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Les galères de l'orfêvre

Les galères de l'orfêvre

Titel: Les galères de l'orfêvre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Christophe Duchon-Doris
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de Montmor en lissant le soyeux de son pourpoint, m’a honoré de sa confiance et m’a informé de ses découvertes. Intendant général des galères, j’ai mené ma petite enquête et j’ai une certaine idée sur la question que ne partage pas M. de Chabas.
    — Je vous remercie de vos efforts, dit le conseiller du Roi. Mais vous avez reconnu vous-même que le monde de la chiourme est un monde impénétrable et qu’il vous faudrait mettre en branle une armée bien considérable d’informateurs pour en démonter les rouages. Or la prudence s’impose. Les complicités que j’évoquais nous obligent à la plus grande discrétion. Il nous faut avancer masqués. Moins de personnes seront informées de notre démarche et plus nous aurons de chances de réussir. Nous étions quelque peu dans l’impasse, quand la Providence vous a mis sur notre chemin.
    Guillaume était sur la défensive. Il cherchait à comprendre la logique de tout cela, mais la fatigue de sa nuit blanche lui embrumait le cerveau. Dans l’âtre, les grandes flammes continuaient à mener leur danse au bruit craquant du bois. Des étincelles venaient allumer sur les rayons de la bibliothèque les reliures damasquinées des ouvrages.
    — Vous avez beaucoup de qualités, monsieur de Lautaret, poursuivit le conseiller du Roi. Vous êtes intelligent et brave et vous avez montré en de multiples circonstances votre fidélité sans faille à Sa Majesté. Puisque les circonstances – la Providence, disais-je – vous ont conduit à vous mêler de cette histoire et à tenter de la déchiffrer à demi, j’ai décidé, avec l’accord de M. de Montmor…
    L’intendant général fit une curieuse grimace mais il s’inclina légèrement pour appuyer ce qui venait d’être dit. Guillaume comprit que M. de Montmor n’avait consenti qu’avec beaucoup de réticence à ce qui allait suivre.
    — … décidé, disais-je, de vous associer pleinement à notre mission. Vous êtes prêt à tout, écrivez-vous, pour arrêter l’assassin de Mme de Saintonges ? Nous allons vous en donner les moyens.
    Guillaume était plus que jamais sur ses gardes. Il n’accorda à M. de Chabas qu’un pâle sourire.
    — Je vous remercie grandement de votre confiance, monsieur. Qu’attendez-vous de moi ?
    — Nous n’avons pas le choix, dit le conseiller. Il nous faut nous introduire au coeur même de l’arsenal des galères afin d’en étudier les secrètes mécaniques, de débusquer les réseaux, les alliances, d’identifier les seigneurs et les vassaux et de découvrir le nom de celui qui manigance tout cela. Vous serez notre espion, notre cheval de Troie !
    — Vous voulez m’envoyer aux galères ?
    Guillaume partit dans un grand éclat de rire qui fit vibrer les vitres de la bibliothèque. M. de Chabas tapotait d’un doigt nerveux l’accoudoir de son fauteuil. M. de Montmor plissait ses yeux de chat en se lissant la moustache.
    — Qui d’autre que vous ? demanda M. de Chabas.
    Le jeune procureur les regarda longuement l’un et l’autre. Ils se taisaient maintenant, concentrés, dans l’attente des questions qui ne manqueraient pas de venir.
    — Je connais sans doute moins que vous le monde des galères, dit Guillaume en se tournant vers M. de Montmor, mais lorsque j’étais procureur à Grenoble, il m’est arrivé de m’intéresser d’assez près au passage de la chaîne. Assez pour n’avoir aucune illusion sur mes chances de survie dans un tel milieu.
    — Nous avons tout prévu, répondit l’intendant général d’un ton départi de passion. Ce ne sera l’affaire que de quelques semaines. Vous rejoindrez la chaîne dans deux jours. Vous aurez pour compagnon d’entraves un dénommé Lapardula, ancien galérien du Ponant, qui travaille aujourd’hui pour nous et qui sera en charge de votre protection. Il sait comment nous joindre, à tout moment, et arrêter l’opération si d’aventure elle tourne mal. Une fois que vous serez à Marseille, j’entrerai en relation avec vous et nous déciderons de concert de la date d’achèvement de votre mission.
    — Je serais en droit de refuser, dit Guillaume sur la défensive. Sa Majesté elle-même comprendrait que…
    — Il est temps de répondre à votre première question, le coupa sèchement M. de Chabas. Vous vouliez savoir ce qui s’est passé hier soir ? C’est d’une grande simplicité : vous avez tué un sous-officier de la Ferme générale, aidant par là un dangereux faux

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