Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les Décombres

Les Décombres

Titel: Les Décombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lucien Rebatet
Vom Netzwerk:
allemands, les Chinois, les Espagnols rouges, les Tchèques, les Polonais.
    Ils ont surtout à la nuque la marque du licol anglais. Ils furent courbés dans une servitude si longue et si étroite qu’ils ne peuvent retrouver l’usage de la liberté. Ne sentant plus la bride de Londres, ils ont été désorientés, ils sont restés bovinement sur place, ou bien ils ont porté, avec anxiété leurs regard vers le maître lointain d’outre-Manche.
    Un gouvernement viril et tourné vers l’avenir, quand la Légion antibolchevique de France fut créée, eût conduit sa propagande de façon à former plusieurs divisions encadrées par des militaires de métier. Sur le front de l’Est, elles eussent un peu mieux attesté la survie de nos vertus guerrières qu’en trompetant devant l’Hôtel du Parc ou le long de la Canebière. Bien au contraire, on créa tous les obstacles possibles aux volontaires, les chefs de la Légion interdirent formellement à ses membres de s’engager, tout a été mis en œuvre pour que notre apport fût minime. Le gouvernement avait l’occasion du plus heureux geste politique qu’un vaincu pût espérer. Il s’y refusa avec la plus méchante humeur. Maurras, Boutang, vingt autres furent autorisés à faire publiquement campagne contre la Légion, à ironiser sur la croisade antibolchevique, « caricature de Sainte-Alliance ». On a toléré à grand’ peine la Légion comme une entreprise rigoureusement ésotérique.
    Au lendemain de l’entrée des troupes allemandes en territoire russe, les chancelleries européennes firent demander à Vichy quel était son sentiment sur cet acte. Vichy répondit « que le gouvernement du Maréchal était paternel » et qu’il ne pouvait donc prendre position sur un fait de guerre.
    L’officieux Maurras exprimait plus crûment la pensée de l’État. « On » allait purger à notre place l’univers du bolchevisme (« les Juifs comme les Russes trouvent à qui parler dans le monde »). Parfait. Bon courage à « on ». Mais la France avait ses affaires et ne s’occupait pas de ça.
    Voyez-vous que la France et l’Allemagne puissent s’associer un tout petit peu pour démolir Staline ! Quel scandale ! On absoudrait plutôt Staline de tous ses mignons péchés.
    À Vichy, on s’est frotté les mains durant tout l’hiver dernier, le Deuxième Bureau a excité les plus gauloises espérances en prédisant dix fois la Bérézina de Hitler pour la fin de la semaine. La reprise de vingt isbas par les Rouges versait du baume sur vingt mille cœurs. On préparait les lampions quand la XVI e   armée allemande fut dans un pas difficile. Thierry Maulnier, oracle ayant une fesse sur le Figaro judaïsant, une autre sur l’ Action Française, a guetté la prise de Varsovie six mois durant.
    Avec cette politique de gâteux, l’armée française cire au cul de bouteille les chambrées de Clermont-Ferrand, tandis que se déroule la plus grandiose épopée de notre ère.
    J’ai professé très haut en tous lieux le plus violent et haineux mépris à l’endroit de ces gens-là, qui n’ont cessé d’être des crétins que pour devenir des crapules, qui ont promené parmi les immondices leur Saint-Sacrement, palabré sur l’autorité restaurée et ne sont même pas parvenus à faire respecter une ordonnance de simple police à la porte de leurs ministères.
    On n’a jamais rien vu de plus indigne que leur comédie de justice. Cet hiver, deux matelots saoulés par la propagande des agents gaullistes que l’on se gardait bien d’arrêter, essayèrent de diriger leur rafiot sur Gibraltar. On les exécuta séance tenante. Mais personne n’a parlé de fusiller tel grand armateur hyper-gaulliste bien connu à Marseille, d’inquiéter même une seconde ce personnage qui depuis deux ans se laisse miraculeusement capturer en Méditerranée par les Anglais ses bateaux dûment assurés au Lloyds. L’affreux guignol judiciaire emprisonne par fournées les pauvresses qui ont vendu en fraude une poignée d’oignons, les petites vieilles affamées qui se sont fait prendre avec dix faux tickets de pain dans leur sac. Mais il n’a pas dans ses cachots un seul millionnaire du marché noir.
    La déférence de tous, les magistrats au premier rang, pour les canailles qui ont eu le pouvoir, est la plus ignoble forme de la lâcheté, la plus abominable dénégation de la justice. La fable de Jean Valjean est véritablement devenue en France une réalité de

Weitere Kostenlose Bücher