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Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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l’énorme porche,Holbein Gate, aux armoiries colorées et médaillons en terre cuite représentant les empereurs romains, Barak se tourna vers moi.
    « Peut-être aurions-nous dû confronter Leman et Bealknap ce matin.
    — Mon entrevue avec lady Honor était tout aussi importante. »
    Il m’adressa un de ses regards pénétrants : « Vous menacerez de le dénoncer, n’est-ce pas, à moins qu’il nous donne des réponses circonstanciées. Pas de solidarité entre confrères cette fois-ci ?
    — Non. Encore que, si Bealknap est appelé à comparaître devant le secrétaire, ma réputation à Lincoln’s Inn sera compromise. Les avocats ne sont pas censés se dénoncer les uns les autres. Cependant, je vous assure que je n’épargnerai pas Bealknap, déclarai-je en soutenant son regard. Mais dites-moi, qu’avez-vous raconté à mon propos en faisant votre rapport à Cromwell ? Vous ne vous êtes sûrement pas abstenu de tout commentaire.
    — Cela ne vous regarde pas, dit-il, gêné.
    — Je veux savoir à quoi je dois m’attendre.
    — J’ai donné un compte rendu de nos faits et gestes, voilà tout, répondit simplement Barak. Je ne vous ai aucunement critiqué, si vous voulez savoir. Mais cela ne nous avance guère. Ce qu’il veut, ce sont des résultats. »
    Je passai le premier et entrai sous le porche monumental qui nous offrit quelques instants une ombre bienvenue. Partout, on construisait, partout on voyait des échafaudages et de la poussière. On achevait des jeux de paume. Des logements sortaient de terre. Le roi, disait-on, voulait faire de Whitehall le plus beau palais d’Europe. Nous tournâmes dans le bâtiment de la nouvelle Privy Gallery où le comte avait ses bureaux. Barak échangea un mot avec le garde, et on nous laissa entrer.
    Un long vestibule dont les grandes fenêtres donnaient sur un jardin se déployait devant nous, richement décoré de tapisseries. Le roi, je le savais, recevait souvent ses visiteurs ici. Je retins mon souffle en voyant, gardé par un hallebardier, le grand mural de Holbein représentant la dynastie Tudor. Le gigantesque tableau était aussi magnifique que je l’avais entendu dire. Les défunts parents du roi — Henry VII, que la famille de lady Honor avait combattu à Bosworth, et sa femme Elizabeth d’York — se tenaient de part et d’autre d’un sépulcre de pierre. Au premier plan et au-dessous d’eux, on voyait Jane Seymour, la seule de ses épouses dont Henry VIII se plaisait à se souvenir. En face de sa femme au visage curieusement ingrat, le roi lui-même, mains sur leshanches. Sur le tableau, il portait un manteau court richement décoré, aux énormes épaules, un pourpoint incrusté de pierreries et un haut-de-chausse à la braguette proéminente. On eût dit qu’il me dévisageait. Son visage exprimait une froide autorité, à laquelle se mêlait autre chose. Lassitude ? Colère ? Je frissonnai en pensant qu’après la colère de Cromwell, si le feu grégeois n’était pas retrouvé d’ici quelques jours, s’annonçait celle du roi lui-même.
    « Allons, souffla Barak à côté de moi, le comte attend. »
    Barak semblait bien connaître son chemin dans ces couloirs où résonnaient les pas. Des courtisans et des agents de l’administration en robe noire circulaient sans bruit et calmement, au cas où le roi serait dans le palais. J’admirai le magnifique jardin, dominé par une fontaine qui, malgré la sécheresse, avait encore un copieux débit. Barak s’arrêta devant une porte gardée par un autre hallebardier, et nous fûmes admis dans un premier bureau où l’inévitable Grey était assis derrière une table. Il se leva pour nous accueillir. Comme la dernière fois, je remarquai que son visage rond d’érudit trahissait une certaine nervosité.
    « Messire Shardlake. Apportez-vous des nouvelles ? J’ai vu les messages de Barak. Il reste si peu de temps…
    — Nous réservons nos nouvelles au comte », rétorqua sèchement Barak.
    Grey le regarda et inclina la tête. « Soit, Barak, mais je préfère vous prévenir qu’il est de fort méchante humeur. Et avec lui se trouve le duc de Norfolk, qui est là depuis deux heures.
    — Vraiment ? dis-je. J’ai vu le duc tout à l’heure à Smithfield. En compagnie de Richard Rich. »
    Grey secoua sombrement la tête. « Tous les vieux amis du comte complotent contre lui. N’est-ce pas cruel ? » Il secoua la tête, jeta un coup d’œil nerveux vers une porte intérieure, puis se

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