Les Dieux S'amusent
jouer un rôle important et néfaste.
Clytemnestre, fille de l’infortunée Léda, était la sœur
jumelle de la belle Hélène. Grande, distinguée, elle avait les cheveux très
noirs, la peau très blanche et les lèvres très rouges ; mais elle était
osseuse, avec une expression dure. De caractère, elle était acariâtre, autoritaire,
agressive et jalouse. Souvent, les amis d’Agamemnon le plaignaient d’avoir une
telle épouse. Il leur répondait alors avec philosophie :
— Que voulez-vous, aucune femme n’est parfaite ; et,
tout compte fait, je préfère une femme désagréable mais fidèle, comme
Clytemnestre, à une femme charmante mais frivole, comme Hélène.
Agamemnon avait raison de penser qu’aucune femme ne peut
avoir toutes les qualités ; mais il avait tort d’ignorer que certaines d’entre
elles peuvent avoir tous les défauts. La sienne appartenait malheureusement à
cette catégorie, et ne tarda pas à le prouver.
Meurtre d’Agamemnon
Clytemnestre avait un motif valable pour en vouloir à son
mari : elle ne lui avait jamais pardonné d’avoir fait venir leur fille
Iphigénie à Aulis sous un faux prétexte et de l’avoir sacrifiée. À l’époque, d’ailleurs,
elle avait menacé Agamemnon de le punir un jour. Mais elle avait aussi une
seconde raison, moins honorable, de voir d’un mauvais œil le retour d’Agamemnon.
Peu de temps après le départ de son mari pour la guerre de
Troie, elle avait pris un amant, en la personne du propre cousin germain d’Agamemnon,
un certain Égisthe. Pour dissimuler sa liaison, elle avait nommé Égisthe
Premier ministre et lui avait attribué un appartement dans le palais ; ainsi,
elle pouvait le voir tant qu’elle le voulait sans éveiller les soupçons. C’est
donc sans plaisir, vous vous en doutez, que Clytemnestre et Égisthe apprirent
que la guerre de Troie était terminée et qu’Agamemnon était sur le chemin du
retour. Ils résolurent de se débarrasser de lui à la première occasion.
Lorsque, après une traversée assez facile, Agamemnon arriva
dans son royaume, Clytemnestre lui fit d’abord bonne figure et l’accueillit à
la porte du palais avec une joie hypocrite. Mais l’irritation jalouse qu’elle
ressentit en voyant qu’Agamemnon était accompagné de Cassandre ne fit que
renforcer les noirs desseins de Clytemnestre.
Conformément à un plan qu’elle avait arrêté avec Égisthe, elle
propose à Agamemnon et à Cassandre d’aller prendre un rafraîchissement. Par
politesse, Cassandre accepte ; Agamemnon, pour sa part, déclare qu’il
préfère prendre d’abord un bon bain chaud. Après avoir tendu à Cassandre une
coupe de vin empoisonné et l’avoir laissée seule dans un petit salon, Clytemnestre
accompagne son mari dans la salle de bains. Il n’était pas dans la baignoire
depuis plus de trois minutes qu’un cri d’agonie, poussé par Cassandre, parvient
à ses oreilles.
— Que se passe-t-il ? demande-t-il avec inquiétude ;
je vais aller voir.
— Sèche-toi d’abord, lui conseille Clytemnestre, si tu
ne veux pas attraper du mal.
Et elle l’aide à enfiler une sorte de peignoir de bain sans
manches, semblable à une camisole, qui prive momentanément Agamemnon de l’usage
de ses bras. Elle en profite pour se saisir d’une hache qu’elle avait
préalablement dissimulée dans un placard à linge et frappe sauvagement son mari
sans défense. Presque aussitôt, Égisthe, qui était caché dans une pièce voisine,
entre dans la salle de bains et aide Clytemnestre à achever Agamemnon.
Attirés par ses cris, ses deux enfants, Électre et Oreste, courent
à la salle de bains ; ils y découvrent leur père mort, leur mère et son
amant exultants et couverts de sang. Épouvantée, Électre entraîne son frère. À
juste titre, elle craint qu’Égisthe ne cherche à supprimer Oreste, pour se mettre
à l’abri d’une éventuelle vengeance. Elle sort donc du palais et confie son
frère à un serviteur fidèle en lui demandant de conduire l’enfant chez un de
ses oncles, roi d’un pays voisin. Puis elle rentre au palais, où Clytemnestre
vient d’annoncer au personnel le décès « accidentel » d’Agamemnon et
de Cassandre.
La vengeanced’Oreste
Pendant huit ans, Clytemnestre et Égisthe, débarrassés d’un
mari gênant, savourèrent en toute tranquillité les fruits de leur crime. En
toute tranquillité ? Pas tout à fait, car ils avaient continuellement sous
les yeux, en la
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