Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
existait à l’ombre de la Couronne, il trouvait nécessaire qu’on l’admirât. Il avait une insatiable malefaim d’assentiments et plus encore d’ovations. Il lui faudrait toujours trouver, soit fortuitement, soit au besoin par la provocation, des ennemis à surpasser, des prix de joutes et tournois à remporter. Cet homme-là avait besoin de renommée à n’importe quel prix – surtout au prix du sang des petits et des faibles.
    S’il n’avait aucun charme, il exerçait un tel ascendant sur les femmes qu’elles se pâmaient en sa présence non point d’amour mais de frayeur. Le monde, après le Cœur de Lion, avait un Cœur de Tigre. Tristan ne savait rien de celle que le Breton emportait dans un dolmon 77   qu’il avait fait aménager à Tolède et sur  lequel, en chemin, veillaient Couzic, Hénaff et quelques satellites aussi rudes que les eunuques d’un Soudan de Barbarie. Yvain et Serrano l’avaient entrevue. Unanimes, ils la disaient belle. Toutefois, à l’inverse de son amant qui avait visage laid et stature solide, il se pouvait qu’elle eût visage beau et corps difforme.
    –  Holà ! Toi qui tues les serpents longs d’une aune…
    –  Cinq aunes au moins, Guesclin. Tu me prouves que tu l’as vu.
    À quoi bon dire que le mérite de cette mort revenait à Lebaudy. C’eût été se rabaisser. D’ailleurs c’était lui. Sang-Bouillant, qui avait affronté le monstre.
    Nul n’avait bronché à l’entour. Tristan estima que c’était perdre son temps que de regarder ces hommes assujettis à celui qui l’avait interpellé. Il sentit que Bagerant l’observait plus qu’aucun autre mais jugea inutile de se tourner vers lui pour essayer de connaître sa pensée.
    –  Cinq aunes ou une seule, peu me chaut. Nous avons pensé que le devoir te revenait d’affronter une vipère…
    –  Plutôt un aspic, rectifia Audrehem en accompagnant son intervention d’un rire qui suscita celui du seul Guesclin.
    L’esprit de ces deux-là n’était pas le résultat d’une expérience fine et aiguisée : c’était un jaillissement naturel, une disposition lourde à tirer des situations et des mots les plus communs une étincelle qu’ils croyaient inattendue, mais qu’eux seuls voyaient. Guesclin gonfla avantageusement sa poitrine :
    –  Nous savons que Pedro est encore à Séville.
    –  Ah !
    – Pour embellir et colorer notre fait, tu vas aller trouver cette vouivre luxurieuse. Tu lui demanderas de nous ouvrir la ville afin qu’Henri, qui nous suit à six jours, puisse y entrer tout souef… Dis-lui aussi que s’il a du cœur, il m’attende n’importe où, même sur son faudesteuil d’or au milieu de sa cour de Juifs et de Mahoms ! Je te dois bien ça.
    Tristan se sut victime d’une vengeance abjecte pour la mort d’un mécréant et l’étrange disparition de l’autre sans doute occis puisque désormais bon à rien. Il ne pouvait reculer :
    –  Quelles salutations dois-je lui adresser ? On ne traite pas un roi comme un loudier de Pontorson, un huron de Dinan ou un ahanier 78 d’Auray.
    Il reprenait l’avantage : Bagerant riait. Le Bègue de Villaines aussi. Espiote lui-même trouva la question digne d’un ébaudissement qui semblait un hoquet dans sa gorge grasse et poilue.
    –  Point de simagrées !… Dis-lui que s’il est un homme, nous jouterons à outrance. Et rapporte-moi sa réponse aussi vélocement que tu le pourras… si tu ne te fais pas occire en tant que truchement d’Enrique !
    « C’est bien ce que tu attends de moi, morpoil », songea Tristan. « Que je ne revienne pas ! »
    –  Tu seras notre héraut.
    C’était jouer sur les mots, mais Tristan acquiesça (418) .
    Son oui suscita une rumeur qui pouvait être admirative. Alors, d’un regard sec et tranquille, il les dévisagea tous, brièvement mais intensément. Jean de Bourbon renfrogné – il ne songeait qu’à venger sa cousine –  Robert Briquet entre deux libations, son grand nez allumé de lueurs pourprées ; Nicole de Carsuelle ensommeillé ; Lamit, la bouche en cœur comme s’il voulait baiser Guesclin sur le front ou la joue ; le Petit- Meschin qui souhaitait sans doute la mort de ce Castelreng témoin, à Brignais, de ses énormités ; les bourc Camus, de l’Esparre et de Breteuil, toujours ensemble comme lorsqu’ils violaient les femmes ou meurtrissaient les Juifs et les Maures ; Batillier, l’air ébahi de voir un homme aller se jeter dans la gueule du

Weitere Kostenlose Bücher