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Les Dames du Graal

Les Dames du Graal

Titel: Les Dames du Graal Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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quand ils affirment que la découverte de la Pierre Philosophale ne peut être réalisée matériellement que si les autres composantes de l’ Œuvre sont négligées ou niées. L’intervention de la Demoiselle à l’Échiquier dans la démarche de Perceval n’est pas gratuite. Elle sert à éclairer le personnage sur le sens de sa mission, la nécessité qu’il a de la mener jusqu’à son terme et les moyens d’y parvenir.
    Mais qui « tire les ficelles » dans tout cela ? Car il y a nécessairement un plan d’ensemble qu’on peut indifféremment appeler « plan divin », déterminisme ou fatalisme, selon ses croyances ou ses convictions. Les récits qui traitent du thème du Graal ne répondent jamais à cette question, car ils sont un moyen terme entre une théologie chrétienne qui cherche à s’affirmer comme vérité absolue et une série de spéculations bien antérieures au Christianisme, où se mélangent plus ou moins harmonieusement les données pré-chrétiennes, notamment druidiques, et les apports orientaux dont le plus évident est emprunté aux doctrines gnostiques du Moyen-Orient par le biais de certains Évangiles dits apocryphes et de ce qu’on peut appeler l’esprit de l’École d’Alexandrie. Le Graal est chose sainte , lit-on dans les textes. Et les choses « saintes » sont complexes autant que simples, car elles n’apparaissent que sous des aspects secondaires, obscurs, pour ne pas dire ésotériques.
    Ici, dans l’épisode du Château de l’Échiquier, c’est la Demoiselle qui « tire les ficelles ». Mais elle n’est que la vassale de l’Impératrice, autrement dit, elle n’est que le double de l’Impératrice, dont aucun texte ne précise le rôle et la fonction réelle. Alors, il faut extrapoler. La Demoiselle à l’Échiquier (elle-même dédoublée en Cavalière), putain royale et divine, mais toujours vierge , donc disponible pour quiconque, est l’Initiatrice par excellence, celle qui éveille . Mais, en dernière analyse, elle n’est que le double de la mystérieuse Impératrice qui partage le pouvoir avec Peredur pendant quatorze ans, deux fois sept, deux fois le temps symbolique d’un cycle cosmique, période clef que toutes les traditions se sont efforcées de mettre en relief.
    On pourrait en rester là. Cependant, rien n’est simple dans cette histoire : par le jeu des correspondances et des interférences, et aussi par le lien subtil des renvois et des retours en arrière, la Demoiselle à l’Échiquier, c’est-à-dire l’Impératrice, n’est pas isolée dans le cours du récit épique que constitue le Cycle du Graal, et qui est un véritable labyrinthe où se perd celui qui ne détient pas le fil d’Ariane. Cette « femme aux cheveux noirs » (qui contraste avec la blondeur prêtée généralement aux femmes par les Celtes) se rattache étroitement à une lignée, et cette lignée qu’on pourrait croire réelle n’est pas autre chose qu’une série de regards fonctionnels projetés sur un personnage unique. Par-derrière cette fée – maîtresse du Château de l’Échiquier, Demoiselle ou Impératrice –, se profile un autre visage, celui encore plus énigmatique, encore plus déroutant, encore plus envoûtant, de Morgane. Et c’est vers ce personnage hors du commun qu’il faudra se tourner pour comprendre réellement le sens de l’aventure de l’Échiquier.

CHAPITRE VII
-
Kundry la Sorcière
    ou la Hideuse Demoiselle à la Mule
     
     
    Un jour où le roi Arthur tient cour plénière, une jeune fille arrive à la cour, montée sur une mule. Mais quelle jeune fille ! Chrétien de Troyes la décrit ainsi : « Jamais vous ne vîtes métal plus grisâtre que son cou et ses mains ne le fussent davantage. Ses yeux étaient de simples creux, pas plus gros que des yeux de rat, son nez tenait du chat et du singe, ses lèvres de l’âne et du bœuf, des dents comme du jaune d’œuf tant elles étaient rousses, une barbe qui était celle d’un bouc. Au milieu de sa poitrine pointait une bosse, l’échine semblait croche, les reins et les épaules à souhait pour mener le bal, bosse dans le dos et jambes torses comme une verge d’osier, admirables pour la danse » ( Perceval , trad. L. Foulet). Le ton est donné…
    Cette jeune fille n’est pas mieux lotie dans la description qu’en donne Wolfram von Eschenbach : en effet, elle « avait une mine absolument contraire à celle du sexe que l’on qualifie de beau. De drap

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