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Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789

Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789

Titel: Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Alfred (de) Janzé
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femmes
et enfants, dans la rivière, laissant aux chiens affamés et aux
fauves le soin de faire disparaître les cadavres.
    Les camisards, refoulés dans leurs montagnes,
avaient bien de la peine à vivre avec le blé que la charité des
paysans leur fournissait et qu’ils cachaient dans des cavernes.
« Notre état, dit Bonbonnoux, devenait tous les jours plus
triste et plus désolant. L’ennemi avait renfermé toutes les denrées
dans les villes ou dans les bourgs murés, renversé les fours de
campagne, mis les moulins hors d’état de moudre, obligé le paysan
qui travaillait dehors de prendre le pain par poids et mesure,
crainte qu’il ne nous en fournît quelque peu. Ainsi, nous avions
toutes les peines imaginables pour trouver seulement ce qui était
le plus pressant et le plus nécessaire pour subsister. Nous
faisions fabriquer de ces fers qui sont entre les deux meules du
moulin et que l’ennemi avait enlevés, nous faisions rebâtir les
fours qu’on avait démolis, et nous les démolissions de nouveau pour
n’être pas découverts. »
    Ne pouvant venir à bout, par la force des
armes, de ces terribles Cévenols aussi insoucieux de la mort sur
les champs de bataille que sur le bûcher ou sur la roue, il avait
fallu se résoudre à faire le désert autour d’eux, afin qu’ils
fussent réduits à mourir de faim au milieu des montagnes sauvages
et désolées où ils avaient été refoulés.
    Quant aux chefs ou prophètes, c’était toujours
par la trahison que l’on finissait par avoir raison d’eux. Bâville
écrit, en 1700, à l’occasion de la prise du prophète Daniel Raoul
et de trois prédicants que lui avait livrés un faux frère, gagné à
prix d’argent : « On ne peut jamais prendre ces sortes de
gens-là autrement, et toutes les forces du monde ne servent de
rien, parce qu’ils ont des retraites assurées. Il faut, pour de
l’argent, trouver quelqu’un de ceux qui les suivent, qui les
découvre et les livre. » Ce n’est point par la force des armes
que le maréchal de Villars vint à bout de l’insurrection
cévenole ; par de vaines promesses, n’ayant pour garantie que
la parole du roi – garantie dont on a vu plus haut le peu de
valeur, il parvint à priver les révoltés de leur plus brillant
capitaine, Cavalier. – Roland, ce grand organisateur de
l’insurrection, ne s’étant pas laissé abuser par de trompeuses
négociations, parce qu’il exigeait, non de vaines promesses, mais
des actes, le maréchal de Villars, se fit livrer par un traître le
chef qui était l’âme de la révolte, mais il ne l’eut pas vivant,
Roland se fit tuer.
    Voici le portrait que Peyrat, dans son
Histoire des Pasteurs du désert, fait de Cavalier et de Roland, les
deux grandes figures légendaires de l’insurrection des
Cévennes :
    Roland Laporte, général des enfants de Dieu,
pâtre cévenol, unissait à l’indomptable ténacité de Coligny
l’habile et sombre enthousiasme de Cromwell. S’emparant de cet
orageux élément de l’extase, il en fit le fondement et la règle
d’une insurrection qu’il organisa, nourrit, vêtit, abrita,
entretint deux ans au désert, malgré la fureur des hommes et des
saisons ; lutta avec trois mille combattants contre des
populations hostiles, soixante mille ennemis armés, les maréchaux
de Louis XIV, et ne fut enfin abattu que par la défection, la
trahison et la mort. Quel homme plus obscur sut, avec de plus
faibles moyens, tenter avec plus d’énergie un effort
gigantesque ? Car, l’insurrection, créée par lui, morte avec
lui, c’était lui-même. Il en était l’intelligence, l’âme. Mais,
s’il en fut la tête, Cavalier, il faut le dire, en fut le bras et
la plus vaillante épée.
    Roland n’avait point cet élan, cette fougue
aventureuse, inspirée, cette bravoure téméraire et chevaleresque
qui, jointe aux charmes de l’adolescence, font de Cavalier la plus
gracieuse et la plus héroïque figure du désert… Roland, fait
observer Peyrat, périt la veille de la bataille d’Hoschstet, et
l’année qui précéda les grands désastres de Louis XIV ; s’il
eut encore vécu qu’eût-il fait alors ?
    Ce chef formidable, grandissant de la ruine du
monarque, lui eût sans doute imposé le rétablissement de l’édit de
Nantes, il eût rouvert les portes de la France à cinq cent mille
exilés, et, les réunissant sur la frontière, il leur eût dit :
« maintenant défendons la patrie, notre mère repentante

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