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Les fils de la liberté

Les fils de la liberté

Titel: Les fils de la liberté Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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centurion dans la Bible… Il dit à son soldat : « Va », et le soldat va. Si tu dis à un Indien « Va ! », peut-être bien qu’il ira mais peut-être aussi qu’il n’ira pas. Ça dépend de ce dont il a envie.
    Balcarres était tout occupé à reboutonner sa braguette, une opération apparemment ardue.
    — Je veux dire… insista William. Ils n’obéissent pas aux ordres.
    — Ah ça, c’est le moins qu’on puisse dire !
    — Tu donnes des ordres à tes Indiens, toi ?
    Balcarres dirigeait un régiment d’infanterie légère mais commandait également un groupe de rangers dont bon nombre étaient indiens. D’ailleurs, il lui arrivait fréquemment de s’habiller comme eux. Sans attendre sa réponse, William conclut :
    — Oui mais, d’un autre côté, tu es écossais.
    Balcarres était enfin parvenu à ses fins et se tenait au milieu de l’allée, observant William.
    — T’es vraiment saoul, Willie.
    Ce n’était pas une accusation. Il parlait avec le ton satisfait de celui qui vient de faire une déduction d’importance.
    — C’est vrai. Mais demain matin, je serai sobre et toi, tu seras toujours écossais.
    Ils se tordirent de rire et reprirent leur chemin en titubant, se répétant la boutade et se cognant l’un contre l’autre. Le hasard fit qu’ils arrivèrent d’abord devant la tente de William et celui-ci invita son compagnon à prendre un dernier verre de négus avant de se coucher.
    — Ça soulage les brûlures d’estomac et aide à dormir, dit-il en manquant tomber la tête la première dans son coffre alors qu’il y cherchait la bouteille et des verres.
    Balcarres réussit non sans peine à allumer la bougie et la tint en clignant des yeux, ébloui. Il but à petites gorgées le négus, fermant les yeux pour mieux le savourer. Il les rouvrit soudain.
    — Quel rapport entre le fait d’être écossais et celui de lire la Bible ? Tu me traites de païen ? Ma grand-mère est écossaise et la lit tous les jours. Moi-même je l’ai lue… en partie.
    Il finit son verre d’une traite.
    William le dévisageait, sourcils froncés, se demandant de quoi il parlait.
    — Ah ! fit-il enfin. Je ne te parlais pas de la Bible mais des Indiens. Têtus comme des cochons. Les Ecossais non plus, quand on leur dit « Va ! », ils ne vont pas, enfin pas forcément. Je me demandais si c’était pour ça qu’ils t’écoutaient.
    Il y eut un silence, puis il ajouta :
    — Tes Indiens.
    Balcarres fut pris d’un fou rire. Quand il fut calmé, il secoua la tête.
    — C’est comme… Tu connais un cheval ?
    — Je connais un tas de chevaux. Lequel ?
    Balcarres recracha un peu de vin, et s’essuya le menton d’un revers de main.
    — Un cheval, répéta-t-il. Il n’en fait qu’à sa tête. Tu dois guetter ce qu’il va faire et ensuite lui ordonner de le faire, si bien qu’il croit que c’est toi qui en as eu l’idée. La prochaine fois que tu lui demanderas quelque chose, il y a de fortes chances qu’il t’obéisse.
    — Ah… en effet.
    Ils burent un moment en silence, méditant sur la profondeur de cette observation. Puis Balcarres s’arracha à la contemplation du fond de son verre et demanda gravement :
    — A ton avis, laquelle a les plus beaux nichons, Mme Lind ou la baronne ?

9
    L’exode
    Fort Ticonderoga, 27 juin 1777
    Mme Raven me préoccupait. Je la trouvais à l’aube attendant devant les casernes, paraissant avoir dormi tout habillée, les yeux cernés mais brillants. Elle me talonnait toute la journée, sans cesser de bavarder, et sa conversation, généralement centrée sur nos patients et les aléas de la vie quotidienne dans un fort, commençait à dériver hors des confins étroits du présent.
    Au début, ce ne furent que d’occasionnelles réminiscences de ses jeunes années à Boston. Elle avait d’abord été mariée à un pêcheur et élevait deux chèvres dont elle vendait le lait dans les rues. L’écouter parler de ses bêtes, Patsy et Petunia, ne m’ennuyait pas. J’avais moi-même croisé quelques biques mémorables, sans parler d’un bouc nommé Hiram dont j’avais réparé la patte cassée.
    Ce n’était pas que ses remarques sur son premier mari ne m’intéressaient pas ; elles étaient au contraire trop intéressantes. Dès qu’il était à terre, feu M. Evans devenait un vrai soudard, jusque-là rien d’inhabituel, avec une fâcheuse tendance à couper les oreilles et le nez de ceux qui ne lui revenaient pas, ce qui

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