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Les Filles De Caleb

Titel: Les Filles De Caleb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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prenait cependant ombrage de l’entêtement quotidien de son aînée.
    Célina avait adroitement évité toute discussion à ce sujet. Elle savait que le comportement d’Émilie portait sur les nerfs de son père mais elle savait aussi qu’Émilie tenait tête avec tellement de politesse et de candeur qu’il était bien difficile de comprendre où elle voulait en venir. Par contre, lorsque son mari, un soir de la fin d’avril, lui avait demandé en soupirant si elle savait ce qu’Émilie attendait de lui, Célina crut que le moment d’intervenir était venu. Apparemment, l’orgueil de Caleb avait fondu au même rythme que la neige.
    «Je sais pas, Caleb, mais il me semble que ça aurait rapport avec les repas.»
    D’étonnement, Caleb leva un sourcil.
    «Qu’est-ce qu’ils ont les repas? Je rote tout le temps tellement que je mange vite pour pas que ça refroidisse.»
    Célina avait négligé de relever cette remarque, se contentant de lui faire un sourire entendu. Elle préférait lui laisser l’illusion que, de lui-même, il trouverait une solution. Caleb pensa à sa remarque pendant quelques jours.
    Le dimanche suivant, profitant de l’absence des aînés, qui étaient allés entendre un récital de piano dans la grande salle du couvent, Caleb demanda à Célina de dresser la table avec un couvert par membre de la famille. Célina pensa qu’il avait enfin compris, acquiesça sans commenter et fit ce qu’il demandait.
    Les enfants rentrèrent et les filles mirent leurs tabliers pour dresser la table. Célina se contenta de leur dire que c’était fait. Alors les filles, Émilie la première, virent qu’il y avait beaucoup plus de couverts qu’à l’accoutumée. Jouant de prudence, Émilie se contenta de dire que la table avait l’air d’une table de Noël. Toute la famille s’assit en même temps. Les garçons, se sentant lésés, se plaignirent qu’ils étaient trop à l’étroit. Caleb leur offrit de manger debout. Émilie pouffa de rire. Caleb s’empêcha de l’imiter. Il se racla la gorge et parla aux enfants attentifs.
    «J’avais toujours pensé que la table serait pas assez grande pour tout le monde. Aujourd’hui, votre mère pis moi on a essayé pis on s’est rendu compte que c’était faisable. On a assez de place. J’vas quand même faire une autre table, un peu plus grande... On a pensé aussi que les filles, Emilie, Année pis Éda, pourraient faire le service chacune leur tour. Nous autres, les hommes, on va faire comme dans les chantiers. On va aller porter nos assiettes pis nos ustensiles sales à côté du plat de vaisselle. De même, votre mère va moins marcher. On sait que ses jambes font mal...Astheure, si vous voulez vous lever, on va dire le bénédicité. »
    Tout le monde se leva. Émilie la première. Elle fut aussi la première rassise et la première à piquer sa fourchette quand les assiettes furent servies.
    «C’est donc bon des patates chaudes! Hein, moman!»
     
                               
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
                                Chapitre premier
                                       1895-1897
     
     
    «Éva, à soir, c’est à ton tour de laver l’ardoise. Prends un bon torchon, parce que je veux que ça reluise comme un sou neuf. Vous autres, les grands, vous allez fendre pis rentrer le bois. Je veux pas voir une seule bûche qui déboule. Les moyens, cette semaine, c’est à votre tour de passer le balai. Je veux pas de chicane quant à savoir qui va balayer pis qui va ramasser la poussière. Les p’tits, vous allez bien enligner les pupitres. Vous connaissez le secret pour qu’ils soient bien droits.» Émilie leur fit un clin d’œil. «Je veux des belles lignes.»
    Les vingt-sept enfants se levèrent. Les grands haussèrent les épaules, ne fut-ce que pour manifester qu’ils refusaient d’obéir aussi facilement, mais se hâtèrent néanmoins d’aller chercher le bois. Émilie, assise à son pupitre, mit de l’ordre dans ses papiers. Elle rangea ses feuilles dans le grand tiroir de droite, puis revenant sur sa décision, elle les ressortit et décida de les mettre avec sa pile de choses à apporter. Elle changea encore d’idée et les replaça dans le tiroir en hochant la tête. Elle se leva, chercha la petite Charlotte des yeux et se dirigea vers elle. Elle lui tapota l’épaule.
    «C’est l’heure,

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