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Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789

Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789

Titel: Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Alfred (de) Janzé
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jusqu’à la
mort.
    Voici la navrante description de ce supplice
de la bastonnade faite par le galérien huguenot Marteilhe :
« On fait dépouiller tout nu, de la ceinture en haut, le
malheureux qui doit recevoir la bastonnade. On lui fait mettre le
ventre sur le coursier (galerie étroite et élevée placée au milieu
de la galère), les jambes pendantes dans son banc et ses deux bras
dans le banc à l’opposite. On lui fait tenir les jambes par deux
forçats, et les deux bras par deux autres et le dos en haut et tout
à découvert et sans chemise. Le comité (chef de la chiourme) est
derrière lui qui frappe sur un robuste Turc
pour animer
celui-ci à frapper de toutes ses forces avec une grosse corde sur
le dos du pauvre patient. Ce Turc est aussi tout nu et sans
chemise, et comme il sait qu’il n’y aurait pas de ménagement pour
lui s’il épargnait le moins du monde le pauvre misérable qu’on
châtie avec tant de cruauté, il applique ses coups de toutes ses
forces, de sorte que chaque coup qu’il donne fait une contusion qui
est élevée
d’un pouce
. Rarement un de ceux qui sont
condamnés à un pareil supplice en peut-il supporter dix à douze
coups
sans perdre la parole et le mouvement ;
cela
n’empêche pas que l’on continue à frapper sur ce pauvre corps, sans
qu’il crie ni remue, vingt ou trente coups n’est que pour les
peccadilles, mais j’ai vu qu’on en donnait cinquante et même cent,
mais ceux-là n’en reviennent guère. »
    « Dès les premiers coups, dit Bion,
aumônier des galères, la vue du corps du supplicié était telle que
des galériens endurcis, des malfaiteurs, des meurtriers, en
détournaient les yeux. Les coups semblent
terriblement
pesants
, dit un des patients, le sang découle et le dos
s’enfle de trois ou quatre doigts. »
    Après avoir reçu deux bastonnades successives,
le forçat huguenot David de Serres écrit : « Je vous
dirai, sur la douleur dont on ne peut parler que par expérience,
que c’est quelque chose
de bien aigu et de bien pénétrant
.
Elle vous pénètre jusqu’aux os, jusqu’au plus profond du cœur et de
l’âme. Mon cœur défaillit à la fin de chaque bastonnade et
mon
âme fut sur le bord de mes lèvres
, ce me semblait, pour
abandonner sa misérable cabane qu’elle voyait détruire… à me voir
on eût dit à la lettre,
qu’une forte charrue m’eût labouré le
dos
,
en traînant son soc sur ma peau toute
nue
. »
    L’Hostalet, porté à l’hôpital après avoir été
bâtonné ainsi, dit : « Je ne suis pas encore guéri de mes
plaies car, entre la chair et les os,
il y a des amas de chair
meurtrie comme des noisettes
,
tellement que cela se réduit
en flocons fort mauvais
. »
    Après deux bastonnades Élie Maurin resta,
suivant ses propres expressions,
dans une grande débilité de
cerveau.
    Quant à Sabatier, resté longtemps à l’hôpital
entre la vie et la mort à la suite d’une terrible bastonnade, voici
ce que dit de lui Marteilhe qui l’avait retrouvé en Hollande :
« Il en revint, mais toujours si valétudinaire,
si faible
de cerveau
qu’on l’a vu diverses années en ce pays, hors
d’état de soutenir la moindre conversation et ayant
la parole
si basse qu’on ne pouvait l’entendre
. »
    L’aumônier des galères, Bion raconte comment
la vue de ce terrible supplice si courageusement supporté par les
forçats huguenots, l’amena à se convertir au protestantisme :
« Je fus après cette exécution à la chambre de proue [6] , sous prétexte de voir les malades. J’y
trouvai le chirurgien occupé à visiter les plaies de ces martyrs.
Il est vrai qu’à la vue du triste état où étaient leurs corps, je
versai des larmes. Ils s’en aperçurent, et, quoique à peine ils
pussent prononcer une parole, étant plus près de la mort que de la
vie, ils me dirent qu’ils m’étaient obligés de la douceur que
j’avais toujours eue pour eux. J’allais à dessein de les consoler,
mais j’avais plus besoin de consolation qu’eux-mêmes… J’avais
occasion de les visiter tous les jours, et, tous les jours, à la
vue de leur patience dans la dernière des misères, mon cœur me
reprochait mon endurcissement et mon opiniâtreté à demeurer dans
une religion où depuis longtemps j’apercevais beaucoup d’erreurs et
surtout
une cruauté
qui a le caractère opposé à l’Église
de Jésus-Christ. Enfin,
leurs plaies furent autant de bouches
qui m’annonçaient la religion

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