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Les "Larmes" De Marie-Antoinette

Les "Larmes" De Marie-Antoinette

Titel: Les "Larmes" De Marie-Antoinette Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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cœur de son ami quand l’Américaine et lui se retrouveraient face à face. Parce que c’était inévitable…
    Tandis que debout au bord du radeau des musiciens M me  de La Begassière délivrait un petit discours de bienvenue plein de tact et de chaleur, il se pencha un peu pour chercher Aldo et ne vit que son profil : aucun doute ! Il regardait Pauline et Pauline le regardait. Ni l’un ni l’autre ne souriait. Adalbert n’en ressentit pas moins qu’un courant invisible s’établissait entre eux et du concert il n’entendit pas une note, se contentant d’applaudir docilement en même temps que les autres… Une idée s’imposait à lui : il fallait que Morosini rentre à Venise et le plus tôt serait le mieux ! Restait à savoir comment l’en convaincre…
    Aldo non plus ne vit pas grand-chose du spectacle du Hameau animé par les jeux de lumières et les choristes de l’Opéra, n’entendit guère les extraits de Mozart, de Gluck et de Grétry, joués par les musiciens ou chantés par les célèbres Germaine Lubin et Georges Thill. La musique servait seulement à bercer sa rêverie. Persuadé que personne ne faisait attention à lui, il s’accordait le délicieux plaisir de contempler Pauline : son beau visage sauvé d’une froide perfection par une bouche trop grande, trop rouge mais combien attirante, de caresser du regard son cou gracieux le long duquel tremblaient des diamants, sa gorge à peine voilée, ses lourds cheveux noirs et lustrés noués sur la nuque et piqués d’un croissant de lune étincelant. Osant même se souvenir, avec un frisson, de ce qu’il ne voyait pas et se perdre par moments dans les nuages gris des yeux qui revenaient si souvent vers les siens. Eussent-ils été seuls au cœur de cette nuit sublime embaumant le parfum des tilleuls et des roses, qu’il l’eût prise dans ses bras sans un mot, certain qu’elle s’ouvrirait à lui aussi naturellement qu’au matin de Newport…
    Une salve d’applaudissements enthousiastes coupa le fil de son rêve. Il y joignit les siens à retardement…
    — Si tu n’avais l’œil si largement ouvert on aurait pu croire que tu dormais, observa Tante Amélie. Tu étais en transe ou quoi ?
    — Pas en transe mais assez loin ! Je réfléchissais à l’étrange période que nous vivons ici ! Cette série de crimes sordides sur fond de splendeurs !…
    — En ce cas tu sembles y prendre un certain plaisir ? Je t’ai vu sourire… avec béatitude même. Deviendrais-tu sadique ?
    L’œil toujours bien vert de la vieille dame pétillait de malice et elle semblait d’excellente humeur. Aldo décida de ne pas gâcher sa soirée.
    — Quand on laisse son esprit vagabonder, même sur des événements affreux, il arrive que, chemin faisant, il rencontre quelque chose d’amusant, une incongruité… mais je ne vous en ferai pas confidence parce que ce n’est pas toujours… convenable !
    Il s’en tirait avec une pirouette. Si elle garda un doute, elle n’en montra rien. Autour d’eux, applaudissements et acclamations continuaient, nourrissant de nombreux rappels. Enfin, à l’invitation d’Olivier de Malden qui jouait les maîtres de cérémonie, les tribunes se vidèrent et la file des invités s’achemina vers la propriété de lady Mendl, illuminée elle aussi dans le style du Hameau avec des éclairages diffus et des lanternes vénitiennes afin de continuer l’impression de mystère qui régnait autour du lac. Elle avait été jusqu’à faire abattre une partie de sa clôture dans le but de permettre une solution de continuité. Pour l’intérieur de la maison sur lequel ouvraient les hautes fenêtres, elle avait banni l’électricité. Les lustres aux cristaux translucides, les candélabres, les flambeaux, l’ensemble était équipé de ces bougies douées de l’étrange pouvoir de flatter les visages en les adoucissant et d’allumer des éclairs dans les joyaux des femmes.
    Des tables rondes juponnées de damas blanc et bleu étaient disposées sur la terrasse, autour de la pièce d’eau et sous les arbres. Elles portaient en leur centre des surtouts de bois doré piqués de feuillages, de nœuds de rubans bleus, de roses, de bruyères blanches comme les bougies. Le chiffre de Marie-Antoinette était brodé en bleu et or sur toutes les serviettes destinées à constituer autant de souvenirs. Enfin des valets en perruques blanches et livrées bleu et blanc attendaient les convives. Le spectacle

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