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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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se dire, comme le commun aimait si bien à le propager : « Quand un homme fait l’amour, il ne fait pas la guerre. » Ainsi, Charles de Navarre n’avait cessé d’engendrer des héritiers et des héritières (449) . Cela ne l’empêchait pas de pousser çà et là ses armées vers des ennemis qui deviendraient provisoirement ses amis et inversement.
    –  Il paraît, dit un jour Paindorge, que le bel Henri enrage sans raison. Il en pleure, il en bave…
    –  Si César et Alexandre étaient, comme on le dit, épileptiques, c’étaient de grands capitaines. Pas le Trastamare, commenta Tristan. Mais tous ceux qui mènent les hommes au combat sont des malades. On sait, mais on n’ose trop le répéter, que Philippe Auguste avait quelques grains de sable dans le crâne 177 et le sang pourri. Ce n’est pas à lui que revient le mérite de Bouvines, mais à des hommes sains : les manants des communes…
    –  Peut-être nous faudrait-il un saint Louis… hasarda Lebaudy.
    Tristan haussa les épaules : 
    –  Il n’avait rien d’un agneau. Il haïssait les Juifs. Il passe pour avoir été un grand malade (450) … Je crains
    –  Peut-être, dit Paindorge, y aura-t-il dans la méchanceté des hommes plus terribles encore que ceux que nous connaissons.
    Tristan offrit ses mains aux flammes d’un feu maigre :
    –  Qui sait si ces tyrans dont les actes nous indignent ne seront point alosés 178 . Qui sait si Bertrand ne sera pas comparé à un preux de la Table ronde ?
    Il riait mais craignait que le Breton ne fut l’objet d’un culte d’autant plus dru, plus fort, qu’il serait immérité. 
    –  De toute façon, dit Yvain Lemosquet, nous ne pouvons changer le cours des choses. Nous sommes des fétus sous le souffle de Dieu et de la mauvaise graine dans les mains des rois et de leurs truchements . Même le vin me semble amer car j’ai vidé le calice jusqu’à la lie.
    Paindorge acquiesça. Il se sentait infirme de ces compains morts : Eudes, Petiton, Jean Lemosquet qu’il regrettait autant sinon plus que son frère.
    –  Nous ne pouvons, dit-il, renoncer présentement à notre état de mercenaires. Tous nos actes sont comptés bien qu’on les puisse dire honnêtes.
    –  Nous nous croyons à l’extrémité de l’horreur,  mais y sommes-nous vraiment parvenus ? interrogea ! Tristan. Nos chefs et leurs bourreaux n’ont eu jusqu’à présent affaire qu’à des faibles. Or, voici qu’une armée – et quelle armée ! – se propose de nous vaincre. Notre cause est-elle perdue, si jamais cause il y eut ? Jusqu’à présent, celle du Trastamare a été le prétexte au déchaînement de tous les vices et des plus sombres passions humaines. Nous méritons d’être vaincus. Mais le serons-nous ?
    Il ne cessait de se poser la question. Il n’acceptait plus son destin et savait que bientôt, il ne saurait plus, il ne voudrait plus savoir ce qu’était une illusion. La meilleure intention qui fut née de son cœur éprouvé depuis son entrée en Espagne s’était imprégnée de sang. Il s’était mépris sur ses qualités d’homme de cœur et trompé sur la bienveillance divine.
    Jésus lui-même, dit-il, a du sang sur les mains. Pur sang espagnol !
    Disant cela, il se demanda s’il continuerait à fréquenter les églises. Comment, après ce qui s’était passé à Guadamur persister à ouïr la messe ? Comment acomminger 179  ? Comment croire ? En qui croire ?
    Il se leva et tourna autour du feu. Il savait que le mouvement pouvait chasser la pensée, or, celle qui subsista dans son crâne figurait une plaine enneigée, jonchée de morts étendus dans leur sang. Expiation douloureuse que sans doute il méritait lui aussi pour être, simplement, ce qu’il était.

IV
     
     
     
    Le samedi 20 février, comme poussé par un vigoureux vent d’est, un chevaucheur apparut à l’aube devant les murs de Burgos. Il souhaitait parler à Enrique. Si le roi dormait encore, il fallait l’éveiller. Moins abjects que les huissiers de la Cour instaurée par le nouveau monarque, les archers de garde à la porte Santa Maria ouvrirent les vantaux. Connaissant les lieux, l’Espagnol galopa vers le centre de la cité.
    On apprit peu après la nouvelle à laquelle on s’attendait depuis des semaines : l’avant-garde de l’armée anglaise avait quitté Saint-Jean-Pied-de-Port le 14 et commencé la montée vers Roncevaux (451) .
    Le rassemblement s’était fait à Auch. Persuadé

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