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Les joyaux de la sorcière

Les joyaux de la sorcière

Titel: Les joyaux de la sorcière Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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foi !
    Pendant que l’on dégustait le caviar et la fameuse mousseline de sole, Morosini laissa son invité s’imprégner d’une atmosphère qu’il avait tant de plaisir à respirer de nouveau, les sujets de conversation ne risquant pas de manquer entre eux. Avec les noisettes d’agneau on parla chevaux, le maître les aimant presque autant que les femmes et ce fut seulement quand on eut servi le café et un vénérable armagnac dans des bulles de cristal qu’Aldo entra dans le vif du sujet.
    — Et si vous me parliez des joyaux de la Sorcière ? soupira-t-il. J’ai hâte de savoir où et quand vous les avez vus ?
    Le long nez de Boldini se promena un instant au-dessus de l’alcool mordoré dont ses narines frémissantes humaient l’arôme. Il ferma les yeux pour que la sensation soit plus intense.
    — Il y a nombre d’années, je me suis rendu en Sicile, à l’invitation du prince Gangi et j’ai séjourné quelque temps dans son admirable palais de Palerme. Vous connaissez Palerme, prince ?
    — Plus ou moins ! La Sicile est, comme Venise, un monde clos, aux antipodes des nordistes que nous sommes mais j’avoue un faible pour Palerme. Au milieu d’une turbulente végétation saturée de parfums, elle réussit à être uniquement médiévale et mauresque dans une île où prédomine l’art grec. J’en ai gardé le souvenir d’une espèce de cité des Mille et Une Nuits qui se serait trompée de rivage…
    — Vous voyez juste et la vie qui s’écoule dans ses fantastiques demeures enfouies dans des jardins de conte arabe y est tout aussi étrange. J’en veux pour preuve ce bal costumé donné par un gentilhomme dans une extraordinaire villa de Bagheria à l’occasion de ses fiançailles avec une jeune Florentine… idéalement belle dont le nom était Bianca Buenaventuri. Le thème de ce bal était la Renaissance et j’ai rarement vu plus belle fête. Les jardins, leurs fontaines et leurs cascades d’eaux vives, illuminés par des milliers de petites flammes qui leur gardaient leur mystère en exaltant la splendeur des costumes, exhalaient le parfum mêlé des roses, du jasmin, des orangers, des myrtes et de toutes les plantes de l’Orient. C’était sous le bleu sombre d’un ciel scintillant d’étoiles comme un immense bouquet, une géante cassolette de senteurs et de couleurs au milieu desquels erraient avec grâce des personnages aux costumes somptueux qui en les revêtant semblaient avoir changé de peau. Violons et harpes faisaient entendre une musique douce venue du fond des âges et dont les exécutants restaient invisibles mais nous avions tous l’impression de participer à une sorte de ballet réglé par un maître désincarné qui à l’appel d’un cor nous fit refluer vers la salle de verdure où avant le souper allait avoir lieu la remise de la bague à la fiancée que personne n’avait encore vue… Je dois dire que son apparition me coupa le souffle…
    — À vous dont on peut dire que vous avez peint tant de femmes inoubliables ?…
    — Inoubliables c’est beaucoup dire – à certaines exceptions près. Celle-là cependant je ne l’oublierai jamais. De sa robe d’époque dont la splendeur résidait uniquement dans le satin blanc moiré d’or, s’élevait comme une fleur de son vase un cou de cygne, un pur visage casqué d’une épaisse chevelure dorée dont le poids tirait légèrement sa tête en arrière donnant leur pleine valeur aux yeux les plus sombres, les plus veloutés que j’aie jamais vus. Ils étaient tellement extraordinaires qu’ils éclipsaient presque les joyaux qu’elle portait : une longue croix qu’un simple ruban de velours retenait sur sa gorge largement découverte et des girandoles… que je n’ai pas besoin de vous décrire parce que vous les avez vues hier.
    — Ces pièces étaient-elles sa propriété ? Vous venez de dire qu’elle s’appelait Buenaventuri… comme le garçon qui avait enlevé Bianca Capello de Venise et fut assassiné par la suite ?
    — En effet mais ils ne lui appartenaient que depuis ce soir-là : avant la fête Dario Pavignano son fiancé l’en avait parée lui-même et à l’instant des fiançailles, devant tous les invités, il se contenta de passer à son doigt l’énorme rubis que vous avez pu admirer aussi. Cela dit ne me demandez pas d’où lui venait cette parure. La tenait-il de famille ou l’avait-il achetée ? Il était très riche…
    — Je pencherais plutôt pour la

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