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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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étais-tu ?
    Déjà, il excluait cet inconnu des vivants. Froideur ? Non : ce guerrier méritait sa pitié, mais il l’eût outragé en parlant autrement.
    — Sais-tu pourquoi ta vie m’était précieuse ?
    — Non, Enguerrand.
    Ogier, de sa paume, effleura un front déjà froid.
    — J’ai appris que tu t’étais porté au secours de mon frère… Montfort, sitôt franchie l’enceinte d’Hennebont, s’était confié à l’un des nôtres. Il me l’a rapporté à moi seul… Je suis…
    — Si Yvon était ton puîné, tu es Jaquelin de Kergœt.
    Le Breton grimaça et gémit ; Ogier lui tapota doucement l’épaule :
    — Je suis heureux que tu aies su. Mais que ne l’as-tu dit plus tôt !
    — J’attendais le moment. Je suis venu à Chauvigny pour venger Montfort et Yvon par l’occision de Blainville. Au tournoi, nous aurions pu nous allier contre lui sans préjudicier des causes différentes… J’aurais dû t’en parler sans tarder… Aurais-tu cru mes dires ? Te serais-tu fié à moi ?
    — Je ne sais, dit Ogier, sincère.
    — Tu m’as toujours pris pour un félon… si ce n’est un truand. Sache que j’étais bon… Ils m’ont rendu tel qu’un fauve.
    — Qui ?
    — Blois, ses grands alliés et leur veautre [322]  : Guesclin… Et toi qui me croyais accointé à Blainville !… Certes, j’avais à cœur de servir la Bretagne… la vraie… Mais lui, ce scorpion…
    Ogier vit une main se crisper, grattant le sol battu à s’en arracher les ongles. Le courroux du blessé à l’égard de Blainville devenait tout à coup trop fort pour qu’il l’exprimât autrement que par ce geste. Un fauve, en vérité, donnant avant sa mort un dernier coup de griffes.
    — Pourquoi as-tu choisi le nom de Briatexte ?
    Froncement de sourcil ; une larme, peut-être, au coin de l’œil terni.
    — Trop de respect pour le nom… de mes ancesseurs [323] … Hors du terroir, je prenais celui d’un chevalier de la Langue d’Oc… près de Lavaur… Cela remonte à quatre ans… Un pont que je voulais franchir… Il m’en interdisait l’accès… Je l’ai défié… Mort noyé… Sa fille… Huguette…
    Ogier trouva ces détails inutiles :
    — Qui attendais-tu à l’Âne d’Or ?
    —  Personne… J’y étais venu voir… Non : tu ne sauras pas…
    Déglutition, puis râle bref. Ne plus perdre de temps : cet homme allait succomber.
    — Jaquelin, sais-tu pourquoi j’ai quitté Gratot ? Non seulement pour retrouver Blainville…
    Se pencher, chuchoter, la bouche proche de ce visage à demi gelé :
    — Jean de Montfort m’avait appris qu’un complot s’ourdirait ici, en présence de cet infâme, à l’occasion des joutes et du tournoi…
    Un tressaillement du sourcil ; la pomme d’Adam pointant soudain sous la barbe : émotion, déception et peut-être colère.
    — Ils sont… plus forts que toi : renonce à déjouer l’issue de cet argu [324]  !
    Le souffle du mourant devint rauque ; ses paupières mal closes laissèrent entrevoir un peu de blanc et sa bouche se pinça, donnant à son visage une expression moqueuse, dépourvue cependant, de sa méchanceté coutumière :
    — Tu as du cœur, ils n’en ont pas.
    — Dis-moi tout !… En l’état où tu te trouves, la vérité s’impose… Elle n’est pas trahison… Dieu nous voit… Rachète tes péchés : aide-moi !
    Plainte sourde. Ogier s’aperçut qu’il avait agrippé Kergœt à l’épaule.
    — Pardonne-moi… J’implore ton soutien !… Il me faut venger un père dont les jours sont comptés… une mère défunte… maints amis victimes de Blainville et de Ramonnet, que je viens d’occire.
    — Tu l’as…
    — Il est mort par ma main !… C’est Blainville qu’il me faut châtier, désormais. Il nous a préjudiciés tous les deux… Pense à Yvon !… C’était un preux… Je dois être aussi ton restorier [325]  !
    Un frisson parcourut le corps du Breton. Sa tête dodelina. Refus ? Acceptation ?
    — Tuer Blainville… soit… Les autres… je ne puis les trahir…
    — Je n’en veux qu’à Blainville. Il va devoir les rejoindre quelque temps, j’en suis sûr… Où et quand s’assembleront-ils ? Le sais-tu ?… Je sais, moi, qu’ils doivent confronter leurs idées pour un débarquement prévu depuis l’an passé… À Gratot, Montfort m’en avait avisé !
    Échouer maintenant ? C’eût été trop de malechance.
    Ogier désespérait lorsque les lèvres de

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