Les croisades vues par les arabes
maître du Caire, al-Kamel, qui a osé reconnaître la souveraineté de l'ennemi sur la Ville sainte? Comment distinguer le passé du présent quand il s'agit de la lutte entre Damas et Jérusalem pour le contrôle du Golan ou de la Bekaa? Comment ne pas demeurer songeur en lisant les réflexions d'Oussama sur la supériorité militaire des envahisseurs ?
Dans un monde musulman perpétuellement agressé, on ne peut empêcher l'émergence d'un sentiment de persécution, qui prend, chez certains fanatiques, la orme d'une dangereuse obsession : n'a-t-on pas vu, le 13 mai 1981, le Turc Mehemet Ali Agca tirer sur le pape après avoir expliqué dans une lettre : J ‘ai décidé de tuer Jean-Paul II, commandant suprême des croisés. Au delà de cet acte individuel, il est clair que l’Orient arabe voit toujours dans l’Occident un ennemi naturel. Contre lui, tout acte hostile, qu'il soit politique, militaire ou pétrolier, n'est que revanche légitime. Et l'on ne peut douter que la cassure entre ces deux mondes date des croisades, ressenties par les Arabes, aujourd'hui encore, comme un viol.
NOTES ET SOURCES
En deux années de recherches sur les croisades, on côtoie de très nombreux ouvrages et auteurs qui, rencontre brève ou fréquentation assidue, exercent chacun une influence sur le travail qu'on effectue. S'ils méritent tous d'être mentionnés, l'optique de ce livre impose une sélection. Nous estimons en effet que le lecteur cherche ici, non une bibliographie exhaustive des croisades, mais des références permettant d'aller plus loin dans la connaissance de cette « autre vision ».
Trois types d'ouvrages figureront dans ces notes. D'abord, bien entendu, ceux des historiens et chroniqueurs arabes qui nous ont laissé un témoignage sur les invasions franques. Nous en parlerons, chapitre après chapitre, à mesure que leurs noms apparaîtront dans notre récit, donnant les références de l'œuvre originale, sur laquelle nous nous sommes généralement fondé, ainsi que celles des traductions françaises disponibles.
Citons toutefois, dès cette introduction, l'excellent recueil de textes rassemblés par l'orientaliste italien Francesco Gabrieli, publié en français sous le titre : Chroniques arabes des croisades, Sindbad, Paris, 1977.
Un second type d'ouvrages traite de l'histoire médiévale arabe et musulmane dans ses rapports avec l'Occident. Citons notamment :
E. ASHTOR : A social and economic history of the near east in the middle ages, London, 1976.
C. CAHEN : Les Peuples musulmans dans l'histoire médiévale, Institut français de Damas, 1977.
M. Hodgson : The venture of islam, University of Chicago, 1974.
R. PALM : Les Etendards du Prophète, J.-C. Lattès, Paris, 1981.
J .J . SAUNDERS : A histoiy of medieval islam, RKP, London, 1965.
J. SAUVAGER : Introduction à l'histoire de l'Orient musulman, Adrien-Maisonneuve, Paris, 1961.
J. SCHACHT : The legacy of islam, Oxford university, 1974.
E. SIVAN : L'Islam et la croisade, Adrien-Maisonneuve, Paris, 1968.
H. MONTGOMERY WATT : L'influence de l'islam sur l'Europe médiévale, Geuthner, Paris, 1974.
Un troisième type d'ouvrages conceme les récits historiques globaux ou partiels, des croisades. Il va de soi que leur constation nous était indispensable pour rassembler les témoignages arabes, nécessairement fragmentaires, en un récit continu couvrant les deux siècles d'invasions franques. Nous les évoquerons plus d'une fois dans ces notes. Citons d'ores et déjà deux ouvrages classiques :
Histoire des croisades et du royaume franc de Jérusalem; de René GROUSSEI, en trois volumes, Plon. Paris, 1934-1936.
A histozy of tbe crusades, de Stephen RUNCIMAN, également en trois volumes, Cambridge university, 1951-1954.
Prologue
Les historiens arabes ne sont pas tous d'accord pour attribuer à al-Harawi le discours que nous citons. Selon le chroniqueur damascain Sibt Ibn al-Jawzi (voir chapitre XII ), c'est bien le cadi qui aurait prononcé ces mots. L'historien Ibn al-Athir (voir chapitre II) affirme que l'auteur en est le poète al-Abiwardi, apparemment inspiré par les lamentations d'al-Halawi. De toute manière, aucun doute n'est possible quant au fond : les propos cités correspondent bien au message que la délégation conduite par le cadi a voulu transmettre à la cour du calife.
Parti de Valence, dans l'Espagne musulmane, Ibn Jobair (1144-1217) a effectué son voyage en Orient entre 1182 et
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