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Les derniers jours de Jules Cesar

Les derniers jours de Jules Cesar

Titel: Les derniers jours de Jules Cesar Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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la légion, trois des
nôtres, trois des leurs, escortée par cinq mille légionnaires en tenue de
parade et conduite au bûcher sur une rampe artificielle de cent cinquante
pieds, au son des tambours, des luths et des buccins. Les aigles cravatées de
noir, inclinées par les hérauts sur son passage. Tout le monde pleurait. Lui
aussi.
    — Si les hommes auxquels il a tendu la main ourdissent
des complots contre lui, quel sens cela a-t-il ?
    — Aucun sens, en apparence. Mais César est certain que
la seule voie possible consiste à réconcilier les factions, apaiser les
rancœurs, protéger les pauvres en leur garantissant des prêts à taux bas, sans
effrayer pour autant les notables par l’effacement des dettes, construire la
réconciliation sur ce nouvel ordre. Il vaincra ou mourra.
    — Je ne comprends pas… Je ne comprends pas…
    — C’est pourtant assez simple. Les guerres civiles ont
fait rage pendant vingt ans : Marius contre Sylla, Pompée contre
Sertorius, César contre Pompée, les fils de Pompée contre César. Tout cela ne
peut mener qu’à la fin de notre monde, de notre ordre, de notre civilisation. César
est persuadé d’être le seul sur Terre à disposer de la force militaire et de
l’intelligence politique nécessaires pour mettre fin à cet état de choses et
instaurer une nouvelle ère. Il a poursuivi ce but par tous les moyens… »
    On frappa à la porte. C’était l’assistant grec d’Antistius,
un jeune esclave éphésien. « Maître, il y a là l’affranchi de Lollius
Sabinus que tu dois examiner pour un ulcère à la jambe gauche. »
    Le médecin lui adressa un geste de la main. « Annule
tous les rendez-vous de ce matin. Je suis occupé. »
    L’esclave acquiesça et se retira. On entendit des
protestations s’élever de l’antichambre, une porte claquer, puis le silence
revint.
    « Je ne supporte pas la vulgarité des affranchis,
reprit Antistius, visiblement agacé, avant de poursuivre : D’autre part,
je suis d’accord avec toi. César me déconcerte parfois.
    — Oui. Mais je suis son aide de camp. Je ne peux pas le
critiquer. Je n’ose pas.
    — Personne n’ose, Silius. Personne.
    — Il se fie trop aux hommes qui se sont battus à ses
côtés et auxquels il a pardonné. Est-ce le fond de ta pensée ?
    — Oui, également.
    — Mais pourquoi, par tous les dieux, pourquoi ?
    — Parce qu’il n’a pas le choix. Il a gagné et il
considère qu’il doit se montrer magnanime, qu’il doit pardonner afin de briser
l’enchaînement des vengeances, des rétorsions, d’interminables rancœurs. Il
doit établir une nouvelle ère, et cette phase en marque le début.
Naturellement, cela implique des risques. Disons qu’il y a une logique dans sa
façon d’agir, même si certains éléments viennent la contredire. Par exemple,
l’expédition contre les Parthes. C’est, semble-t-il, une entreprise énorme au
coût prohibitif, qui nous pousserait au cœur de territoires immenses, entre
déserts et montagnes, contre un ennemi fuyant, imprenable. Ce pourrait être sa
fin, ainsi que l’a été Carrhes pour Crassus, il y a neuf ans. Pas un seul de
ses hommes n’est rentré. On murmure qu’une légion entière a été conduite dans
un lieu perdu aux confins de la Terre. César ne peut l’ignorer, lui qui s’est
battu dans le monde entier et dans toutes sortes de situations. Il sait aussi
que, en cas de défaite ou de mort, son œuvre serait perdue, que les sacrifices
et les combats des guerres civiles seraient balayés. Cette expédition contre
les Parthes a l’allure d’un sacrifice héroïque, d’une entreprise titanesque où
brûler tout ce qui reste de sa vie. Mais c’est absurde… absurde. »
    Silius soupira. « Tu as vu, j’imagine, les inscriptions
qui couvrent les murs de Rome, le tribunal de Brutus et la statue de Brutus
l’Ancien.
    — Oui, répondit Antistius. Et je ne suis pas le seul.
    — Elles signifient qu’on incite Brutus à imiter son
ancêtre, l’homme qui a chassé le dernier roi de Rome.
    — C’est exact.
    — Et que Brutus pourrait être tenté de jouer ce rôle.
Par conséquent, de chasser, c’est-à-dire de tuer, César.
    — C’est possible. Toutefois, rien ne semble pouvoir
entamer l’affection que César porte à Brutus. C’est un aspect difficile à
expliquer. À moins que Brutus ne soit son fils, comme certains le croient… Un fils
qu’il aurait engendré à l’âge de seize ans. Cet attachement

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