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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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suis dame Géralde, l’épouse de Guy de Morthemer. Ne vous voyant pas revenir, j’avais… je veux dire nous avions grande inquiétude.
    Ogier s’inclina une fois encore. Sans émoi, il avait reconnu la voix de sa visiteuse nocturne.
    — À son retour de Chauvigny où il avait accompagné le comte d’Alençon et sa suite, Leignes est allé rapporter à mon époux, en présence de ma nièce, des choses déplaisantes à votre égard… Je suis descendue afin de vous en avertir.
    — En vérité, dame, c’est un jour funeste.
    Ogier fut indifférent à l’œillade qu’elle lui adressa, bien qu’il l’eût trouvée prometteuse ; et comme, retroussant sa jupe, la châtelaine enjambait la première marche de l’escalier, elle dit à mi-voix, sans se retourner :
    — Je viendrai cette nuit.
    — N’en faites rien.
    Ogier vit le dos penché tressaillir, comme cinglé d’un coup de fouet. La robe retomba ; le pied pesa sur la seconde marche, marquant ainsi l’arrondi du fessier.
    — Dame, sachez que vos égards m’honorent, mais…
    Il allait s’embrelicoquer dans des excuses lorsqu’une ombre tomba sur eux. Du sommet des degrés, Isabelle les observait. Il se pouvait qu’elle les eût entendus.
    — Ainsi, vous voilà, messire Fenouillet !
    L’accent était criard, méprisant.
    — Holà ! protesta Ogier. On dirait une femme accueillant son époux attardé.
    La jouvencelle serrait frileusement le col d’un pelisson noir :
    — Il paraît que dans une hôtellerie de Chauvigny où s’en vont gargoter manants et truandaille, vous avez provoqué une mêlée afin d’y commettre au couteau une action des plus viles !
    Ogier en demeura ébahi :
    — Une mêlée, moi  ?… Une action des plus viles ?
    Il songeait : « Ramonnet, mort de ma main, n’est pas en cause. Leignes a dû lui conter la fin de Kergœt à sa façon. Pour me préjudicier, il m’impute ce meurtre… Et elle le croit ! La voilà tout affligée… Par ma foi, cette douleur la rend folle… Pourquoi tant de désespérance ? » Il s’y perdait.
    Devançant la dame de Morthemer en l’effleurant au passage, ce dont l’hypocrite parut contrariée, il parvint sur le seuil de la grand-salle éclairé par une torche crépitante. La bouche pincée, l’œil fixe et sauvagement gris, Isabelle s’apprêtait à le vitupérer encore ; la baronne s’interposa :
    — Ma nièce, messire, est mauvaisement agitée… Il paraît que vous avez occis un homme en le frappant dans le dos… Elle qui vous croyait si… Ah ! je ne sais que dire… Alors, comprenez sa déconvenue…
    Il s’agissait bien de Kergœt, et Leignes avait pu porter ce coup mortel : furieux d’être privé de la nudité d’Hérodiade tant à cause de l’avarice du Breton que de l’esclandre provoqué par le « châtiment » d’Apolline, le sergent s’était revanché perfidement.
    « C’est par jalousie à mon égard qu’il a fait accroire à cette écervelée que j’ai donné ce coup de lame. Et elle a avalé pareil mensonge alors qu’elle m’a dit vomir ce malfaisant au point de me demander de l’occire ! »
    Bras croisés, Ogier se contint :
    — C’est vraiment me déprécier, nobles dames, de penser que j’aie pu meurtrir quelqu’un aussi bassement. Ou votre nièce, baronne, malgré ce que j’ai fait pour elle, a de moi une opinion dont je suis bien contristé, ou la mort de ce chevalier – car c’était un chevalier de Bretagne – lui a troublé l’esprit !
    Disant cela, il défiait Isabelle au visage blême, glacé, entre les retombées des cheveux sombres dont les pointes se courbaient comme des hameçons au toucher du pelisson noir… Pourquoi ce vêtement funèbre ? Elle ne pouvait porter le deuil de Kergœt.
    — Leignes vous a-t-il fourni le nom de cet homme ?
    Nulle réponse. Ogier soupira. Il achoppait sur quelque chose. Cette fille lui paraissait plus secrète encore qu’il ne l’avait imaginée. Ses yeux emperlés, ses sourcils froncés, ses mains demi-fermées amenées devant sa poitrine, non pour la protéger mais pour se regimber en quelques coups de griffes, exprimaient une rancune, une détresse démesurées.
    — Damoiselle, je n’ai rien à me reprocher pour ce trépas dont j’éprouve, ne vous déplaise, de la tristesse.
    L’homme se faisait appeler Enguerrand de Briatexte. Son vrai nom, c’était Jaquelin de Kergœt.
    Le visage de la jouvencelle s’abaissa, se soustrayant tout entier aux

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