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Les fontaines de sang

Les fontaines de sang

Titel: Les fontaines de sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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le moine.
    Cela lui évitait sans doute d’insister pour qu’on l’hébergeât.
    –  Frère Isambert !… L’ancien chapelain de cette demeure d’où il a fui il y a longtemps.
    Tristan et les soudoyers s’inclinèrent. Tiercelet et Paindorge se touchèrent du coude, ce qui signifiait, sans doute : « On n’avait pas besoin de lui. » Quesnel souriait d’un sourire angélique – du moins le croyait-il – et les frères Lemosquet, le pont- levis dressé, rapportaient, Yvain le bissac vide et Jean le bourdon.
    – Comment aurais-je pu imaginer, mon père, que vous reviendriez en des lieux que vous avez abandonnés un jour sans vergogne, la peur au ventre, certes, mais sans souci du sort de vos ouailles ?
    – Ogier ! Ogier !… Mon fils, ne te courrouce pas. N’aggrave pas à coups de mots cruels un repentir bien sincère… Il est vrai que j’ai déguerpi comme un couard. Je n’ai jamais prétendu égaler ton courage ni celui de ton père. Quand Richard de Blainville s’est montré menaçant, j’ai voulu me soustraire à sa méchanceté…
    – Sans penser qu’un jour détestable, vous tomberiez sous son obédience.
    – Dieu l’a voulu. Si je n’avais pas figuré parmi tes ennemis comme l’agneau parmi des loups, jamais tu ne serais sorti vivant de l’ergastule du château d’Angle où ils t’avaient verrouillé !
    Tristan vit le sourire de son beau-père se muer en grimace.
    – Je vous en rends grâce, saint homme. Effectivement, je vous dois d’être sauf. Godefroy d’Harcourt m’a visité et remis le crucifix que vous lui aviez confié. C’était un poignard dont les quillons formaient la traverse de la Croix et le portant, la gaine. J’ai occis mon gardien et me suis enfui avec un Goddon : Hugh Calveley. Nous nous devons mutuellement d’être en vie. Sans votre crucifix, j’étais un homme mort. J’en ai fait don aux moines de Hambye.
    – Je sais… J’y ai séjourné quatre jours. Ensuite, je suis parti pour Coutances. On m’a dit que bien que dévo lue au roi de Navarre par le traité de Mantes, la cité -ou plutôt sa bonne gent – a voulu demeurer au duc de Normandie et au roi de France. J’y ai passé deux jours et deux nuits car Monseigneur d’Erquery m’a fait héberger dans une maison voisine de l’évêché… Ah ! Tu ne peux savoir avec quelle sorte d’ivresse j’ai revu, quand je suis arrivé, les tours de la basilique…
    Le moine riait, maintenant, et son pas s’allégeait tandis qu’il se dirigeait vers le logis seigneurial dont il poussa la porte en habitué tout en s’exclamant :
    – Dame Luciane !
    Il prit la jeune femme ébaubie dans ses bras, la baisa sur les joues et se rendit compte de sa méprise :
    – Vous n’êtes pas…
    Ogier d’Argouges tapota l’épaule de cet homme usé par l’âge et la fatigue, et qui semblait soudain revigoré :
    – Ce n’est point ma défunte mère, tout de même !… Cependant, vous n’avez commis qu’une moitié d’erreur, car ma fille porte son nom.
    Le clerc fit un pas en arrière :
    – Ta fille !
    Luciane souriait tout en éloignant de l’index quelques cheveux qui, sous la forte étreinte du moine, s’étaient accrochés à ses sourcils. « Quel est ce fol ? » se demandait-elle. Et ses paupières d’un blanc diamanté cillaient tandis qu’elle dévisageait le visiteur avec une indulgence qui se doublait d’un plaisir rare : il l’avait prise pour sa mère qu’il avait connue jeune – sans doute lorsqu’elle avait son âge.
    Guillemette apparut. Frère Isambert ne la reconnut pas. Cependant, lorsqu’elle eut dit son nom, il l’empoigna aux épaules et commença de sangloter.
    – La petite Guillemette !… La drôlesse qui ne savait pas ses Pater !
    Toute la mesnie assemblée observait ce moine éploré dont la circonspection s’était dissoute. S’il s’était pré tendu mourant ou sur le point de rendre son âme à Dieu, il faisait montre, dorénavant, d’une vitalité singulière.
    –  D’où venez-vous ainsi ? demanda Thierry.
    – D’Espagne, mon fils.
    – Tout seul et à pied ! se merveilla Paindorge.
    Le prêtre se signa promptement. Sa bouche lippue s’affaissa :
    – Non. Deux frères me compagnaient. Nous avions des mules.
    – D’où êtes-vous partis ?
    – Calahorra, Ogier.
    – N’est-ce pas dans cette cité que Robert Le Coq a trouvé refuge ?
    – Si, mon fils.
    – Étiez-vous avec lui ? s’informa

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