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Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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sommeil. Il se radoucit lorsque je lui glissai un shilling dans la main. Il appela le gros guichetier. Le visage de l’homme se rembrunit quand le geôlier lui dit de nous conduire à la basse-fosse, et il nous emmena dans les profondeurs de la prison sans ses habituelles plaisanteries grossières. Il ouvrit la porte d’un geste brusque, s’écarta prestement et se tint contre le mur opposé.
    L’odeur âcre d’urine et de mauvaise nourriture qui nous saisit en entrant dans cette cellule étouffante était insoutenable. Elle nous prit à la gorge, nous faisant monter les larmes aux yeux. Nous avançâmes, le nez enfoncé dans la manche. Elizabeth gisait sur la paille, inconsciente, les membres de guingois. Son visage était crispé et ses yeux bougeaient sous les paupières closes, mus par quelque rêve fiévreux. Elle avait le visage très rouge. Son crâne lui-même, dans toute sa nudité obscène, était rose et luisant. Je mis la main sur son front. Joseph avait raison : elle était brûlante. Je fis signe à mes compagnons d’aller attendre dehors et m’approchai du guichetier. « Écoutez, je sais que vous avez des chambres confortables au-dessus.
    — Seulement pour ceux qui peuvent payer.
    — Nous paierons, dis-je. Emmenez-moi chez le geôlier. »
    Le guichetier referma la porte à clef. Je fis signe aux autres de rester où ils étaient et le suivis jusqu’au logis du geôlier, une chambre confortable avec un lit de plumes et des tapisseries aux murs. L’homme était assis à la table, l’air inquiet malgré ses traits durs.
    « Elle est morte, Williams ? demanda-t-il.
    — Non, messire.
    — Écoutez, nous aimerions la soustraire à ce lieu fétide. Je paierai pour qu’elle ait une chambre saine. »
    Le geôlier secoua la tête. « Si on la déménage, les rumeurs de sa maladie se répandront dans toute la prison. Et le juge a ordonné qu’elle soit enfermée dans la basse-fosse.
    — J’en répondrai devant Forbizer. Je connais un apothicaire qui est susceptible de l’aider, voire de la guérir de sa fièvre. Si elle se remet, il n’y aura pas d’épidémie, voyez-vous ? »
    Il hésitait encore. « Qui la transportera là-haut ? Moi, je ne m’approche pas d’elle, et mes hommes non plus. »
    Je réfléchis un instant, puis déclarai : « Nous nous en chargerons. Il doit bien y avoir derrière la prison des escaliers, par lesquels nous pourrons passer. »
    Il pinça les lèvres. « Deux shillings la nuit, c’est le prix. » Malgré sa terreur de la fièvre, la cupidité brillait dans ses yeux durs.
    « Topez là » dis-je, bien que ce fût exorbitant. Je pris ma bourse et sortis une pièce d’or. « Voilà pour cinq nuits. Cela nous mène au jour où elle doit comparaître devant Forbizer. »
    L’argument parut convaincre le coquin, qui hocha la tête et tendit la main.
    L’ascension fut un cauchemar. Quatre étages au-dessus de la basse-fosse jusqu’à la chambre obtenue grâce à mon or. Le geôlier allait à bonne distance devant nous avec une chandelle, tandis que Barak et Joseph portaient Elizabeth, toujours inconsciente. Je grimpai les marches derrière eux, qui montaient la malheureuse, la traînant autant qu’ils la portaient sur les marches de pierre. Les têtes tondues d’Elizabeth et de Barak projetaient des ombres étranges sur les murs. Le corps fiévreux d’Elizabeth, qui ne s’était pas lavée depuis des jours, dégageait une odeur déplaisante. Tandis que je montais péniblement, je me rendis compte que mes forces me trahissaient à nouveau et que je serais incapable de me rendre au puits le soir même. Je formulai une prière désespérée pour demander de l’aide, pour qu’il me soit donné de trouver une issue à cet imbroglio où je me trouvais empêtré et où tous mes efforts pour innocenter Elizabeth comme pour résoudre le mystère du feu grégeois semblaient tourner court.
    On nous fit entrer dans une pièce claire et aérée, avec un bon lit, une couverture, un pichet d’eau sur une table et une grande fenêtre qui, bien qu’elle eût des barreaux, était ouverte : une chambre pour un prisonnier de qualité. Joseph et Barak posèrent Elizabeth sur le lit. Elle ne paraissait pas s’être aperçue du changement, mais bougeait légèrement en gémissant. Soudain, elle murmura un nom : « Sarah ! Oh, Sarah ! »
    Joseph se mordit la lèvre. « C’est le nom de la fille qui a été emmenée à Bedlam », souffla-t-il.
    Je hochai la tête. « Si elle

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