Les disparus
assez osée d'un dieu et d'une nymphe,
un passage d'Hérodote sur les crocodiles du Nil, deux sujets qui étaient pour
moi bien plus excitants que les vitupérations monotones des prophètes déversées
dans les textes de haftarah que nous devions, le jour de la
bar-mitsva, psalmodier après avoir lu la Torah, ou encore lesbizarres prohibitions alimentaires
et sexuelles que l'on trouve dans le Lévitique. Pour cette raison, j'étudiais
le grec et pas l'hébreu, et donc, même si j'avais appris l'alphabet hébreu
assez bien pour lire de longs passages couramment, comme il me faudrait le
faire le jour de ma bar-mitsva, je n'avais aucune connaissance de la langue
elle-même, si ce n'est de quoi lire et écrire la phrase aba babayit,
« Père est à la maison ».
Ce n’est que bien
plus tard, longtemps après m'être consacré à l'étude des classiques grecs et
latins, que je me suis préoccupé de revenir à l'hébreu et de l'étudier avec un
plus grand sérieux. Ce n'était pas en raison du fait que je me serais senti
plus religieux à l'âge de vingt-cinq ans qu'à l'âge de treize. Je voulais
étudier l'hébreu de nouveau parce que, à cet âge-là, juste avant de commencer
des études de troisième cycle, j'avais une envie irrésistible d'apprendre des
langues, tout comme mon grand-père qui en avait connu tant, et que cela
m'ennuyait d'avoir gâché cette opportunité précoce d'en apprendre une. Et j'ai
donc acheté un épais volume intitulé Introduction to Biblical Hebrew et,
pendant un an environ, je l'ai lentement parcouru de bout en bout. Après un
certain temps, au cours de ces mois de l'année 1985, j'ai commencé à pouvoir
lire des passages de la Bible et j'ai fini par retourner dans la librairie pour
acheter d'autres livres, pas des manuels de langue, mais des livres qui
m'expliquaient ce que j'aurais dû apprendre une décennie plus tôt ; qui
expliquaient, maintenant que j'avais une expertise et un intérêt certains pour
les littératures antiques et les textes sacrés, ce que j'étais impatient de
lire, non parce que j'aurais cru ce qu'ils disaient, mais parce que j'étais
capable à présent de les comprendre comme des produits des cultures de la
Méditerranée antique.
Pendant quelques mois, je me
suis immergé dans mon éducation juive et j'ai appris des choses sur la
composition de la Tanakh, la Bible hébraïque, les noms et les thèmes de
ses différents livres et des différentes parashot, les lectures
hebdomadaires de la Torah, le Pentateuque de Moïse, comment et quand chaque parashah devait être lue, et ce qu'elle signifiait.
J'ai appris, par exemple, comment parashat
Bereishit, la première section, formellement, du livre de la Genèse,
concernait les commencements des choses, comment, à partir d'une opacité
indifférenciée, les formes des choses s'éclaircissent progressivement : les
océans, les cieux, le Ciel, la terre, et ensuite les animaux, les plantes, les
poissons, les oiseaux et, enfin, les êtres humains. J'ai appris comment
certaines de ses histoires étaient des allégories sur le cours du monde : par
exemple, comment l'histoire d'Adam et Eve expliquait, parmi d'autres choses,
pourquoi les femmes doivent endurer des souffrances pour mettre des enfants au
monde ; comment l'histoire de Caïn et Abel, qui me troublait tellement quand
j'étais un petit garçon que je ne m'étais jamais soucié de l'apprendre
correctement à l'école du dimanche et que pendant longtemps je n'avais pas su
si Caïn ou Abel était le « méchant », expliquait l'existence de la
violence, du meurtre et de la guerre dans le monde. J'ai appris avec parashat
Noach, la section de la Genèse qui inclut l'épisode de l'Arche de Noé, de
ses effroyables errances sur la Terre – elle allait redevenir une masse
d'eau indifférenciée, puisque Dieu avait décidé de noyer sa propre Création
dans un accès de rage dévastatrice qui ne serait pas la dernière –, mais
qui inclut aussi une généalogie des descendants de Noé, se concentrant avec une
intensité croissante, à mesure que le récit progresse, sur une famille en
particulier et ensuite sur un seul homme, Abraham. J'ai appris comment la
marche d'Abraham à travers le monde connu à la recherche de la terre que Dieu
lui avait promise, une errance épique qui est racontée dans la parashah intitulée Lech Lecha (« Avance ! »), l'oblige, à la fin, à passer
par d'étranges géographies nouvelles, mais aussi à affronter
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