appartient à un certain Pélage, un cardinal espagnol, partisan de la guerre sainte à outrance, que le pape a nommé à la tête de l'expédition. Jamais, dit-il, il n'acceptera de traiter avec les Sarrasins. Et, pour bien marquer son refus, il ordonne de mener sans délai l'assaut contre Damiette. La garnison, décimée par les combats, la famine et une épidémie récente, n'oppose aucune résistance. 
    Pélage est maintenant décidé à s'emparer de l'Egypte tout entière. Si dans l'immédiat il ne marche pas sur Le Caire, c'est qu'on annonce l'arrivée imminente de Frédéric de Hohenstaufen, roi d'Allemagne et de Sicile, le monarque le plus puissant d'Occident, à la tête d'une importante expédition. Al-Kamel, qui bien entendu a eu vent de ces rumeurs, s'apprête à la guerre. Ses messagers parcourent les pa s d'islam pour appeler frères, cousins et alliés à l'aide. Par ailleurs, il fait armer à l'ouest du delta, non loin d'Alexandrie, une flotte qui, pendant l'été de 1220, surprend les vaisseaux des Occidentaux au large de Chypre, leur infligeant une écrasante défaite. L'ennemi ainsi privé de la maîtrise des mers, al-Kamel s'empresse de renouveler son offre de paix, en y ajoutant la promesse de signer une trêve de trente ans. En vain. Pélage voit dans cette générosité excessive la preuve que le maître du Caire est aux abois. Ne vient-on pas d'apprendre que Frédéric II a été sacré empereur à Rome et qu'il a fait le serment de partir sans délai pour l'Egypte? Au printemps de 1221, au plus tard, il devrait être la avec des centaines de vaisseaux et des dizaines de milliers de soldats. L'armée franque ne doit, en attendant, faire ni la guerre ni la paix. 
    Frédéric n'arrivera en fait que huit ans plus tard! Pélage patiente jusqu'au début de l'été. En juillet 1221, l'armée franque quitte Damiette, s'engageant résolument sur la route du Caire. Dans la capitale égyptienne, les soldats d'al-Kamel doivent utiliser la force pour empêcher les habitants de prendre la fuite. Mais le sultan se montre confiant, car deux de ses frères sont venus à son aide : al-Achraf, qui, avec ses troupes de la Jézira, s'est joint a lui pour tenter d'empêcher les envahisseurs d'atteindre Le Caire, et al-Moazzam, qui se dirige avec son armée syrienne vers le nord, s'interposant hardiment entre l'ennemi et Damiette. Quant à al-Kamel lui-même, il observe de près, avec une joie à peine contenue, la crue du Nil. Car le niveau de l'eau commence à s'élever sans que les Occidentaux y prennent garde. A la mi-aoàt, les terres sont devenues si boueuses et

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