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Les Essais, Livre II

Les Essais, Livre II

Titel: Les Essais, Livre II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Montaigne
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leurs mariages portent
à la parenté ; mais l'experience nous fait bien souvent voir
le contraire ;
    nec habetur turpe juvencæ
Ferre patrem tergo : fit equo sua filia conjux :
Quasque creavit, init pecudes caper : ipsáque cujus
Semine concepta est, ex illo concipit ales
.
    De subtilité malitieuse, en est-il une plus expresse que celle
du mulet du philosophe Thales ? lequel passant au travers
d'une riviere chargé de sel, et de fortune y estant bronché, si que
les sacs qu'il portoit en furent tous mouillez, s'estant apperçeu
que le sel fondu par ce moyen, luy avoit rendu sa charge plus
legere, ne failloit jamais aussi tost qu'il rencontroit quelque
ruisseau, de se plonger dedans avec sa charge, jusques à ce que son
maistre descouvrant sa malice, ordonna qu'on le chargeast de laine,
à quoy se trouvant mesconté, il cessa de plus user de cette
finesse. Il y en a plusieurs qui representent naïfvement le visage
de nostre avarice ; car on leur void un soin extreme de
surprendre tout ce qu'elles peuvent, et de le curieusement cacher,
quoy qu'elles n'en tirent point usage.
    Quant à la mesnagerie, elles nous surpassent non seulement en
cette prevoyance d'amasser et espargner pour le temps à venir, mais
elles ont encore beaucoup de parties de la science, qui y est
necessaire. Les fourmis estandent au dehors de l'aire leurs grains
et semences pour les esventer, refreschir et secher, quand ils
voyent qu'ils commencent à se moisir et à se sentir le rance, de
peur qu'ils ne se corrompent et pourrissent. Mais la caution et
prevention dont ils usent à ronger le grain de froment, surpasse
toute imagination de prudence humaine : Par ce que le froment
ne demeure pas tousjours sec ny sain, ains s'amolit, se resoult et
destrempe comme en laict, s'acheminant à germer et produire :
de peur qu'il ne devienne semence, et perde sa nature et proprieté
de magasin pour leur nourriture, ils rongent le bout, par où le
germe a coustume de sortir.
    Quant à la guerre, qui est la plus grande et pompeuse des
actions humaines, je sçaurois volontiers, si nous nous en voulons
servir pour argument de quelque prerogative, ou au rebours pour
tesmoignage de nostre imbecillité et imperfection : comme de
vray, la science de nous entre-deffaire et entretuer, de ruiner et
perdre nostre propre espece, il semble qu'elle n'a pas beaucoup
dequoy se faire desirer aux bestes qui ne l'ont pas.
    quando leoni
Fortior eripuit vitam Leo, quo nemore unquam
Expiravit aper majoris dentibus apri
.
    Mais elles n'en sont pas universellement exemptes
pourtant : tesmoin les furieuses rencontres des mouches à
miel, et les entreprinses des Princes des deux armées
contraires :
    sæpe duobus
Regibus incessit magno discordia motu,
Continuoque animos vulgi Et trepidantia bello
Corda licet longè præsciscere
.
    Je ne voy jamais cette divine description, qu'il ne m'y semble
lire peinte l'ineptie et vanité humaine. Car ces mouvemens
guerriers, qui nous ravissent de leur horreur et espouvantement,
cette tempeste de sons et de cris :
    Fulgur ubi ad cælum se tollit,
totáque circum
Ære renidescit tellus, subtérque virum vi
Excitur pedibus sonitus, clamoréque montes
Icti rejectant voces ad sidera mundi
.
    cette effroyable ordonnance de tant de milliers d'hommes armez,
tant de fureur, d'ardeur, et de courage, il est plaisant à
considerer par combien vaines occasions elle est agitée, et par
combien legeres occasions esteinte.
    Paridis propter narratur
amorem
Græcia Barbariæ diro collisa duello.
    Toute l'Asie se perdit et se consomma en guerres pour le
macquerellage de Paris. L'envie d'un seul homme, un despit, un
plaisir, une jalousie domestique, causes qui ne devroient pas
esmouvoir deux harangeres à s'esgratigner, c'est l'ame et le
mouvement de tout ce grand trouble. Voulons nous en croire ceux
mesmes qui en sont les principaux autheurs et motifs ? Oyons
le plus grand, le plus victorieux Empereur, et le plus puissant qui
fust onques, se jouant et mettant en risée tres-plaisamment et
tres-ingenieusement, plusieurs batailles hazardées et par mer et
par terre, le sang et la vie de cinq cens mille hommes qui
suivirent sa fortune, et les forces et richesses des deux parties
du monde espuisées pour le service de ses entreprinses :
    Quod futuit Glaphyran Antonius,
hanc mihi poenam
Fulvia constituit, se quoque uti futuam.
Fulviam ego ut futuam ? quid si me Manius oret
Pædicem, faciam ? non puto, si sapiam.
Aut futue, aut pugnemus, ait : quid si

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