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Les grandes dames de la Renaissance

Les grandes dames de la Renaissance

Titel: Les grandes dames de la Renaissance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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s’amusait à s’écrier : o tempora, o mores, si l’on faisait l’étonné et le surpris, on passerait justement pour un étranger dans le monde, car on admirerait comme quelque chose d’extraordinaire, ce qui a toujours été commun, et qui l’est encore, et qui, selon toutes apparences, le sera jusqu’à la fin du monde. »
    Après cette prophétie, que la plupart de nos hommes politiques se font quotidiennement un plaisir de réaliser, Bayle concluait : « Ce qui console les esprits chagrins là-dessus, c’est que ces coquettes sont fort exposées aux jeux de la bascule… » Il faut reconnaître que, pour l’heure, la duchesse d’Étampes avait une position fort stable. Sûre de sa puissance sur le roi, elle savait qu’elle pouvait absolument tout entreprendre. Alors, elle décida d’empêcher Diane de Poitiers d’être un jour sa remplaçante, c’est-à-dire la favorite du futur roi de France.
    Pour cela, il fallait ou faire déshériter le dauphin, ce qui était impensable, ou bien créer tout de suite des difficultés capables de le gêner le jour de son accession au trône. La duchesse choisit cette solution et imagina de faire épouser au jeune prince Charles, âgé de seize ans, dernier fils de François I er , une des filles de Charles Quint, avec le Milanais ou les Pays-Bas pour dot.
    La guerre des dames prenait subitement un tour violent et fort dangereux pour le royaume des lys…
    En effet, si elle réussissait son coup, la duchesse d’Étampes plaçait, au jour de la mort de François I er , le dauphin face à face avec un frère puissant qui pouvait réclamer la couronne de France et provoquer une guerre civile…
    Mais la duchesse d’Étampes ne voyait que ses avantages dans l’opération, c’est-à-dire, avant tout, l’éviction de Diane et la possibilité d’une retraite confortable à Milan ou à Amsterdam après la mort du roi [137] …
    Pour arriver à ses fins et rendre intéressant le jeune Charles aux yeux de l’Europe, la duchesse lui fit donner les plus brillants emplois, alors qu’elle limitait autant qu’il lui était possible la gloire du dauphin.
    François I er suivait ses conseils aveuglément.
    Tourmenté par une érotomanie qui tournait à l’obsession, il ne soupçonna même pas l’existence de ces manœuvres. D’ailleurs, rien ne l’intéressait que la recherche des plaisirs pervers : un jour, il emmena les plus gracieuses coquettes de la Cour assister, dans la forêt de Saint-Germain, à l’accouplement des cerfs, se plaisant à souligner d’un mot, d’ailleurs inutile, chaque épisode de la « nuit de noces » de ces braves animaux…
    Une autre fois qu’il se trouvait en compagnie de joyeux viveurs de sa trempe, il ordonna que de très grandes dames assistassent au dîner qu’il offrait complètement dévêtues.
    Étranges distractions qui occupaient – si j’ose dire – tout son esprit.
     
    M me  d’Étampes en était là de ces intrigues lorsque, en août 1538, une véritable bombe éclata au palais. On apprenait que le dauphin venait d’avoir un enfant – une fille – d’une jeune Piémontaise nommée Philippa Duc, rencontrée à l’automne précédent, pendant la campagne italienne.
    Cette nouvelle allait-elle changer tous les plans de la duchesse ? Elle le pensa un moment, espérant que Philippa deviendrait maîtresse en titre. Mais on apprit bientôt tous les détails sur cette aventure piémontaise, et M me  d’Étampes, comprenant que Diane de Poitiers ne risquait point d’être remplacée par une autre favorite, travailla de plus belle à l’accomplissement de ses desseins.
    C’est à Montcaillier, en Piémont, que Henri avait rencontré la jeune fille. Porté à l’exubérance par la présence des soldats qui l’accompagnaient, il s’était laissé aller à la violence et y avait pris un savoureux plaisir.
    Neuf mois plus tard, en ce début d’août 1538, Philippa Duc lui faisait savoir qu’il était le père d’une jolie petite fille et le priait de s’en occuper, « pour ce que j’entre à vie dans un couvent, écrivait-elle, afin d’y expier ma faute… ».
    Le dauphin eut donc bientôt un bébé à dorloter devant sa femme et sa maîtresse, toutes deux fort mécontentes [138] .
    Pourtant, ni l’une ni l’autre ne lui firent de scènes. Elles savaient ce que c’était qu’un soldat en campagne…
    D’ailleurs, seule, la grande sénéchale eût pu se risquer à émettre un reproche,

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