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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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loup pour complaire à Guesclin ; Espiote, méditatif autant que pût l’être un homme au cerveau pas plus grand que le furoncle apposé sur son front ; Aimemon d’Ortige, repu d’abominations de toute sorte ; Audrehem soucieux et cherchant sans doute dans son crâne moins spacieux que son ventre comment se porter en retrait de la prochaine bataille tout en feignant d’y avoir participé vigoureusement. Et plus loin, hors du cercle quasiment infernal, Eustache d’Auberchicourt, l’un des plus terribles routiers d’Angleterre avec Calveley qui bientôt serait un ennemi.
    –  Ta grande goule, Castelreng, clouera le bec à ce suppôt du diable… Si tu meurs, nous ramènerons ton cœur à ton épouse quand nous reviendrons… Il se peut qu’elle languisse de ton absence autant que la mienne… dont la santé me tourmente…
    « Comme hypocrite, on ne saurait faire mieux que toi, Bertrand ! »
    –  L’épavité, crois-moi, est une belle chose (419) .
    –  Cesse tes bourdes, intima Tristan. J’irai voir Don Pedro avec mon écuyer.
    Guesclin approuva mais son pouce en ergot désigna dans son dos un homme dont l’attention se doublait d’inquiétude : Couzic.
    –  Tu l’emmèneras aussi. Il témoignera que tu t’es bien acquitté de la mission que nous te confions.
    Tristan vit tous les mentons des prud’hommes et des coquins qui les côtoyaient, s’incliner en signe d’assentiment. Guesclin désigna Séville dont les clochers et les minarets semblaient vouloir abrocher le ciel immensément bleu.
    –  Va… Nos regards et nos cœurs t’accompagnent ainsi que ton écuyer.
    Tristan s’éloigna en riant bruyamment. Leurs regards, certes. Mais leurs cœurs ! Pouvait-on évoquer ainsi, à l’étourdie, ce qui, justement, faisait défaut à tous ces hommes ?
    *
    Couzic diligemment s’en vint à leur rencontre. Il montait un cheval à la robe du plus beau noir, aux harnois de cuir cloutés d’or robés dans quelque grande maison de Castille.
    –  Holà ! dit-il, le sourire aux lèvres comme s’il s’adressait à des compères, voilà une visite qui ne me convient point. Et vous ?
    On voyait à peine sa bouche dans l’ovale du bassinet dont le viaire 79 relevé obombrait sa face rasée de frais. Il portait une brigantine vermeille 80 – « le sang ainsi ne s’y voit pas », songea Tristan -, et des jambières de fer. Ses mains étaient gantées de mailles. Dans sa dextre il poignait la bannière de Guesclin et pour qu’on vît bien son aigle noire, il en avait lié l’extrémité à la barre transversale. Paindorge, vêtu de toutes pièces, releva du sol où il l’avait allongée, l’estranière 81 des Castelreng : de gueules à deux tours d’argent. La voyant frémir au vent léger, Tristan sentit ses craintes s’évanouir : sa vie d’homme et de chevalier ne s’achèverait pas à Séville.
    Son armure l’empesait. Il n’était plus accoutumé à la porter. Teresa pesait à sa hanche. Il redoutait de devoir s’en séparer sur le seuil de la cité avant que d’y entrer. Alcazar piaffait, immaculé comme neige et crinière tressée. Ses lormeries brillaient ; des grillettes 82 tintaient au-dessus de son frontail timbré d’un écusson émaillé, d’azur aux lis de France – un prêt de Jean de Bourbon. Tachebrun, lui aussi, avait été paré. Trois plumes d’autruche rouges remuaient en haut de son harnois de tête avec des ornements d’un travail au repoussé. Ogier d’Argouges était fier de cette pièce. Lui aussi fût allé au-devant du roi Pèdre.
    –  Partons, dit Tristan avant même de monter en selle. Allons voir si cet homme est aussi cruel qu’on le dit.
    –  Crois-tu qu’il ne l’est point ? s’étonna Couzic.
    –  Bah ! J’en connais moult autres, à commencer par toi, qui pourraient passer pour ses frères. Considère-toi comme en état de trêve avec moi, mais un jour, sache-le, tu mourras de ma main.
    Le Breton s’abstint de fournir une réponse. Cependant, comme il fallait qu’il s’exprimât pour contraindre son inquiétude, il demanda d’une voix rêche, – le courage, soudain, lui faisant défaut :
    –  Cela s’est bien passé pour vous tous, à Cordoue, au sortir de la forêt ?
    –  Nous avons contourné de loin cette cité.
    –  Ah ! Ah ! fit Couzic, triomphant. Or, sachez-le : conseillé par Ferrant de Castro (420) , Pèdre nous a envoyé deux bourgeois. Il proposait à Henri de tenir le pays de Tolède,

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