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Les Fils de France

Les Fils de France

Titel: Les Fils de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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serait bien ennuyeux sans vous, nous aurions dû voyager plus tôt ensemble !
    Anne, qui se rappelait le temps, pas si lointain, où la reine faisait bloc avec le connétable contre elle, savourait ce retournement des choses, et s’ingéniait à le conforter.
    — Madame, les honneurs dont me couvrent vos compatriotes ne sont rien, comparés au très grand privilège de cheminer en votre compagnie.
    Charles Quint, en prince galant mais, surtout, en frère attentionné, vint au-devant du grand convoi qu’il retrouva à Mons. S’avançant à pied vers la litière royale, il installa lui-même le marchepied d’Éléonore, qu’il embrassa plus chaleureusement que de coutume. Puis, au lieu de se retourner pour entrer, comme l’eût prescrit le protocole, il attendit tout un moment que la duchesse descendît à son tour, et la gratifia lui-même d’une accolade, tout à fait extraordinaire au regard des usages espagnols.
    Tout, dans ce voyage, fut étudié pour flatter la favorite, et non seulement lui donner le sentiment de son importance, mais aussi accroître celle-ci par le rang effectif qu’on reconnaissait à la dame.

    Gautier de Coisay, apprenant de son côté que la duchesse d’Étampes faisait route vers les Flandres, avait pris cette direction au grand galop, dans l’espoir de rattraper le convoi royal. Mais cette fois, ce n’était plus l’amour qui lui donnait des ailes ; c’était la haine. Une haine profonde, aveugle, et qui n’avait que bien peu à voir avec sa découverte nocturne de la rue Saint-Antoine.
    C’est qu’entre-temps, le chevalier de Coisay n’avait pu s’empêcher de faire certains recoupements entre son voyage en Lorraine, sa rencontre avec Ezcurra, le document scellé qu’il lui avait remis et... la prise de Saint-Dizier ! À raison ou à tort, Gautier avait fini par se convaincre que la fameuse lettre qu’il avait, si scrupuleusement, si amoureusement transmise ce soir-là, de la part de la belle Anne, contenait ce chiffre royal qui, offert aux Impériaux, leur avait permis de tromper le comte de Sancerre. Simon, le voyant enfourcher sa monture pour gagner les Flandres au plus vite, avait d’abord tenté de l’en dissuader ; puis, réalisant qu’il n’y parviendrait jamais, il avait pris la résolution de se mettre en route à ses côtés.
    — Elle me le paiera, lui avait dit Gautier. Elle va me le payer !
    Et c’est ce qu’ils se répétaient depuis lors, chaque fois que la fatigue ou les obstacles de la route leur criaient d’abandonner cette absurde poursuite et de rentrer à Paris. De temps en temps, chemin faisant, Gautier s’était demandé ce qu’il allait bien pouvoir dire à la belle quand, enfin, il l’aurait rattrapée. L’accuserait-il publiquement de trahison ? La menacerait-il ? Lui demanderait-il seulement de s’expliquer ?
    S’il avait osé la franchise envers lui-même, Gautier aurait su qu’au fond, tout ça lui devenait indifférent. Des blessures répétées, diverses, tant de chemins empruntés qui ne l’avaient mené nulle part, lui donnaient, au-delà de l’écœurement, peut-être naturel en ces prises de conscience, le sentiment d’une très grande confusion des événements – et d’une absence de logique dans leur surgissement.

    Gautier et son frère, brûlant les étapes, étaient arrivés à Mons quelques heures seulement après le convoi de ces Dames.
    — Que cherchez-vous, par ici ?
    Les archers à bout de nerfs qui, nuit et jour, assuraient la garde de la reine, n’aimaient pas voir rôder les curieux parmi les chariots et les litières dételées.
    — Je suis Gautier de Coisay, s’impatienta l’écuyer, et voici mon frère. Vous nous avez vus cent fois, en France.
    — Pardon, messires. Il y a tellement de badauds...
    Gautier n’eut guère de mal à égarer son frère dans la foule qui se pressait au sein de la grande salle de l’hôtel de ville, pour voir la reine de France et – surtout – sa rivale en titre. Ces dames étaient fort demandées, cependant, et la sollicitude dont les Flamands mettaient un point d’honneur à les entourer, rendait difficile tout échange un peu personnel. Soudain, au détour d’une présentation de guildes, le regard d’Anne croisa celui de Gautier. Elle ne put s’empêcher de lui sourire d’abord ; puis, d’instinct, elle se ravisa.
    — Vous ? Si je m’attendais !
    Anne continuait à feindre le badinage. Gautier, lui, ne jouait pas du tout.
    — Je suis

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