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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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chariots, les drapeaux rouges à croix de
Saint-André et les canons du roi d’Espagne, bref, voir les troupes ennemies de
leur pays défiler avec les Condéens quand le roi de France ne pouvait pénétrer
en sa capitale, cela leur levait le cœur.
    Mais si les minorités de réprobation ne peuvent,
sur l’instant, changer le cours des choses, du moins sauvent-elles l’honneur et
préparent-elles l’avenir.
    Le roi, très sombre, rentrait à Saint-Denis
avec une armée victorieuse… mais sans victoire.
    Mazarin savait que son plus grand ennemi
tenait à présent la capitale.
    Les maréchaux et généraux allaient tête basse,
le cœur rongé d’amertume.
    Les officiers et soldats qui avaient perdu
deux mille des leurs et deux fois plus de blessés ne parlaient guère.
    À la même heure, Charlotte de La
Ferté-Sheffair, duchesse de Luègue, arrivait en terre de Saintonge. Elle
pensait au marquis de Dautricourt et par instants au comte de Nissac, à ce
visage creusé de fatigue, à ces paupières légèrement tombantes qui lui
donnaient charme supplémentaire comme son expression parfois douloureuse lorsqu’il
pensait qu’on ne le regardait point.
    Elle se demandait si elle pourrait jamais
cesser d’aimer un tel homme, à tout le moins de lui conserver une part secrète
de son cœur.
    L’Écorcheur se
trouvait chez lui, comme tous les chefs de la Fronde.
    Il contemplait en des bocaux six têtes de
femmes nageant en un liquide qui les préservait de toute corruption. Il
observait ces bouches qu’il avait forcées et ces yeux ouverts sur l’horreur.
    Il sourit puis murmura :
    — Mes petites !… Mes chères petites !…
    Il avait installé les six têtes en son autel
secret, rouge feu sur un fond d’un noir charbonneux. Six têtes, qu’était-ce
quand, en cette journée de combats épuisants et haineux, on relevait des
milliers de morts, et certains de la plus haute noblesse ?
    Ces femmes, ses femmes !
    Il regarda les têtes une à une, puis leur
parla :
    — M’en avez-vous donné, du plaisir !…
Et ne vous ai-je point aimées à la manière qui est mienne ?… Que vous
aurait donné la vie ?… Des maris brutaux sans connaissance de l’amour, l’altération
prématurée de vos adorables traits ?… Non, vous avez quitté la vie en
pleine beauté, belles à tout jamais, sans qu’il vous manquât une dent, sans qu’un
cheveu blanc gâchât vos coiffures, sans que vous fût jamais venue l’ombre d’une
ride !
    Son regard tomba sur la statuette où la femme
brune dont il savait à présent le nom, madame de Santheuil, lui coupait le sexe.
    Il caressa les cheveux noirs, la poitrine de
beau maintien, les jolies fesses rondes :
    — Je t’aurai, toi aussi !… Toi
surtout !… Tu seras peut-être la dernière, mais je t’aurai !…
    Il soupira.
    Il savait comment s’y prendre.
    Mais, avant tout, il fallait se débarrasser du
marquis Jehan d’Almaric. Celui-là connaissait beaucoup trop de choses et en
outre, lors de son récent et cuisant échec, il l’avait dangereusement exposé à
une infamante capture.
    N’aurait-il tué de sa main ce baron colonel
des gendarmes de la maison militaire du roi, c’en était fait de lui !
    La peur, un instant revenue, s’estompa.
    Par chance, d’Almaric avait tout de même eu l’excellente
idée de brûler le carrosse et nul ne pourrait y relever ses armoiries.
    Mais un autre homme était entré en ces
affaires d’Écorcheur. Un homme dont personne ne se méfiait. Un homme calme, de
grand sang-froid, de parfaite intelligence et qui avait besoin d’or, cet or qui
sans doute soutiendrait son ambition.
    Oui, un homme nouveau en cette vieille affaire,
un esprit clair qui, après la chaude affaire d’Auteuil, avait tué les quatre
mousquetaires survivants afin qu’ils ne livrent jamais renseignements à tous
ces policiers fureteurs. Car l’un de ces quatre mousquetaires, qui chevauchait
à l’écart des autres, l’avait vu, et reconnu !
    Cet homme nouveau en avait pris l’engagement, il
lui livrerait la baronne Mathilde de Santheuil. Attendri, l’Écorcheur imagina
sa belle captive en frottant ses doigts comme les mouches font de leurs pattes.
    Il caressa la poitrine de la statuette et d’un
ton paresseux où perçait la volupté des instants à venir, il murmura :
    — Belle Mathilde, j’entourerai mon corps
de ta peau fine et tu me regarderas faire depuis ton bocal !
    Puis il rit. Et enfin pleura.

75
    L’opération ne

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