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Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789

Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789

Titel: Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Alfred (de) Janzé
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ne manquerez pas d’eau ».
    Louis de Marolles, bien que le conducteur de
la chaîne se fût montré pitoyable envers lui et l’eût voituré, soit
en bateau, soit en charrette, arriva demi-mort à Marseille.
Tourmenté par la fièvre pendant les deux mois qu’avait duré le
voyage, il lui avait fallu, sur le bateau « coucher sur les
planches, sans paille sous lui et son chapeau pour chevet »,
ou en charrette « être brouetté jusqu’à quatorze heures par
jour et accablé de cahots, car tous ces chemins-là ne sont que
cailloux. » « C’est une chose pitoyable, dit-il en
arrivant à Marseille, que de voir ma maigreur ! »
Cependant on le mène à la galère où on l’enchaîne ; mais un
officier, touché de compassion, le fait visiter par un chirurgien
et il est envoyé à l’hôpital où il reste six semaines. Bien des
malheureux forçats, une fois entrés à l’hôpital, n’en sortaient
plus que pour être enfouis tout nus dans le cimetière des esclaves
turcs, comme les bêtes mortes qu’on jette à la voirie. Ainsi, le
forçat huguenot Mauru étant mort à l’hôpital, ses compagnons lui
avaient fait une bière et l’y avaient enfermé ; mais,
l’aumônier des galères trouvant que c’était faire trop d’honneur à
un hérétique, fit déclouer la bière et le corps fut jeté à la
voirie.
    Quand la chaîne arrivait à Marseille, elle
était bien allégée, les privations, la fatigue et les mauvais
traitements après quelques semaines de route, ayant fait succomber
les moins robustes des condamnés. Le conducteur de la chaîne,
chaque fois qu’il perdait un de ceux qu’il était chargé d’amener au
bagne, en était quitte pour demander au curé du lieu le plus
prochain, une attestation du décès qu’il devait fournir, à la place
de celui qu’il ne pouvait plus représenter vivant. Ainsi, sur une
chaîne de cinquante condamnés partis de Metz, cinq étaient morts le
premier jour et bien d’autres moururent en route.
    Le galérien huguenot Espinay écrit :
« Nous arrivâmes mardi à Marseille au nombre de quatre cent
un, y en ayant de morts en route par les maladies ou mauvais
traitements une cinquantaine ». « Il arriva ici, écrit
Louis de Marolles, une chaîne de cent cinquante hommes, au
commencement du mois dernier, sans compter
trente-trois qui
moururent en chemin
. » Quant à Marteilhe, après avoir
constaté que beaucoup de ses compagnons de chaîne étaient morts en
route, il ajoute : « il y en avait peu qui ne fussent
malades, dont divers moururent à l’hôpital de Marseille ».
    Un jour on écrit de Marseille à Colbert :
« Les deux dernières chaînes que nous venons de recevoir sont
arrivées plus faibles, par suite des mauvais traitements de ceux
qui les conduisent, la dernière, de Guyenne, outre la perte qui
s’est faite dans la route… est venue si ruinée, qu’une partie a
péri ici entièrement et l’autre ne vaut guère mieux. »
    Un autre jour ; l’intendant chargé de
recevoir à Lyon, les chaînes en destination de Toulon, lui
dit : que sur quatre-vingt-seize hommes d’une chaîne,
trente-trois sont morts en route et depuis leur arrivée à Lyon. Que
sur les trente-six restant, il y en a une vingtaine de malades,
qu’il garde cette chaîne quelques jours à Lyon, à cause du grand
nombre de malades et de la lassitude des autres. Quand la chaîne se
remit en route pour Toulon, elle ne comptait plus que trente-deux
hommes, huit forçats étaient morts pendant ce
rafraîchissement

    C’étaient encore les plus heureux que ceux qui
mouraient au seuil de l’enfer des galères, car ceux qui le
franchissaient, mal nourris, accablés de fatigue et cruellement
maltraités, avaient à souffrir mille morts avant que leurs corps
épuisés et déchirés, fussent jetés à la voirie, voici, en effet, ce
qu’était, suivant une lettre de l’amiral Baudin, le régime des
galères au temps de Louis XIV :
    « Le régime des galères était alors
excessivement dur, c’est ce qui explique l’énorme proportion de la
mortalité par rapport aux chiffres des condamnations. Les galériens
étaient enchaînés deux à deux sur les bancs des galères, et ils y
étaient employés à faire mouvoir de longues et lourdes rames,
service excessivement pénible. Dans l’axe de chaque galère, et au
milieu de l’espace occupé par les bancs des rameurs, régnait une
espèce de galerie appelée la coursive (ou le coursier), sur
laquelle se

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