Les héritiers
n’en connaissons.
— Voyons, elle n’est pas si naïve !
Tous les deux quittèrent le cabinet. En revenant vers le salon, Elise déclara :
— Je vous souhaite bonne nuit à tous les deux. Je suis chanceuse de vous avoir. Toutefois, je vous en prie, ne cherchez pas à me présenter des hommes esseulés avant que je ne sois prête.
Après une bise { chacun d’eux, elle se dirigea vers la chambre de ses enfants.
*****
Élisabeth se présenta chez le jeune notaire Dupire en début d’après-midi. Au premier coup de sonnette, Jeanne vint lui ouvrir la porte.
— Bonjour, madame.
— Bonjour. Je viens rencontrer votre employeur.
— Vous avez le temps de vous asseoir un instant au salon, il est occupé. Désirez-vous quelque chose à boire ? Je préparais du thé.
— Je ne sais pas si je peux. .
La domestique lui adressa son meilleur sourire en répondant :
— Je ne l’offrirais pas { un client habituel. Mais vous êtes sa belle-mère, et mon ancienne patronne.
— Dans ce cas, je veux bien.
Quelques minutes plus tard, elle tenait sa tasse près de sa bouche, soufflait dessus légèrement pour refroidir un peu son thé. Fernand se présenta bientôt à elle en disant:
— Je suis désolé de vous avoir fait attendre.
— Comme vous pouvez le voir, on s’est très bien occupé de moi.
— J’aimerais mieux vous recevoir ici, dans cette pièce, cela conviendrait mieux pour une parente, mais par souci de discrétion. .
La veuve, tout comme son hôte, souhaitait par-dessus tout éviter de voir surgir Eugénie devant eux. Le notaire se pencha pour prendre le plateau sur une table basse.
— Apportez votre tasse.
— Je suis gênée. .
— Ne vous inquiétez pas, Jeanne s’est aussi occupée de moi.
Ils se retrouvèrent dans le grand bureau de l’ancien maître de la maison. Bientôt, des ouvriers viendraient commencer les
travaux
de
réaménagement
du
rez-de-chaussée.
A la réflexion, l’homme inclinait maintenant pour la construction d’une nouvelle pièce { l’arrière. La «rallonge»
n’aurait rien d’élégant, mais la nécessité de devoir bientôt s’adjoindre un clerc le forçait { cette solution plus ambitieuse.
Après avoir évoqué la santé de ses trois enfants avec sa belle-mère, le notaire demanda :
— Vos projets évoluent dans le bon sens ?
— J’ai encore une fois passé la matinée rue Sainte-Geneviève. Non seulement l’entrepreneur en construction que vous m’avez recommandé m’assure qu’aucune mauvaise surprise ne me tombera dessus, mais il a produit une estimation du coût de quelques travaux dans mes futurs quartiers.
Elle marqua une pause, puis demanda :
— De votre côté, quelles sont vos conclusions ?
— Les livres de cette pension me paraissent en ordre.
Le profit permettrait certainement à un couple, ou à une personne seule, de subvenir à ses besoins.
Ce fut au notaire de s’arrêter un moment. Il usa de précautions avant de poursuivre :
— Depuis que je vous connais, j’ai apprécié votre gentillesse, votre respect.
— Vous m’avez toujours paru mériter l’un et l’autre.
Mon mari partageait la même opinion, soyez-en assuré.
— Ce sentiment ne fut pas partagé par tous les membres de la maisonnée, malheureusement.
Après un rire bref, chargé de dépit, il ajouta :
— Et j’ai marié celle de vos parentes qui ne le partageait pas, justement. La vie nous réserve parfois d’étranges situations.
L’homme retrouva sa sérénité au moment de poursuivre son exposé.
— Je vous parlerai donc en ami, en souvenir de nos bonnes relations. Vous pourriez sans doute vivre dans l’aisance jusqu’{ la fin de votre vie sans travailler. Chez Edouard, cela ne fait pas de doute.
— Des raisons personnelles me font préférer aller habiter ailleurs.
— Même dans un appartement situé dans la Haute-Ville, vous vous en tireriez sans mal, je crois.
Elisabeth répondit d’un sourire.
— D’abord, je ne me vois pas demeurer inactive pendant les années à venir, admit-elle. Puis à ma place, prendriez-vous le risque? L’économie connaît des {-coups. Voyez comment les prix ont monté rapidement ces dernières années, pour descendre maintenant.
— Vous avez raison, on ne peut jurer de rien. Dans les circonstances, cette maison me paraît un bon investissement.
— Susceptible de me faire vivre ?
L’homme lui répondit d’un sourire d’abord, puis il lui tendit le rapport de son examen des
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