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Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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que vous seriez mal à l’aise sur une monture un peu nerveuse », ajouta-t-il. L’allusion à ma difformité était brutale. Il écarta les bras. « Palsambleu, Richard, je ne serai pas fâché de voir le Parlement entrer en vacances, afin de pouvoir retourner à la campagne. Mais vous, vous êtes un citadin dans l’âme, non ?
    — Je suis londonien, Votre Grâce », répondit Rich non sans raideur. Il se retourna vers moi. « Le duc est venu discuter du transfert de certaines terres monastiques. » Il n’était pas tenu de me donner la moindre explication et me fournissait là une justification à leur rencontre, au cas où j’eusse été tenté de répandre les rumeurs selon lesquelles ils fomenteraient une conspiration. Cela pouvait être vrai, car il était de notoriété publique qu’en dépit de son conservatisme religieux Norfolk avait pris sa part des biens monastiques.
    « Oui, lança Norfolk. Quant à vous, Richard, vous vous êtes octroyé la jouissance de St Bartholomew en fait sinon en droit,pas vrai ? » Il se mit à rire. « Sir Richard a attribué les maisons qui entourent le prieuré à un si grand nombre de ses agents qu’on pourrait appeler cet endroit l’annexe de la cour des augmentations à Smithfield. Alors que ce pauvre prieur Fuller n’est pas encore mort. Ce n’est pas vrai que vous l’empoisonnez, dites-moi, Richard ? »
    Lequel répondit avec un sourire contraint : « Le prieur a une maladie qui le fait dépérir, Votre Grâce. »
    Les railleries du duc visaient sans doute à me faire comprendre qu’ils n’étaient pas en bons termes. Rich se détourna lorsqu’un domestique apparut à la porte, tenant à la main un sac lourd, et lui murmura quelques mots à l’oreille. « Mettez-les dans mon bureau, dit Rich d’un ton sec. Je les examinerai plus tard. »
    Norfolk regarda le sac avec curiosité lorsque le valet disparut à l’intérieur. « Qu’est-ce qu’il y a là-dedans ?
    — Nous retournons l’ancien cimetière des moines dans le cloître pour en faire un jardin. Une coutume d’autrefois voulait, semble-t-il, qu’ils se fassent enterrer avec des objets personnels. Nous avons trouvé quelques articles intéressants. »
    Je me souvins des apprentis qui fouillaient dans les cercueils lorsque j’étais venu voir Kytchyn, et du petit bijou d’or que le portier s’était approprié.
    « De valeur, sans doute ?
    — Certains, oui. Des objets d’intérêt historique aussi. Des bagues anciennes, des talismans contre la peste, et même de vieilles plantes enterrées avec un apothicaire. Je m’intéresse à tout cela, Votre Grâce. Je n’ai pas toujours l’esprit occupé par le profit », dit-il avec une certaine acrimonie. Je compris alors que, malgré sa brutalité et sa cruauté, Rich n’appréciait guère sa réputation de vénalité.
    « Une étrange coutume.
    — Oui. J’en ignore l’origine. Mais ceux qui sont enterrés ici, moines ou patients de l’hôpital, l’ont tous été avec un objet personnel, quelque chose qui caractérisait leur vie, j’imagine. Nous en aurons fini avec les moines dans deux jours, puis nous passerons au cimetière de l’hôpital. J’y ferai peut-être construire des maisons. »
    Mon cœur se mit à battre quand je compris ce qui pouvait avoir été enterré avec le soldat Saint-John. Quelqu’un allait très loin pour faire disparaître les dernières traces du feu grégeois. Mais peut-être y en avait-il encore quelques-unes, enfouies sous la terre de St Bartholomew.
    Je me rendis compte que Rich me regardait. « Quelque chose a éveillé votre intérêt, Shardlake ?
    — Oh, c’est que je m’intéresse moi aussi aux antiquités, messire. J’ai vu à Ludgate de vieilles pierres provenant d’une ancienne synagogue.
    — Il faudrait se mettre à nos affaires, messire, coupa Norfolk, au mépris de toute politesse. Il fait trop chaud pour rester planté toute la journée au soleil.
    — Bien, Votre Grâce. Je vous souhaite bonne route, messire Shardlake, dit Rich en plissant ses yeux gris. Évitez de trop fouiller dans les affaires des autres, vous risqueriez de vous brûler les doigts. Ne l’oubliez pas. »
    Là-dessus, il tourna les talons, et, accompagné de Norfolk, passa sous le porche d’entrée. La suite du duc me regarda avec curiosité tandis que je faisais faire demi-tour à Genesis et m’éloignais. Je m’aperçus que je ruisselais. Assurément, la chaleur n’était pas seule en cause. Pourquoi cette

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