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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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précaution comme si, griffée, Adelis eût pu se plaindre ; parfois, pour se décrocher, il avançait à reculons.
    — Si j’apprends qui a fait ça !
    Et Thierry, Raymond, que diraient-ils ? Tout croulait, basculait dans l’abomination.
    Plus il marchait, plus il se sentait meurtri, faible, coupable. Il n’avait certes pas voulu cela, mais cela était survenu par sa faute. Même si Adelis avait manqué de prudence, il était à blâmer d’avoir ainsi disposé de sa vie !
    « Il se peut que ce meurtre n’ait rien à voir avec le complot… qu’Adelis ait eu besoin de s’esseuler un moment et qu’un gars de passage… peut-être un pêcheur… Non : ils étaient au moins deux… si ce n’est trois… »
    Cela ne changeait rien : il était fautif. De toutes les femmes qu’il avait connues, elle seule avait complètement partagé ses épreuves ; et pour lui, pour sa cause, elle venait de périr !
    Il remonta la pente vers la grotte et dut s’agenouiller par deux fois tant il glissait. Il n’osait plus regarder Adelis. Il ne voyait rien d’autre, devant lui, que les lanières des herbes et le ciel, à travers l’entrelacs des branches bourgeonnantes. Il songeait malgré lui à leurs entretiens toujours d’une absolue droiture ; au plaisir de la sentir proche, de croiser son regard… Il eût aimé – ah ! oui, ne fut-ce qu’une seconde et définitive nuit – redevenir son amant. Il n’aurait donc été que son bourreau !
    Il tremblait de plus en plus. Ce corps serré contre le sien l’imbibait de sa mortelle froidure. En titubant, il atteignit le seuil de la grotte. Il n’en pouvait plus. Il allait falloir éviter les curieux… retrouver Raymond et l’amener discrètement ici… Enterrer Adelis quelque part…
    « J’ai occis Ramonnet ; Briatexte est mort devant moi d’un coup fourni par on ne sait qui… Si l’on me voyait avec elle en cet état, on m’accuserait, c’est sûr ! »
    Il étendit la morte sur le sol. Il ne fallait pas qu’on sache… À son affliction s’ajoutait cette peur glacée, tenace comme ce sang caillé sur une de ses manches.
    — Elle aurait dû savoir…
    Quoi ? Qu’il l’aimait bien ? Des mots ! Du vent ! Il frissonnait à petits spasmes entrecoupés d’accalmies ; parfois, il claquait des dents. Tout se mêlait : son dépit envers lui-même et sa haine, d’autant plus ravageante qu’il la sentait inutile, contre ces meurtriers inconnus.
    — Demeure ici, Saladin… Veille !
    Bientôt, il émergea dans le grand pré, à dix toises de la cahute de Guesclin. Il aperçut Raymond non loin de là, immobile sur Marcepin.
    — Ho ! Viens.
    Le sergent galopa sous les regards de deux Bretons immobiles.
    — Du nouveau, messire ?
    — Oui. Porte-moi en croupe.
    Marcepin accusa l’excès de charge en encensant.
    — Courons chercher Thierry. Je te dirai là-bas.
    Ils galopèrent jusqu’au chêne ; l’écuyer, les voyant venir ainsi, leur cria de loin :
    — Vous l’avez retrouvée ?
    Pied à terre. Mouvement des bras fatigués :
    — Je l’ai trouvée… Morte.
    — Morte ! s’exclama Thierry.
    Ogier ne vit que Raymond. Son visage lourd, broussailleux, strié de lignes d’âpreté ; ses yeux sombres ; sa bouche retroussée sur ses dents solides. Un veautre prêt à mordre et même à dépecer. Il était resté en selle.
    — S’il lui est arrivé pareil malheur…
    Le sergent se ravisa, mais Ogier se sentit accusé.
    — Malheur à ceux qui ont fait ça !
    — Prends tous les chevaux, Thierry. Gagne lentement la berge et attends-nous. Il nous faut trouver un lieu pour l’enterrer… Nous ne pouvons faire autrement.
    — La terre est molle, messire, avec toute cette pluie… Mais nous n’avons rien pour creuser…
    — Il y a des pelles, dit Raymond. J’en ai vu. Où faut-il vous rejoindre ?
    — Tu vois ces deux peupliers, là-bas ? Tu descendras et tourneras à senestre. Toi, Thierry, pendant ce temps-là, tu feras le guet. Ensuite, nous reviendrons à Morthemer.
    — Va falloir que je la venge ! grogna Raymond.
    — Et comment ? dit Ogier sans fureur ni pitié pour ce chagrin immodéré. On ne sait rien… Tu m’en veux, mais sache que je me déteste !
    Il ne savait qu’ajouter. Adelis ne le quittait pas. Ses yeux graves, sa bouche si fraîche au bord de la mer, et dont il méconnaîtrait désormais la saveur ; sa voix rarement enjouée, sauf lorsqu’elle l’appelait « mon frère »… Que

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