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Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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de respirer en attendant que votre dos se brise ! » Sabine se mit à pleurer. Sir Edwin la regarda, puis se retourna vers moi.
    « Comment osez-vous tenir de tels propos devant ma pauvre fille ? hurla-t-il. Elle pleure son frère comme je pleure mon fils ! Vilain corbeau ! Bossu tordu ! On voit bien que vous n’avez pas d’enfants ! »
    Il avait le visage déformé et de la salive au coin des lèvres. Les gens qui montaient ou descendaient les marches s’étaient arrêtés pour observer la scène. Quelqu’un éclata de rire en entendant sa volée d’insultes. Afin d’éviter que l’incident ne fasse à nouveau jaser sur le compte d’Elizabeth, je voulus contourner sir Edwin, mais Needler fit un pas de côté, me barrant la route. Je le regardai avec une telle rage qu’il finit par s’écarter. Suivi par de nombreux regards curieux, je descendis les marches et me dirigeai vers les écuries.
    Lorsque j’arrivai près de Chancery, je me rendis compte que je tremblais. Je lui caressai le museau, et il chercha ma main, espérant que je lui apportais à manger. La fureur de sir Edwin m’avait déconcerté ; sa haine d’Elizabeth dépassait toute mesure. Mais il avait perdu son fils unique, et il avait raison : je n’avais pas d’enfants et je ne pouvais savoir ce qu’il éprouvait. Je pendis la sacoche de livres à mon épaule, montai en selle et quittai l’hôtel de ville où sir Edwin avait disparu.
    Je me dirigeai vers le nord, en direction du mur d’enceinte de la Cité, près duquel se trouvait l’ancien prieuré de St Michael. Il était situé dans une rue où de solides maisons jouxtaient des habitations misérables. La rue était vide, tranquille et ombragée. St Michael se trouvait à mi-hauteur. C’était un petit couvent, dont l’église n’était pas plus grande qu’une belle église paroissiale. Les larges portes étant ouvertes, je descendis de cheval pour regarder à l’intérieur et satisfaire ma curiosité.
    Je n’en crus pas mes yeux. De part et d’autre de la nef s’élevaient des cloisons de bois à l’aspect fragile. Au niveau du sol s’ouvrait une rangée de portes, tandis que des escaliers branlants menaient à d’autres portes à l’étage. Il devait y avoir une douzaine d’appartements en tout. Le centre de la nef était transformé en un étroit couloir dont les dalles anciennes disparaissaient sous la crasse.Les cloisons obturaient les fenêtres, aussi faisait-il sombre à l’intérieur. Seule celle qui dominait le chœur laissait entrer un peu de lumière.
    Derrière la porte, deux anneaux de fer avaient été fixés dans un ancien bénitier. En voyant sur le sol de petits tas de crottin, j’en déduisis que c’était là qu’on attachait les chevaux. Je nouai les rênes de Chancery à l’un des deux anneaux et avançai le long de l’étroit couloir. Voici donc les aménagements de Bealknap, me dis-je. L’ensemble était si précaire qu’il donnait l’impression de menacer ruine à tout instant.
    L’une des portes de l’étage s’ouvrit. J’aperçus une pièce pauvrement meublée éclairée par un vitrail qui formait le mur extérieur du logis. Une vieille femme maigre sortit et se posta en haut de l’escalier qui trembla légèrement sous son poids.
    « Vous venez de la part du propriétaire, l’avocat ? » demanda-t-elle avec un accent du nord prononcé, regardant ma robe noire d’un air hostile.
    Je me découvris. « Non, madame, je représente le Conseil de la Cité. Je suis venu examiner la fosse d’aisances, car nous avons reçu des plaintes. »
    La vieille femme croisa les bras. « Cette fosse, quelle honte ! Nous sommes trente à l’utiliser, nous autres qui vivons ici et ceux qui habitent le cloître. Il y a des odeurs à faire tomber raide un bœuf. Je plains ceux qui habitent à côté de la porte de l’église, mais qu’est-ce que vous voulez, il faut bien qu’on s’en serve !
    — Personne ne saurait vous en tenir rigueur, madame, bien au contraire. J’espère que nous pourrons obtenir l’ordre de faire construire une fosse d’aisances convenable, mais le propriétaire renâcle. »
    Elle cracha avec rage. « Ce chien de Bealknap ! Nous avons refusé de payer notre loyer tant qu’il n’aurait pas fait condamner ces grandes fenêtres. On cuit, à cause du soleil qui entre à flots par ces fioritures papistes.
    — En effet. »
    Elle se pencha sur la rampe et s’anima, car le sujet lui tenait à cœur. « Je vis ici avec mon

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