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Les Essais

Les Essais

Titel: Les Essais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Montaigne
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les
grands de son estat, qu'il avoit particulierement avancez :
pria chacun de le secourir, d'autant d'argent qu'il pourroit, à une
sienne necessité : et le luy envoyer par declaration. Quand
touts ces bordereaux luy furent apportez, chacun de ses amys,
n'estimant pas que ce fust assez faire, de luy en offrir seulement
autant qu'il en avoit reçeu de sa munificence, y en meslant du sien
propre beaucoup, il se trouva, que cette somme se montoit bien plus
que ne disoit l'espargne de Croesus. Sur quoy Cyrus : Je ne
suis pas moins amoureux des richesses, que les autres princes, et
en suis plustost plus mesnager. Vous voyez à combien peu de mise
j'ay acquis le thresor inestimable de tant d'amis : et combien
ils me sont plus fideles thresoriers, que ne seroient des hommes
mercenaires, sans obligation, sans affection : et ma chevance
mieux logee qu'en des coffres, appellant sur moy la haine, l'envie,
et le mespris des autres princes.
    Les Empereurs tiroient excuse à la superfluité de leurs jeux et
montres publiques, de ce que leur authorité dependoit aucunement
(aumoins par apparence) de la volonté du peuple Romain :
lequel avoit de tout temps accoustumé d'estre flaté par telle sorte
de spectacles et d'excez. Mais c'estoyent particuliers qui avoyent
nourry ceste coustume, de gratifier leurs concitoyens et
compagnons : principallement sur leur bourse, par telle
profusion et magnificence. Elle eut tout autre goust, quand ce
furent les maistres qui vindrent à l'imiter.
     
    Pecuniarum translatio à justis dominis ad alienos non debet
liberalis videri
. Philippus de ce que son fils essayoit par
presents, de gaigner la volonté des Macedoniens, l'en tança par une
lettre, en cette maniere. Quoy ? as tu envie, que tes subjects
te tiennent pour leur boursier, non pour leur Roy ? Veux tu
les prattiquer ? Prattique les, des bien-faicts de ta vertu,
non des bien-faicts de ton coffre.
    C'estoit pourtant une belle chose, d'aller faire apporter et
planter en la place aux arenes, une grande quantité de gros arbres,
tous branchus et tous verts, representans une grande forest
ombrageuse, despartie en belle symmetrie : Et le premier jour,
jetter là dedans mille austruches, mille cerfs, mille sangliers, et
mille dains, les abandonnant à piller au peuple : le lendemain
faire assommer en sa presence, cent gros lyons, cent leopards, et
trois cens ours : et pour le troisiesme jour, faire combatre à
outrance, trois cens pairs de gladiateurs, comme fit l'Empereur
Probus. C'estoit aussi belle chose à voir, ces grands amphitheatres
encroustez de marbre au dehors, labouré d'ouvrages et statues, le
dedans reluisant de rares enrichissemens,
    Baltheus en gemmis, en illita porticus
auro
.
    Tous les costez de ce grand vuide, remplis et environnez depuis
le fons jusques au comble, de soixante ou quatre vingts rangs
d'eschelons, aussi de marbre couvers de carreaux,
    exeat, inquit,
Si pudor est, et de pulvino surgat equestri,
Cujus res legi non sufficit
,
    où se peussent renger cent mille hommes, assis à leur
aise : Et la place du fons, où les jeux se jouoyent, la faire
premierement par art, entr'ouvrir et fendre en crevasses,
representant des antres qui vomissoient les bestes destinees au
spectacle : et puis secondement, l'inonder d'une mer profonde,
qui charioit force monstres marins, chargee de vaisseaux armez à
representer une bataille navalle : et tiercement, l'applanir
et assecher de nouveau, pour le combat des gladiateurs : et
pour la quatriesme façon, la sabler de vermillon et de storax, au
lieu d'arene, pour y dresser un festin solemne, à tout ce nombre
infiny de peuple : le dernier acte d'un seul jour.
    quoties nos descendentis arenæ
Vidimus in partes, ruptáque voragine terræ
Emersisse feras, et iisdem sæpe latebris
Aurea cum croceo creverunt arbuta libro.
Nec solùm nobis silvestria cernere monstra
Contigit, æquoreos ego cum certantibus ursis
Spectavi vitulos, et equorum nomine dignum,
Sed deforme pecus
.
    Quelquefois on y a faict naistre, une haute montaigne pleine de
fruitiers et arbres verdoyans, rendant par son feste, un ruisseau
d'eau, comme de la bouche d'une vive fontaine. Quelquefois on y
promena un grand navire, qui s'ouvroit et desprenoit de soy-mesmes,
et apres avoir vomy de son ventre, quatre ou cinq cens bestes à
combat, se resserroit et s'esvanouissoit, sans ayde. Autresfois, du
bas de cette place, ils faisoient eslancer des surgeons et filets
d'eau, qui rejallissoient contremont, et à

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